OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 Youtube et Creative Commons, qu’est ce qui change ? http://owni.fr/2011/06/14/youtube-et-creative-commons-quest-ce-qui-change/ http://owni.fr/2011/06/14/youtube-et-creative-commons-quest-ce-qui-change/#comments Tue, 14 Jun 2011 14:02:29 +0000 Lionel Maurel (Calimaq) http://owni.fr/?p=32225 Après avoir fait des études en sciences politiques et en droit public à l’Université des Sciences Sociales de Toulouse, Lionel Maurel (aka Calimaq) devient Conservateur à la Bibliothèque nationale de France.
Il s’intéresse tout particulièrement aux questions juridiques liées à l’activité des bibliothèques, notamment tout ce qui touche à la propriété intellectuelle et aux droits d’auteur. Ce sont surtout les aspects liées à l’environnement numérique et aux nouvelles technologies qui retiennent son attention.
Calimaq écrit sur le blog S.I.Lex, est membre de l’ADBS (Association des Documentalistes et Bibliothécaires Spécialisés) et participe dans ce cadre aux travaux de la Commission Droit de l’Information, ainsi qu’à l’action de lobbying de l’IABD (Interassociation Archives/Bibliothèques/Documentation).

La nouvelle a été saluée par plusieurs articles et commentaires (jusque sur le site du Monde.fr) : le site de partage de vidéos YouTube permet enfin , depuis cette semaine, de placer ses créations sous licence Creative Commons (uniquement la CC-BY 3.0 [en]). Cette décision de Google – propriétaire de YouTube depuis 2006 – marque sans doute une étape importante dans l’évolution des médias sociaux et une opportunité pour la diffusion de la Culture Libre. Néanmoins, j’aimerais prendre un moment pour essayer de cerner ce que ce passage aux Creative Commons va changer exactement. L’infrastructure juridique de YouTube est en effet très particulière, comparée par exemple à une autre plateforme de partage autorisant l’usage des Creative Commons comme Flickr, et cela n’est pas sans incidence sur l’effet des licences.

(Ci-dessous, la première vidéo en Creative Commons créée sur YouTube sous licence Creative Commons – émouvant !)

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Entre Copyright, Copyleft et (surtout) Copydown

Vous êtes nombreux déjà à reprendre des vidéos de YouTube sur vos sites et sur vos blogs, en faisant des embed, c’est-à-dire en copiant un bout de code HTML permettant de visualiser la vidéo en streaming à partir du lecteur de YouTube sur votre propre site (c’est une fonctionnalité de base proposée par YouTube). Or j’imagine que rares sont ceux parmi vous à vous être demandés si vous aviez le droit de procéder à un tel acte, et surtout, sur la base de quel fondement légal…

C’est pourtant une question fort intéressante, car a priori, les vidéos postées sur YouTube sont des objets protégés par le droit d’auteur, et l’embed réalisant un acte de représentation des oeuvres (par le biais du streaming), il devrait être soumis à l’autorisation préalable des titulaires de droits.

C’est en fait en direction des CGU (Conditions Générales d’Utilisation) de YouTube qu’il faut se tourner pour s’apercevoir que l’embed de la plateforme repose sur une base contractuelle, indépendante des Creative Commons, et ce depuis fort longtemps.

On y apprend que l’utilisation de YouTube fait naître entre vous et la plateforme un contrat, précisant à son article 8 que :

Lorsque vous soumettez du Contenu sur YouTube, vous concédez [...] à chaque utilisateur du Service, le droit non exclusif, à titre gracieux, et pour le monde entier d’accéder à votre Contenu via le Service et d’utiliser, de reproduire, de distribuer, de réaliser des œuvres dérivées, de représenter, d’exécuter le Contenu dans la mesure autorisée par les fonctionnalités du Service et par les présentes Conditions.

Or dans la liste des fonctionnalités du service figure (dès l’article 1) le « Lecteur YouTube » qui permet de réaliser les embed. Autant dire que les CGU de YouTube utilisent le procédé contractuel pour « neutraliser » le jeu classique des règles du Copyright et étendre les droits d’usage sur les contenus.

J’ai déjà eu l’occasion de décrire ce phénomène à plusieurs reprises sur S.I.Lex (ici par exemple pour les images) et proposé de lui donner le nom de Copydown, pour le distinguer justement de l’effet des licences libres comme les Creative Commons (Copyleft). Le Copydown est un élément important de l’architecture des plateformes de partage de contenus, agrégeant des User Generated Content. André Gunthert avait déjà fort bien montré à propos des images, comment ce mécanisme contractuel, combiné avec la technologie de la lecture exportable, conduit à une forme de « mort du copyright« . En général, le Copydown comporte deux faces distinctes : d’une part, la plateforme utilise ses CGU pour se faire céder une licence non exclusive très large, lui permettant de « s’approprier les contenus » (Twitpic a fait parler de lui récemment à ce sujet) et d’autre part, la plateforme peut élargir les droits d’usage sur les contenus, en prévoyant des dispositions spéciales dans ses CGU.

Qu’en est-il maintenant de YouTube et du passage au Creative Commons ? Pour donner une comparaison, quand j’utilise Flickr, je prends toujours garde à vérifier que les images soient bien placées sous Creative Commons avant de les reprendre sur ce blog ou de les intégrer à un support de formation. Pour les vidéos de YouTube, on pourra désormais faire de même, en cherchant des vidéos sous CC, mais à vrai dire, rien n’empêchera de faire comme avant, et d’aller piocher dans l’immense réservoir de YouTube, à condition d’utiliser le lecteur de la plateforme. La réutilisation est possible en vertu de la « magie noire » des CGU de YouTube… et du Copydown qui court-circuite la règle de l’autorisation préalable.

Pour le commun des utilisateurs de YouTube (comme moi), le passage au CC ne change donc pas grand chose. C’est plutôt pour les amateurs de remix que l’usage des licences libres ouvrent de nouvelles perspectives… mais là encore, prudence !

Une base légale pour la pratique du remix vidéo, mais…

C’est à partir de l’éditeur vidéo de YouTube que l’on a accès à la bibliothèque d’œuvres sous Creative Commons de YouTube. L’interface permet de rechercher des vidéos réutilisables à partir d’un moteur, de les enchaîner en une seule œuvre et de les associer à un morceau de musique, bref de réaliser un mashup ou un remix. Il est clair que l’existence de cette nouvelle source de contenus sous licence libre va se révéler très précieuse pour tous les amateurs désireux de se livrer à ces pratiques. La réalisation d’œuvres dérivées ou composites constitue en effet, en principe, un acte relevant des droits patrimoniaux de l’auteur (droit d’adaptation) et nécessitant son autorisation préalable. Les Creative Commons sur YouTube vont donc contribuer à fluidifier les pratiques, en fournissant un matériaux a priori réutilisable.

Néanmoins, il faut sans doute relativiser la portée du passage aux licences Creative Commons sur YouTube, qui ne pourront à elles seules régler le problème légal posé par le remix.

Dans sa FAQ consacrée aux Creative Commons, YouTube prend ainsi bien garde de rappeler des consignes essentielles d’usage de ces licences, et notamment que l’on doit être titulaire de TOUS les droits sur une oeuvre pour pouvoir la placer sous CC.

Please understand that you may ONLY mark your uploaded video with a Creative Commons license if it consists ENTIRELY of content licensable by you under the CC-BY license.

Some examples of such licensable content are:

* Your entirely originally created content

* Other videos marked with a CC-BY license

* Videos in the public domain

Or pour une large part, les amateurs de remix apprécient de pouvoir réutiliser non pas seulement des contenus produits par des anonymes, mais plutôt de détourner des oeuvres  commerciales populaires, pour en créer des adaptations, des prolongements ou susciter des collisions inattendues.

Ainsi par exemple, quand DJLobster veut fusionner en un même objet musical improbable un morceau de Nirvana et un autre de Lady Gaga, il réalise certes un mashup [en], mais aussi une contrefaçon, et dans ce cas, les Creative Commons ne peuvent être d’aucun secours, car les droits sur ces musiques appartiennent à une major (EMI en l’occurence) fort peu enclines à l’usage des licences libres. Résultat : si vous allez sur YouTube pour écouter l’œuvre dérivée de DJLobster, vous constaterez qu’elle a été retirée suite à une plainte des titulaires de droits [en] et qu’il ne reste qu’une coquille vide (voir ci-dessous ou là).

Cliquer ici pour voir la vidéo.

C’est le même processus qui avait conduit au retrait massif l’an dernier de tous les détournements réalisés à partir de la fameuse scène de l’accès de rage d’Hitler, tirée du film La Chute. En un sens, ces exemples montrent que si les licences Creative Commons peuvent bien sûr apporter une contribution importante pour faciliter la pratique du remix, le champ de bataille fondamental reste celui de la loi sur le droit d’auteur et, plus particulièrement, des exceptions et limitations au copyright. Le vrai combat consiste à faire reconnaître dans la loi un droit d’usage des œuvres qui ait une force équivalente au droit d’auteur, sur la base de la liberté d’expression et de participation à la vie culturelle. Aux États-Unis, le fair use (usage équitable) constitue un point solide pour livrer ce combat en faveur de la Culture Libre, comme le fait EFF depuis des années. En droit français, il reste énormément de travail à accomplir, car on se trouve immédiatement rejeté sur le terrain des maigres exceptions de parodie ou de courte citation, qui ne peuvent constituer le support de réelles libertés créatives.

Pour maximiser l’effet de la combo YouTube + Creative Commons, il faudrait à présent que des gros fournisseurs de contenus acceptent de verser dans la bibliothèque de la plateforme des masses importantes de vidéos en les « libérant » sous licence CC-BY. Des chaînes de TV comme Al Jazeera, C-Span ou Voice of America ont déjà réalisé des apports importants de contenus sur YouTube ; il faut espérer à présent que d’autres suivent, et pourquoi pas (soyons fous !) que des organismes comme l’INA par exemple participe à ce mouvement ?

Dernière limite que je perçois à l’usage des CC dans le domaine de la vidéo : la grande complexité de la chaîne des droits en matière d’audiovisuel (voyez ici). Utiliser les licences Creative Commons sur une plateforme comme Flickr est relativement simple, car une photographie possède en général un auteur unique qui va concentrer les droits au moment de la prise du cliché. Le droit des images a bien sûr ses subtilités, mais la photo n’en reste pas moins un support relativement favorable à l’usage des licences libres. Pour la vidéo, les choses sont beaucoup plus complexes, avec des multitudes de titulaires de droits de nature différentes (droit d’auteur, mais aussi droits voisins des interprètes et des producteurs). Une complexité redoublée lorsque des musiques sont associées aux images animées, comme l’avait fort bien montré Michèle Battisti dans ce billet.

On trouve parmi les photos de Flickr des usages fautifs des licences Creative Commons (ici par exemple) et il y a fort à parier que ces problèmes seront également fréquents sur YouTube, même si la plateforme a pris quelques précautions pour faciliter l’emploi des licences.

(La YouTube Copyright School a quand même de beaux jours devant elle…)

Cliquer ici pour voir la vidéo.

La licence CC-BY 3.0 US comme seule option (et ses conséquences)

Flickr propose à ces utilisateurs toutes les options des Creative Commons, permettant d’aboutir à 6 licences différentes, élargissant plus ou moins les droits d’usage. Sur YouTube, le choix a été limité à la seule licence Creative Commons Paternité (CC-BY 3.0 US) et ce choix est sans doute lié à la complexité du droit de la vidéo pointé plus haut.

La licence CC-BY permet la réutilisation de manière très large, en permettant la réalisation d’œuvres dérivées et l’usage commercial, à la seule condition de mentionner le nom de l’auteur de l’œuvre originale. Ce faisant, YouTube évite les problèmes épineux posés par la condition NC (pas d’usage commercial) : la délimitation de ce qui est commercial ou ne l’est pas sur Internet est difficile à tracer (un rapport de CC International réalisé en 2009 [en] n’avait pas apporté de réponse définitive). D’autre part, YouTube évite également les problèmes posés par la clause SA (Share Alike – Partage à l’identique des conditions initiales), chère aux défenseurs du Copyleft, mais complexe également à mettre en œuvre comme a pu le démontrer la récente affaire Houellebecq/Wikipédia.

La Licence CC-BY (celle que j’ai choisie pour S.I.Lex) possède en revanche un effet libérateur très puissant sur les contenus. En réalité, elle permet la réutilisation dans des conditions même plus libres que si l’œuvre était dans le domaine public « naturel ». Car en droit français, une œuvre dans le domaine public est toujours soumise au droit moral, et notamment au droit à l’intégrité, empêchant qu’on la modifie ou qu’on l’adapte sans autorisation des titulaires de droit. On peut donc dire que  grâce à la CC-BY, YouTube va devenir un nouveau lieu de cristallisation des « Biens Communs Volontaires » et c’est une très bonne nouvelle.

Une autre bonne nouvelle, c’est que la licence CC-BY est compatible avec les usages collectifs des œuvres (usage par des institutions, usage pédagogique et de recherche, etc), alors que le Copydown des CGU de YouTube était assez ambigu sur ce point, car il se réfère souvent à la notion vague « d’usage personnel non commercial », pas exactement superposable avec l’usage collectif.

Relevons cependant que YouTube va proposer seulement l’emploi des CC-By 3.0 en version américaine et cela peut poser quelques problèmes en droit français, comme l’a relevé fort justement Michèle Battisti sur Twitter :

@Calimaq @paul_keller Oui, mais sous licence CC 3.0 US. Seule licence possible ? De quoi commenter, non ?

Certes le contrat est la loi des parties, et on peut théoriquement choisir n’importe quelle licence Creative Commons pour ses œuvres, mais certaines particularités du droit français (comme la loi Toubon, Art. 5  notamment) font que la validité des contrats est mieux assurée lorsqu’ils sont traduits en français. Or seule les licences CC 2.0 ont fait l’objet d’une traduction et l’on attend toujours celle des licences 3.0 par Creative Commons France

Une bataille, mais pas la guerre…

Malgré les réserves que j’émets dans ce billet, l’adoption des Creative Commons par YouTube constitue un changement notable, à saluer dignement comme un jalon pour la promotion de la Culture Libre. Ses effets concrets dépendront à présent de la manière dont les vidéonautes alimenteront la bibliothèque sous licence libre de YouTube et des partenariats qui pourront être noués avec de grands fournisseurs de contenus.

Mais comme je l’ai dit, selon moi, le combat décisif pour la Culture Libre ne peut se limiter à la sphère contractuelle, et c’est dans la loi qu’un véritable droit à la réutilisation créative doit être inscrit, à l’égal du droit d’auteur.

Billet initialement publié sur :: S.I.Lex ::

Image Flickr CC Paternité Giuli-O; conrado reis

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Vidéo et gestion des droits : ne faites pas n’importe quoi ! http://owni.fr/2011/02/07/video-et-gestion-des-droits-ne-faites-pas-nimporte-quoi/ http://owni.fr/2011/02/07/video-et-gestion-des-droits-ne-faites-pas-nimporte-quoi/#comments Mon, 07 Feb 2011 16:14:44 +0000 Michèle Battisti http://owni.fr/?p=30150 En prenant l’exemple du lipdub, Michèle Battisti fait le point sur les démarches administratives à accomplir lorsque l’on souhaite utiliser un contenu audio dans le cadre d’une vidéo promotionnelle. Des conseils utiles aussi bien pour un responsable marketing que pour les artistes qui voudraient se protéger de l’exploitation illégale de leurs morceaux.

Reprendre la définition

Un lipdub, ou clip de promotion est une vidéo réalisée en play-back et en plan-séquence par des collègues d’un milieu professionnel, généralement destiné à une diffusion sur Internet ou d’autres réseaux.

Établir la liste des droits

Si l’on utilise, par exemple, une chanson diffusée dans le commerce sous la forme d’un CD, il sera nécessaire d’obtenir des droits auprès de l’auteur de la musique et de l’auteur des paroles, voire auprès de l’arrangeur si l’arrangement s’avère lui aussi original. Il faudra également l’autorisation du producteur du CD de l’enregistrement utilisé (ne pas se tromper de version de la chanson) et celle de l’interprète qui bénéficient tous deux de droits voisins.

Une autorisation au titre du droit moral pourrait être envisagée, l’interprétation étant susceptible de porter atteinte à l’intégrité de l’œuvre lorsqu’elle est déformée par une mauvaise exécution, par une modification des paroles (ce qui sera sans doute simple à prouver, … à moins de démontrer que l’on est dans le registre de l’humour, la parodie étant une exception au droit d’auteur, et dans ce cas plus besoin de l’accord du parolier !), ou tout simplement pour avoir été utilisée à des fins non désirées. A cet effet, avant toute diffusion, il sera opportun de contacter les auteurs et les interprètes, voire leurs ayants droits si ceux-ci sont décédés.

C’est ce qui permettra d’exploiter l’œuvre musicale dans un cadre collectif sur internet, lors de divers évènements institutionnels, mais aussi sur l’intranet de l’entreprise, en n’oubliant pas de mentionner les auteurs dans les crédits.

Négocier les droits

Pour une diffusion sur Internet ou intranet, c’est la société de gestion collective Sesam qui sera votre interlocuteur. Comme Sesam ne représente, via la Sacem, que les auteurs, il faudra également contacter le producteur qui vous accordera souvent – mais pas toujours –l’autorisation des interprètes. Les auteurs peuvent – cas rare mais à envisager – n’être pas membres de la Sacem. Dans ce cas, il vous appartient de les retrouver.

Mais Sesam n’accorde pas le droit de télécharger l’enregistrement. Si vous souhaitez octroyer cet usage, il faudra contacter en outre la Sacem et le producteur.

En revanche, si le lipdub est diffusé lors d’une manifestation (assemblée générale, journée portes ouvertes, …), l’accord de la Sacem est suffisant car, dans ce cas, cette société de gestion collective représente également les sociétés de gestion collective de producteurs et d’interprètes. Si ce n’est que les auteurs et les interprètes doivent être directement contactés au titre du droit moral. Et oui !

Ne pas oublier

Lorsque la vidéo est réalisée avec l’aide d’une agence de communication, il faut régler par contrat outre la question de la prestation, celle des droits et, au titre du droit à l’image, il est prudent d’obtenir l’autorisation de ses collègues ou personnes apparaissant sur le clip. On ajoutera qu’il faut éviter de filmer des lieux protégés par le droit d’auteur et des lieux privés sans autorisation expresse, ou encore d’adopter des chorégraphies toujours sous droit, comme celles réalisées par Michael Jackson, pourtant si tentantes.

Je n’ai pas tous les droits

En cas d’infraction, une notification sera faite aux plateformes hébergeant votre vidéo qui ne s’embarrasseront pas de vérifier leur licéité, et supprimeront votre clip supposé contrefaisant ((La Sacem qui avait déjà négocié avec Dailymotion, a conclu un accord avec YouTube le 30 septembre 2010.  Depuis le 1er octobre 2010, la mise en ligne sur YouTube permet  de se passer de l’autorisation de la Sacem, mais pas de celle des producteurs de CD ni des artistes-interprètes que cette société ne représente pas (encore) ou portant atteinte à la vie privée, à charge pour vous de présenter les accords obtenus, dans une notification de contestation. Rappelons qu’une contrefaçon est passible d’une peine allant jusqu’à 300 000 euros d’amende et trois ans de prison. Mais rassurez-vous ! Avant tout procès, il peut y avoir négociation.

Comment éviter toutes ces démarches ?

En imaginant que vous-même ou l’un de vos collègues composiez la musique et les paroles, les arrangiez, créiez le scénario, procédiez à l’enregistrement et à son montage (au risque d’être moins percutant), et en cédiez expressément les droits à votre employeur. Vous pouvez aussi utiliser des chansons proposées sous une licence Creative Commons, lorsque la licence autorise un usage commercial et la création d’une œuvre dérivée, faute de quoi il faudra négocier auprès de l’ayant droit de la musique et des paroles pour réaliser votre lipdub qui représente une œuvre dérivée de l’œuvre première.

Vous avez tous les droits ?

Votre œuvre sera protégée à son tour. A vous d’en définir les usages ! Le lipdub de Justin notaire par exemple, autorise le mix, le karaoke, le téléchargement de photos etc. … – et d’en accorder les droits à des tiers, au coup par coup ou via une licence Creative Commons (ou une autre licence libre de votre choix), si celle-ci est compatible avec les utilisations qui vous ont été accordées.

Quelques règles

  • La vidéo, œuvre audiovisuelle est une œuvre de collaboration pour laquelle le producteur est présumé s’être fait céder tous les droits. Toute présomption contraire reste possible, à charge de le démontrer.
  • Une œuvre sera protégée par le droit d’auteur si elle est originale, soit « empreinte de la personnalité de son auteur ». L’œuvre musicale est une œuvre de collaboration, ce qui signifie qu’elle tombera dans le domaine public 70 ans après la mort du dernier des coauteurs. Les titulaires de droits voisins bénéficient de ces droits pendant 50 ans après la mise à disposition de l’œuvre.
  • Parmi les exceptions au droit patrimonial de l’auteur, on aurait pu s’appuyer sur la citation. Mais citer une œuvre musicale n’est pas admis (il est prudent de l’affirmer, en tout cas). Quant à la citation d’une œuvre audiovisuelle, qui doit être brève (ne pas représenter un extrait) et insérée dans une œuvre seconde, elle n’est pas appropriée ici. Comme il ne s’agit pas vraiment d’une parodie, conçue à des fins humoristiques (quoi que …), et que l’on se trouve dans un cadre institutionnel, cette autre exception au droit patrimonial de l’auteur ne peut pas être envisagée non plus.
  • Au titre du droit moral, l’auteur et l’artiste-interprète peuvent exiger de faire respecter leur droit de paternité et d’intégrité de l’œuvre. Ils disposent aussi d’un droit de divulgation et de retrait. Eux, puis leurs ayants droit, peuvent les exercer de manière perpétuelle. Le producteur qui dispose aussi de droits voisins ne bénéficie pas de droits moraux.
  • Une musique proposée sous licence Creative Commons n’est pas libre de tous droits. Selon le cas, la licence peut interdire de modifier l’œuvre, de l’utiliser à des fins directement ou indirectement commerciale, ou de la diffuser sous un autre contrat que le contrat initial.

Vous voilà prêt à aborder un nouveau cas

La prochaine assemblée générale se tiendra dans un manoir que vous avez loué. Vous payez un prestataire pour enregistrer cet évènement, le diffuser en temps réel, puis le mettre en ligne sur l’extranet de votre entreprise. Votre prestataire vous propose d’ « habiller graphiquement les images » et de créer des contenus pour le rendre plus « spectaculaire ».

Il faut donc à nouveau un contrat ad hoc avec l’agence de communication pour régler la question de la prestation et des droits d’auteur. Il faut aussi l’accord des propriétaires du lieu de tournage en prêtant attention aux œuvres encore protégées par le droit d’auteur qui pourraient s’y trouver : un tableau, une sculpture, etc., surtout si, par malheur, on devait les apercevoir par la suite en gros plan.

Il vous faut aussi l’accord exprès des intervenants qui doivent connaître les lieux de diffusion, en l’occurrence l’extranet de l’entreprise. Un accord tacite pour les autres personnes peut être envisagé, mais celles-ci doivent être informés – sur l’invitation, par exemple – que la manifestation sera filmée et du lieu de diffusion. Si vous songiez à d’autres usages, il est prudent de les mentionner immédiatement.

Votre vidéo est enrichie. Vous vous trouvez face à une œuvre composite pour laquelle il faut négocier les droits permettant l’insertion d’autres œuvres dans l’œuvre initiale – la vidéo – et une mise en ligne sur l’extranet, voire pour d’autres usages.

Et ainsi de suite ….

Article paru dans le n° 4, 2010 de la revue Documentaliste consacrée aux vidéos en ligne

>> photos flickr CC Reinis Traidas ; Daniel F. Pittago ; Terry Chay

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Samples, remix, covers: de quoi a-t-on le droit? http://owni.fr/2010/08/27/25905/ http://owni.fr/2010/08/27/25905/#comments Fri, 27 Aug 2010 15:38:00 +0000 Emmanuelle Bruch http://owni.fr/?p=25905 La soucoupe musicale est honorée d’accueillir à son bord Emmanuelle Bruch, avocate à la Cour, ancienne productrice/éditrice et manager.

La création musicale des années 2000 a souvent tendance a faire des emprunts à des créations pré-existantes. Aussi semble-t-il capital de faire un point sur ces nouveaux modes de création, et de bien avoir en tête les réflexes à adopter pour « créer » et exploiter ses créations en toute légalité, même si elles empruntent à d’autres œuvres.

A titre préliminaire il convient de bien rappeler qui sont les titulaires de droits sur une œuvre musicale (I) puis d’examiner la nature des droits en jeux, et les démarches à effectuer en cas d’utilisation de sample, de création de remix, ou de production ou d’interprétation d’une cover (II)

I) L’œuvre musicale et ses ayants droits

L’œuvre musicale est protégée par le droit d’auteur (article L112-1 du code de la Propriété Intellectuelle) et par les droits voisins (Article L213-1 du même code).

Autrement dit, il existe des titulaires de droits sur :

La composition (ou encore l’œuvre immatérielle) :

Du seul fait de sa création, l’auteur d’une œuvre de l’esprit jouit sur cette œuvre d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous. (Article L111-1 du code de propriété intellectuelle).

Ce droit est composé :

  • Du droit moral de l’auteur, qui comprend : le droit de divulgation, le droit de retrait (article L121-4 CPI), le droit à la paternité (article L121-1 CPI), le droit au respect de l’intégrité de l’œuvre : (articles L121-1 ; L132-11 ; L132-22 CPI)
  • Du droit patrimonial de l’auteur, comprenant, aux termes de l’article L122-1 du CPI : le droit de reproduction (fixation matérielle de l’œuvre permettant de la communiquer au public) et le droit de représentation. Ces droits font en général l’objet d’une gestion collective par la SACEM.

A noter qu’il est fréquent que l’auteur cède une partie de ses droits patrimoniaux à l’éditeur, qui doit le cas échéant, aussi être considéré comme un ayant-droit de l’œuvre. (Un article sera consacré à toutes les questions relatives à l’édition musicale)

L’enregistrement ou encore le « master »

L’enregistrement est protégé par les droits dits « voisins » du droit d’auteur comprenant :

  • Les droits de l’artiste interprète :

L’artiste interprète jouit d’un droit moral au titre de l’article L212-1 du code de la propriété intellectuelle : ce droit «  inaliénable et imprescriptible » attaché à sa personne comprend le droit au respect de son nom, de sa qualité et de son interprétation.

Il jouit aussi, au titre de l’article L212-3 d’un droit patrimonial, soumettant à autorisation écrite de l’artiste interprête la fixation de sa prestation, sa reproduction et sa communication au public.

  • Les droits du producteur de phonogramme :

Aux termes de l’article L213-1 du code de la propriété intellectuelle, le producteur de phonogramme est la personne, physique ou morale, qui a l’initiative et la responsabilité de la première fixation d’une séquence de son.

Les droits du producteur de phonogramme consistent uniquement en des prérogatives patrimoniales.

Il dispose du droit exclusif d’autoriser ou d’interdire la reproduction directe ou indirecte de leurs phonogrammes mais aussi de celui de contrôler toute communication de l’œuvre au public.

Aussi, il faut ici retenir qu’en cas d’utilisation d’une séquence d’enregistrement d’une œuvre musicale pré-existante, il est impératif de solliciter l’autorisation du producteur et de l’artiste interprête s’il y a lieu.

En cas d’utilisation d’un sample reproduisant l’interprétation d’un artiste, il faudra aussi, au titre du respect de son droit moral et des droits de personnalité qui lui sont attachés porter son nom sur les crédits du nouvel enregistrement. De même, la modification ou l’altération de cette interprétation ne peut aucunemenent se faire sans son autorisation.

Aussi, il conviendra de systématiquement s’interroger sur la nature des droits empruntés à l’occasion de l’utilisation d’un sample, de la production / interprétation d’une cover, et de la création d’un remix.

Notons une intéressante décision de la Cour d’appel de Paris qui opère une distinction et une définition de toutes ces « nouvelles techniques » :

« La technique du sample consiste dans l’intégration d’extraits musicaux dans une autre et ne peut du fait de sa fragmentation qui constitue une altération de l’œuvre première, être pratiquée sans l’autorisation de l’auteur, tandisque le mix consiste dans l’enchainement d’œuvres enregistrées dans leur intégralité et le remix suppose une reprise intégrale de l’œuvre pré-existante dans une nouvelle interprétation, enregistrements qui dans la mesure où ils ne modifient ni le texte ni la musique d’origine sont licites. »

(Cour d’appel de Paris 4ème chambre Sect. B 22 octobre 2004 Marc Cerrone c/ Alain Wisniak et autres)

II) Le Sample, le remix, la Cover

Le Sample

Les problématiques liées au Sample soulèvent plusieurs questions :

  • Quelle est la nature de l’œuvre nouvelle intégrant le sample ? A qui appartiennent les droits sur cette nouvelle œuvre ?
  • Que faut il faire lorsqu’un sample est incorporé dans une œuvre ?
  • Quel est le régime et quelles sont les sanctions attachées à l’utilisation non « clearée » d’un sample ?
  • Y a t’il des utilisations d’échantillons d’œuvres pré-existantes qui pourraient se faire sans solliciter l’accord des ayants droits de l’œuvre originale ?

Nature de l’œuvre nouvelle

De façon unanime, l’œuvre nouvelle incorporant le sample doit être considérée comme une œuvre originale.

Cette œuvre originale pourra être soumise au régime de l’œuvre dite « composite » ou à celui de l’œuvre de collaboration. Toutefois l’utilisation d’un sample dans une œuvre nouvelle, du fait de la non contribution active de l’auteur de l’œuvre dont l’échantillon est extrait, semble davantage conférer à l’œuvre nouvelle le statut d’œuvre composite.

Quelle est donc la différence entre l’œuvre composite et l’œuvre de collaboration ?

L’œuvre composite est définie, aux termes de l’article L113-2 alinéa 2 du code de propriété intellectuelle, comme une œuvre nouvelle à laquelle est incorporée une œuvre préexistante sans la collaboration de l’auteur de cette dernière.

L’œuvre de collaboration est l’œuvre à laquelle ont concouru plusieurs personnes.

Que dit la jurisprudence ?

Selon une décision du Tribunal de Grande Instance de Paris (23 Septembre 1992 / RIDA, oct. 1993, p.257) « Il y a œuvre composite dès qu’il y a utilisation d’éléments formels empruntés à une œuvre protégée par le droit d’auteur »

Titularité des droits sur l’œuvre nouvelle :

Rappelons que l’incorporation d’un sample dans une œuvre nouvelle semble plutôt conférer à l’œuvre nouvelle le statut d’œuvre composite.

Aussi, partant de cette considération, il faut se référer à l’article L113-4 du code de propriété intellectuelle pour déterminer la titularité des droits sur l’œuvre nouvelle : « L’œuvre composite est la propriété de l’auteur qui l’a réalisée, sous réserve des droits de l’auteur de l’œuvre pré-existante »

Ainsi, selon les commentaires sous cet article dans le CPI :

« cette disposition exprime clairement l’idée que le créateur de l’apport nouveau original d’une œuvre de seconde main est le seul auteur de cette dernière. Mais pour pouvoir disposer de cette création, il lui sera nécessaire de respecter les droits patrimoniaux (autorisation, rémunération) et moraux (divulgation, respect, paternité) du créateur de l’œuvre première.»

« L’auteur d’une œuvre première a droit à une rémunération proportionnelle sur les recettes de l’exploitation de l’œuvre composite » (Paris, 10 mars 1970)

Il s’agira donc d’obtenir l’accord de l’auteur de l’échantillon incorporé à l’œuvre nouvelle, et de lui attribuer une rémunération proportionnelle sur l’œuvre nouvelle, qui sera en général fonction de l’importance de l’extrait incorporé dans l’œuvre nouvelle.

Régime et sanctions attachées à l’utilisation non « clearée » d’un sample :

Comme exposé dans les développements précédents, la solution indiquée pour fonctionner en toute légalité est bien évidemment que l’auteur de la nouvelle œuvre incluant des extraits d’une œuvre pré-existante sollicite l’accord  des ayants droits de celle-ci. Et c’est la régle de principe à retenir.

Cette autorisation peut être sollicitée auprès de la SACEM qui gère collectivement les droits de représentation et de reproduction attachés au droit d’auteur.

Il existe toutefois des exceptions légales :

  • L’utilisation d’extraits d’œuvres tombées dans le domaine public : il faudra juste ici être vigilant sur la nature des droits empruntés et bien distinguer un emprunt au droit d’auteur ou un emprunt aux droits voisins. En effet, Une œuvre peut être tombée dans le domaine public au terme de la protection accordée par le droit d’auteur, mais si c’est un enregistrement qui est « samplé », il conviendra de s’assurer que l’enregistrement ne fait pas l’objet d’une protection au titre des droits voisins, car il a pu être fixé récemment. Auquel cas, l’autorisation de l’auteur ne serait pas nécessaire, mais l’autorisation du producteur, et de l’artiste interprète le cas échéant, oui.
  • Les autres exceptions légales permettant une utilisation de l’œuvre sans autorisation ne semblent pas s’appliquer à l’utilisation d’un sample dans une œuvre nouvelle, il s’agit : du droit de citation (article L122-5 du CPI) ;  de la parodie, la caricature, le pastiche ; et de l’exception d’usage privé (articles L122-5 & L211-3 du CPI)

Quelles sont les sanctions attachées à l’utilisation sans autorisation d’un sample ?

On distinguera encore ici les sanctions attachées à l’utilisation non autorisée d’un extrait de l’œuvre en elle-même (contrefaçon de droits d’auteur) des sanctions attachées à l’utilisation sans autorisation d’un extrait de l’enregistrement (protégé par les « droits voisins »).

  • L’utilisation non autorisée d’un extrait de l’œuvre musicale :

Une telle utilisation est en principe sanctionnée par le délit de contrefaçon. En effet, aux termes de l’article L122-4 du Code de la Propriété Intellectuelle, « toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite. »

Et en application de l’article L335-3 du CPI, « est un délit de contrefaçon toute reproduction, représentation ou diffusion, par quelque moyen que ce soit, d’une œuvre de l’esprit en violation des droits de l’auteur, tels qu’ils sont définis et réglementés par la loi »

Le délit de contrefaçon est sanctionné par trois ans d’emprisonnement et 300.000 Euros d’amende (article L335-2-1 CPI).

Toutefois la contrefaçon n’est pas toujours prononcée en matière d’utilisation d’échantillon musical. En effet, le droit d’auteur ne protège que « l’organisation intellectuelle des sons ». Les éléments caractéristiques de l’œuvre musicale étant la mélodie, l’harmonie et le rythme.

Aussi, « la recherche se fera par l’examen des ressemblances dans l’analyse verticale, c’est à dire harmonique, et l’analyse horizontale, c’est à dire mélodique et rythmique, en sorte que l’analogie des mélodies et des similitudes dans la conduite harmonique et la forme, notamment lorsqu’elles portent sur l’intégralité du refrain et sur le pont caractéristique, constituent des actes de contrefaçon » (Paris, 19 novembre 1985).

De même, « il n’y a pas contrefaçon à reprendre une cellule mélodique utilisée dans deux mesures lorsque cette cellule est dénuée d’originalité car appartenant à un fonds commun que l’on retrouve dans différentes formes de musique et à différentes époques » (Paris, 30 novembre 1979)

Le critère mis en avant désormais par la jurisprudence pour déterminer le caractère contrefaisant ou non de l’utilisation non autorisée d’un sample est le caractère reconnaissable de l’emprunt par un auditeur moyen. (TGI de Paris 2 décembre 1993 Les inconnus contre Macéo Parker ; 3ème chambre de la CA de Toulouse 16 mars 2000 ;TGI Paris 5 juillet 2000).

  • L’utilisation non autorisée d’un sample d’enregistrement

L’utilisation d’un sample d’enregistrement jouit d’une protection plus forte car l’atteinte aux droits est constituée, dès l’utilisation d’une seule note.

Il faut en effet bien comprendre qu’une portion de musique enregistrée, significative ou pas, appartient à son producteur et ne peut être utilisée sans son accord.

Une telle utilisation est également sanctionnée par le délit de contrefaçon en application de l’article L335-4 du CPI. Ce délit est puni par trois ans d’emprisonnement et 300.000 Euros d’amende.

Cette utilisation peut également être sanctionné d’autres façons, par des actions fondées sur le droit commun de la responsabilité délictuelle (article 1382 et 1383 du code civil ) pour atteinte aux droits de la personnalité de l’artiste interprète par exemple.

Pour conclure, en cas d’utilisation de sample dans une œuvre nouvelle, il est important de bien distinguer selon qu’est empruntée uniquement la composition, et que l’accord samplé est réenregistré, auquel cas il suffira de solliciter l’accord de la SACEM, et d’attribuer aux ayants droit de l’extrait leur rémunération proportionnelle et de respecter leur droit moral. Si c’est aussi une portion de l’enregistrement qui est incorporée dans le nouvel enregistrement, il faudra impérativement solliciter l’accord du producteur et de l’artiste interprète le cas échéant, et respecter son droit moral.

Le Remix

« Le remix suppose une reprise intégrale de l’œuvre pré-existante dans une nouvelle interprétation, enregistrements qui dans la mesure où ils ne modifient ni le texte ni la musique d’origine sont licites. » (Cour d’appel de Paris 4ème chambre Sect. B 22 octobre 2004 Marc Cerrone c/ Alain Wisniak et autres)

Il faut déduire de cette décision que l’utilisation de l’œuvre pré-existante ne porte pas atteinte au droit d’auteur. Toutefois il conviendra de s’acquitter des droits d’auteur à la SACEM.

En général le « remixeur » peut demander des droits d’arrangement (généralement à hauteur de 5 % ) sur la version remixée.

Concernant les droits voisins, le remix est une version modifiée d’un phonogramme. Il peut réunir des séquences pré-existantes modifiées et des nouvelles séquences fixées spécialement.

Au regard des droits voisins, cette réutilisation est soumise à l’autorisation préalable du producteur (article L213-1 CPI) et des artistes interprêtes.

En effet, selon l’article L212-3 du code de la propriété intellectuelle :

« sont soumises à autorisation écrite de l’artiste-interprète la fixation de sa prestation, sa reproduction, et sa communication au public, ainsi que toute utilisation séparée du son et de l’image de la prestation lorsque celle-ci a été fixée à la fois pour le son et l’image »

De même, le respect du droit moral de l’artiste interprète est nécessaire : donc le respect de son nom, dont on déduit la nécessité de créditer le nom sur les crédits de la version remixée, et le respect de son interprétation. Car aux termes de l’article L212-2 du CPI, « le respect dû à l’interprétation de l’artiste en interdit toute altération ou dénaturation » (Soc. 8 février 2006).

Le Tribunal de Grande Instance de Paris a pu ainsi juger que :

« la superposition d’un bruitage à l’interprétation d’un chef d’orchestre peut, dans certaines circonstances, porter atteinte au droit au respect de cette interprétation ». (TGI Paris 10 janvier 1990)

Statut du remix

Selon Jean Vincent, le remix aurait un statut hybride et il évoque ici aussi un statut d’œuvre composite. Cependant il envisage ici ce statut au regard des droits voisins, et envisage ici un statut de co-propriété de deux producteurs : celui du son emprunté et celui des nouvelles séquences de son.

Si cela paraît tout à fait juste si l’on se base sur le droit voisin. Une autre analyse, au regard du droit d’auteur, et si l’on s’en tient à la position de la Cour d’appel, attribuerait d’avantage le statut d’ adaptation, ou d’œuvre dérivée au remix (article L 112-3

La Cover

La « Cover » ou encore la « reprise » (en français) correspond à la production d’un nouvel enregistrement d’une version exactement similaire à une version existante interprétée par un nouvel artiste interprète.

Cette pratique est complètement licite, au regard du droit d’auteur,  dès lors que les redevances sont acquittées auprès de la société de gestion collective des droits d’auteur (La SACEM).

De même, cette technique ne porte pas atteinte aux droits voisins, car il s’agit d’un nouvel enregistrement.

Toutefois, si la reprise de l’enregistrement original fait l’objet d’une sortie commerciale au même moment que la sortie du titre original, cette pratique peut être qualifiée de pratique déloyale et parasitaire, l’éditeur de la cover ayant eu pour seul objectif de profiter des investissements publicitaires réalisés par le producteur de la version réinterprétée. ( Cour d’appel de Paris 13 nov. 2002 Sony music entertainment c/ Wegeber International BV)

Il est important et fondamental, dans cette ère de la création musicale, marquée par une évolution des techniques, où l’on emprunte beaucoup au passé, et notamment avec l’avènement du hip hop et de l’électro, de veiller au respect du droit d’auteur et des droits voisins. En espérant que ce court développement offre une synthèse suffisante des droits en jeu et des démarches à opérer, chers Créateurs, comme on dit, « y a plus qu’à »…

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Crédits Photo CC Flick : Thomas Hawke,Mixtribe et Auroramixer.

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