OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 Photographes critiques en campagne http://owni.fr/2012/05/10/bilan-de-la-com-de-cette-presidentielle/ http://owni.fr/2012/05/10/bilan-de-la-com-de-cette-presidentielle/#comments Thu, 10 May 2012 09:06:17 +0000 Ophelia Noor http://owni.fr/?p=107677

France, Paris. 8 mai 1988. Célébration de l'armistice sous l'Arc de Triomphe et jour du deuxième tour de l'élection présidentielle. François Mitterrand, Président de la République et Jacques Chirac, Premier Ministre. ©Jean-Claude Coutausse

Le photojournalisme politique de nos jours suppose de sérieuses capacités à démonter en temps réel les constructions des services de com’ des candidats. Jean-Claude Coutausse et Cyril Bitton font de la photo politique depuis plus de dix ans. Membres de Fedephoto ils ont créé à l’approche de la présidentielle, un collectif informel baptisé French Politics avec Olivier Coret, Marc Chaumeil, Laurent Hazgui et Caroline Poiron. Chacun d’entre eux a suivi durant plusieurs mois un (ou des) candidat(s) en campagne pour plusieurs quotidiens ou magazines. Ainsi, Jean-Claude Coutausse suit les présidentielles depuis 1988 et François Hollande depuis l’université d’été en exclusivité pour le quotidien Le Monde. Cyril Bitton suit le FN depuis dix ans et Marine Le Pen depuis son investiture à la tête du parti en janvier 2011. Entretien.

Qu’est-ce qui a changé dans votre manière de travailler depuis les précédentes présidentielles en 1988 pour Jean-Claude et 2002 pour Cyril ?

Jean-Claude Coutausse : C’est toujours le même principe. Nous sommes devant une scène avec des hommes politiques qui se mettent en scène. Ce qui a vraiment changé, c’est plutôt la manière dont ils se mettent en scène. Avant, ils étaient moins conscients de leur image. Particulièrement l’ancienne génération, les Chirac, Balladur, Barre, Mitterrand. Ils étaient un peu plus patauds. Le principe en photo politique c’est d’abord de se faire un point de vue. Ensuite d’aller le chercher avec des images et des situations.

France, Paris. Campagne présidentielle, Jacques Chirac en meeting. Le 4 mars 1988. ©Jean-Claude Coutausse

Nous devons toujours être omniprésents pour profiter des failles, de ces moments où les hommes politiques s’oublient un peu. De ce point de vue, nous avions plus d’occasions avec l’ancienne génération. La nouvelle, disons depuis 2007 avec la campagne de Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy, fait beaucoup plus attention à son image.

Les équipes de communicants sont omniprésentes aujourd’hui autour de la plupart des candidats, comment travaillez-vous ?

Jean-Claude Coutausse : Nous avons surtout vu les équipes de communicants arriver en 2002. Chez Jacques Chirac, c’était plus familial. C’est un cercle d’intimes qui le conseillait, dont son attachée de presse de toujours Lydie Gerbaud. Autour de Jospin en 2002, on a vu arriver des publicitaires. Et ça a été une catastrophe. Ils ont contribué à sa défaite. Ils étaient insupportables et se sont mis la presse à dos. De notre côté, nous avons toujours travaillé de la manière suivante : raconter ce que l’on voit et ce que l’on ressent. Eux voulaient vendre un produit. Et ça n’a pas marché. On ne sait jamais vraiment, si ce sont toujours les mêmes aujourd’hui, mais si ces personnes ont eu une réelle influence sur l’actuelle campagne de François Hollande, ils l’auront fait cette fois de manière plus subtile avec l’expérience acquise.

France, Toulouse. Campagne présidentielle 1995. Lionel Jospin en campagne. 16 mars 1995. © Jean-Claude Coutausse

Cyril Bitton : J’ai suivi plusieurs candidats pendant cette campagne, Eva Joly, Jean-Luc Mélenchon, François Hollande pendant la primaire socialiste, mais surtout Marine Le Pen, depuis plus d’un an, moment de son investiture à la tête du parti. Pour le Front National, l’évolution se fait surtout avec le changement de personnalités, très différentes, à la tête du parti, entre 2002 et maintenant. Alors que la personne qui s’occupe de la communication est la même, Alain Vizier. C’est vraiment la vieille école. Ils s’en moquent de voir les photos avant publication, du moment que quelque chose sort, ils sont contents. On peut faire à peu près ce qu’on veut. On peut faire des demandes spécifiques.

Paris le 8 janvier 2012. Marine Le Pen lors de sa galette des rois annuelle. © Cyril Bitton/French-politics.com

En 2002 à l’époque de son père, le champ d’action était plus large, on a parfois l’impression qu’ils n’ont pas de communicants. L’accès au bureau de Jean-Marie Le Pen était assez simple et je pouvais même faire des photos sur scène. Aujourd’hui, c’est plus compliqué. En meeting on ne peut plus monter sur scène et dix ans après je sais que je ne pourrai pas faire des photos dans le bureau avant les résultats.

Jean-Claude Coutausse : J’ai beaucoup couvert le FN à partir de 1986 pour Libération. Le débat de l’époque dans les rédactions était est-ce qu’on couvre le FN ou pas ? Même sans clore le débat nous le faisions. Ils sont là, ils se présentent aux élections. Des incidents avec les journalistes au FN j’en connais très peu. On nous a toujours laissé faire. C’était plutôt eux qui éloignaient ce qu’ils ne voulaient pas qu’on montre. Qu’on dise du bien ou du mal, ils voulaient qu’on parle d’eux.

Cyril Bitton : Avec Bayrou c’était marrant, ils ne voulaient pas qu’on utilise le grand angle. Quelqu’un avait du lui expliquer un jour que le grand angle déformait.

Jean-Claude Coutausse : Bayrou s’approche et te dit “vous êtes au 28 mm ?” Il connaissait même les focales. Il s’approchait, tu déclenchais. Il est vraiment de l’ancienne école.  Au PS cette année, ils nous ont empêché de faire certaines photos, on ne pouvait pas prendre Hollande de dos par exemple. Ils faisaient ça de manière beaucoup plus subtile bien sûr, “tiens, place toi là, tu seras plus à l’aise devant”. Et depuis quelques semaines ça s’est libéré.

François Hollande, candidat du parti socialiste à la présidentielle 2012 participe à la cérémonie des voeux de la municipalité de Laguenne, Corrèze, France, vendredi 6 janvier 2012 - ©Jean-Claude Coutausse / french-politics.com

Comment se traduit cette “mise en scène”, cette mécanique bien huilée de la représentation politique ? Et comment arrivez-vous à montrer “autre chose” que ce que l’on vous présente.

Jean-Claude Coutausse : Montrer les rouages d’une campagne ou l’envers d’un décor, c’était très à la mode depuis dix ans à la télévision. Le public sait comment ça fonctionne. A Vincennes nous étions une poignée de photographes autorisés par les équipes de Hollande à monter sur scène, de Libération, Le Parisien, Le Monde et une ou deux grandes agences. C’est une compétition entre deux candidats, et on me donne donc l’occasion de le montrer face à la foule. Est-ce qu’on fait leur jeu à ce moment là ? Ce qui m’a intéressé malgré tout à Vincennes (Ndlr : au meeting de François Hollande avant le premier tour) c’était de montrer le candidat Hollande avec la foule.  La question était : Y aurait-il une grosse foule : celle qu’ils attendaient, ou pas ? Je montre ce que je vois. On peut toujours décadrer mais ça dépend des meetings. D’ailleurs, les candidats ont tous adopté ce même fond bleu et parfois on ne sait plus où on est : à Besançon ? à Lille ? Dans un gymnase, une mairie ?  Donc nous devons élargir le cadre pour avoir l’information de contexte.

Quelle liberté de circulation avez-vous dans les meetings ?

Jean-Claude Coutausse : Personnellement, je me dis il faut aller voir tous les candidats pour avoir un bon point de vue. Le Monde me demande de n’en suivre qu’un (Ndlr: François Hollande). Mais je m’échappe, malgré tout. C’est fatiguant de suivre le même candidat et ça créé des relations. Même si cela peut faciliter énormément les choses. A Lille, il y avait un pool avec trois photographes qui le suivent depuis le début : Sébastien Calvet (Libération), Denis Allard (REA), et moi-même. Les équipes de communication nous ont laissé passer devant. Alors est-ce qu’on nous manipule, est-ce qu’on nous facilite tout simplement la tâche ou est-ce pour nous remercier un peu du résultat de notre travail ?

France, Lyon. Campagne presidentielle premier tour. Meeting de Francois Mitterrand. 15 avril 1988

Vous n’avez jamais de réponse claire là-dessus ?

Jean-Claude Coutausse : Il n’y a peut-être pas de réponse. La situation est ambiguë, eux font de la politique et nous sommes journalistes. Mais il n’y a pas de relations incestueuses. Ce sont des gènes différents mais malgré tout, cela fait un an que nous sommes sur les routes ensemble et dans les mêmes hôtels. Ce qu’il y a de plus compliqué en photo politique c’est toujours de garder de la distance.

Ce qui est important c’est également le média pour lequel un photographe travaille, les demandes des quotidiens ou des agences diffèrent…

Cyril Bitton : L’intérêt de travailler pour un journal c’est la liberté et d’avoir des images qui sont publiées. Ils te laissent tranquille et ça t’apporte une légitimité. Entre 2001 et 2007, quand je suivais le FN en commande régulière pour VSD, c’était simple. Alors qu’au tout début de cette présidentielle, je n’avais pas de journal ou de magazine derrière moi, et même Alain Vizier (Ndlr : responsable communication du FN) que je connaissais depuis des années, me répondait que “c’était compliqué” pour certaines de mes demandes. Mais quand on commence à venir très régulièrement, ils s’habituent.

Jean-Claude Coutausse :

Un visage familier te rassure. Mais c’est sclérosant de suivre un même candidat. Tu accumules une grosse fatigue sur une campagne. Tu peux tomber en amour ou en haine excessive pour un candidat. Il faut respirer. C’est très instructif de voir comment ça se passe chez les autres candidats, chez Mélenchon, chez Sarkozy…

Lille, le 23 fevrier 2012. Nicolas Sarkozy en déplacement dans le Nord de la France avec une visite du Centre de Formation CFA le Virolois de Tourcoing et un grand Meeting au Grand Palais de Lille. © Cyril Bitton / french-politics.com

Cyril Bitton : Avec le temps certaines choses se mettent en place et avec l’expérience aussi. Meeting après meeting on trouve nos marques, on connait le tempo de la campagne du candidat. Mais c’est bon de quitter ses zones de confort : au milieu de cette campagne présidentielle, j’ai couvert un meeting de Sarkozy, le contrôle était si compliqué que j’étais obligé d’être super concentré  tout le temps. Je ne connaissais pas les rouages de sa campagne. Côté agences, certaines ont des demandes spécifiques. Les photographes doivent parfois demander aux politiques de poser.

Jean-Claude Coutausse : Le média est très important. Dans une agence photo, l’aspect commercial est assez fort. Les photographes ont besoin de vendre des photos, et au lieu d’être tournés vers la scène sur Hollande par exemple, les agences voudront des photos de Valérie Trierweiler. Elles se vendront de manière plus sûre. On peut leur demander de faire plus de concessions qu’à un photographe de journal.

Quelles concessions vous ne feriez pas ?

Jean-Claude Coutausse : Je ne travaillerai pas avec une agence photo sur les sujet politiques pour fournir la photo du candidat qui fait la gueule. Ces photos, tu les fais de toute façon et tu vas les publier, sauf que tu as la continuité de ton histoire sur plusieurs mois de travail et qu’elles s’insèrent dans une narration. La plupart des agences chercheront le quatre pages pour VSD ou Paris Match qui ramènera de l’argent. Ils vont plus jouer dans le people et on sort du journalisme. A cause de la pression commerciale.

France, Paris. Francois Hollande, candidat à la primaire de socialiste, en meeting au Bataclan. Jeudi 13 octobre 2011 ©Jean-Claude Coutausse / french-politics.com

Cyril Bitton : Cela dépend des agences. A french-politics, on raconte la vie d’un candidat sur plusieurs mois, celle qu’il choisit en tout cas de nous montrer, et on va essayer de faire des choses différentes dans ce cadre.

Là où c’est bien de suivre une campagne sur la longueur c’est le fait qu’il n’y ait pas que des photos fortes. Comme dans une fiction, avec des moments de creux tout aussi intéressants, comme une respiration, et avec des moments plus intimes.

C’est différent de travailler juste pour un quatre pages de magazine. Là, nous avons le début de la campagne, la fin avec plus d’ intensité, les déplacements…

France, Paris. Le 8 mai 1988. Le soir de la deuxième élection présidentielle de François Mitterrand, ses supporters manifestent leur joie place de la République. ©Jean-Claude Coutausse

Jean-Claude Coutausse : Ça devient une histoire intéressante sur le plan journalistique, et du point de vue historique au bout de quelques années. Mais dans le présent, ça ne rapporte pas d’argent.

La photographie politique est très particulière. Elle a énormément de valeur ce matin, le lendemain beaucoup moins, dans six mois aucune et dans dix ans elle a une valeur inestimable.

L’arrivée d’Internet, sa viralité et la multiplication des plateformes comme Twitter dans le paysage médiatique ont-elles joué un rôle dans la prise de conscience des politiques de leur image ?

Jean-Claude Coutausse : Je suis plutôt étonné du peu d’influence de la presse Internet sur la campagne. De mon point de vue, ce sont souvent des gens qui ont dépassé la cinquantaine qui s’intéressent le plus à la politique. Les meetings sont entrés dans les salons grâce à la télévision. Je pense qu’il faut attendre encore un peu, avec les nouvelles générations pour qu’Internet ait un poids vraiment significatif. Après, mon blog sur lemonde.fr (ndlr : Bains de foule) a été une bénédiction. Je met ce qui me plait. On attend aussi que de vrais services photos se développent sur la presse en ligne.

Cyril Bitton : J’ai plutôt l’impression qu’ils s’inquiéteront vraiment d’Internet à la prochaine présidentielle en 2017. Dans celle-ci, ce sont les télévisions en continu qui ont mené la danse. Elles sont toujours très proches. Pour ce qui concerne Marine Le Pen, des déplacements ont même été annulés ou déplacés pour avoir la présence des télévisions en continu. C’est très important, malgré un réseau comme Twitter. La différence sur le terrain, entre 2002 et aujourd’hui, c’est le nombre de caméras et de perches.

France, La Rochelle. Université d'été du Parti Socialiste. Mairie de La Rochelle, réunion des présidents de régions PS. Ségolene Royal parle à la presse. Jeudi 14 aout 2006. ©Jean-Claude Coutausse

Depuis le “casse toi pauv’ con” les télévisions laissent trainer leurs micros, ils se tiennent à 10 cm du candidat. Nous ne pouvons plus travailler tanquillement, nous n’arrivons pas à avoir un décor pour contextualiser, eux non plus. Ils interrogent les candidats sur n’importe quoi en espérant avoir une petit phrase clef. Et c’est difficile pour nous, photographes, avec cet agglutinement, d’avoir une bonne photo. Il faut rester longtemps sur place quand le cercle se relâche, récupérer de l’espace et prendre des photos.

Ton portfolio “Au nom du père” consacré à la campagne de Marine Le Pen, a provoqué des réactions de rejet et de gêne. Tu parlais aussi de délit de faciès…

Cyril Bitton : Ce que je trouve intéressant, c’est l’idée de prêter attention à la forme pour faire ressortir le fond. Pour ce qui est de Le Pen, je travaille le plus honnêtement possible, je n’invente aucune situation, je montre ce que je vois. Je suis Marine Le Pen depuis qu’elle a pris la tête du parti et le FN depuis dix ans.

Le Congrès du Front National à Tours qui voit Marine Le Pen devenir Présidente du FN. Janvier 2011 © Cyril Bitton/French-politics.com

Je montre simplement ce qu’elle fait : elle essaie de montrer que le parti est différent. Ou comment elle est : dans certains de ses déplacements, les moments où elle est à l’aise, et d’autres non, car elle ne se retrouve pas devant son public habituel. J’aurais passé moins de temps à faire une sélection si j’avais juste pris des photos ou elle apparaissait méchante.

Pire, en faisant ça, j’aurais eu le même raisonnement qu’eux, c’est à dire fonctionner au délit de faciès. Ce que je montre est la réalité pas une caricature.

Et c’est plus intéressant de susciter des réactions avec ce travail surtout si cela permet de poser la question des idées.  Si on ressent une gêne à leur vue, on a une chance, c’est d’aller voter contre ces idées.

Grande fête champêtre du Front National à Vaiges en Mayenne le 17 septembre 2011 pour marquer l'entrée en campagne de Marine Le Pen pour l'élection présidentielle de 2012 - Marine Le Pen signant des autographes aux enfants présents sous la pluie.© Cyril Bitton/frenchpolitics.com

Est-ce que ces réactions de gêne ne sont pas dues au fait que son père paraissait finalement très caricatural, quelque soit l’angle sous lequel on le prenait en photo ?

Cyril Bitton : Clairement, Marine Le Pen joue beaucoup de sa féminité par rapport à son père. Mais les journaux ont une responsabilité là-dedans. Entre 2001 et 2002, très souvent les magazines ne demandaient que des photos où Jean-Marie Le Pen faisait des grimaces et paraissait dur. Au début de cette campagne 2012, je voyais beaucoup de téléchargements de photos de Marine Le Pen sur notre site french-politics, où elle était “normale”.

Paris le 2 février 2012. Marine Le Pen presente son comité de soutien qui est dirigé par Gilbert Collard. © Cyril Bitton/French-politics

Elle est même passée dans le magazine ELLE . C’est du jamais vu. La responsabilité des journaux est là, entre demander des photos de son père où il est agressif et rester dans la caricature, et pour sa fille ne prendre que des images ou elle est souriante. C’est aussi un choix éditorial.

Jean-Claude Coutausse : C’est un débat intéressant. Depuis 1986 une bonne partie de la société se complait dans cette caricature, “ce sont des nazis, ils ont de gros souliers”. Comme cette dame qui avait dit : “des crapeaux sortent de sa bouche [Marine Le Pen]” après la projection du portfolio de Cyril . Hors la réalité n’est pas là. Nous avons toujours cette référence à la deuxième guerre mondiale et au nazisme alors que le FN est issu de notre propre société. C’est plus difficile à admettre. Il arrive un moment où les photographes et journalistes qui les approchent veulent raconter cette réalité, ce que montre bien Cyril. La caricature est confortable presque rassurante, mais totalement inefficace.

Cyril Bitton : Et ça ne nous remet pas en cause. On est encore sur le physique. Alors que ce sont les idées qu’il faut combattre.


Photographies par ©Jean-Claude Coutausse et © Cyril Bitton / French Politics. Tous droits réservés.

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Twitter change le marketing politique http://owni.fr/2012/03/29/twitter-change-le-marketing-politique/ http://owni.fr/2012/03/29/twitter-change-le-marketing-politique/#comments Thu, 29 Mar 2012 09:10:47 +0000 Rodolphe Baron http://owni.fr/?p=103740

Avec la Twittosphère, le cycle classique de l’information est rompu. C’est l’un des enseignements de cette campagne, pour les communicants au services des partis politiques. Des discussions privées se déroulent au sein desquelles citoyens, journalistes et élus sont sur le même plan, mais surtout sans que l’on distingue toujours le responsable politique dans sa vie publique ou dans sa vie privée.

Pour Olivier Le Deuff (@neuromancien), maître de conférences en Sciences de l’information et de la communication à Bordeaux 3, et twittos de la première heure, la distinction doit se faire naturellement sans altérer la réciprocité de l’échange :

Twitter implique une projection totale de l’utilisateur et non pas partielle. Notre identité personnelle et professionnelle y sont mixées. C’est cet élément qui crée le lien social et politique. De la sympathie qui en découle naît le sentiment de proximité. Le mauvais exemple, c’est Nadine Morano qui ne fait aucune distinction entre sa propre personne et sa projection institutionnelle. Il en résulte une incapacité a communiquer. Du coup, elle est dans l’erreur et ne devrait pas aller sur Twitter.

Le lien qui relie la personnalité politique à ses followers (ses abonnés) suppose la gestion du compte par la personnalité politique elle-même. Une réalité d’utilisation qui n’est pas une évidence pour tout le monde. Les deux principaux candidats en lice pour l’Elysée ne respectent d’ailleurs pas la règle en faisant administrer leurs comptes par leurs équipes de campagne. Sans doute, les enjeux sont-ils trop importants pour risquer la moindre gaffe par manque de maîtrise ou de pratique. Mais, une fois l’élection passée, le nouveau chef de l’Etat pourrait-il se permettre de tweeter ? Sur ce point, Olivier Le Deuff, émet des réserves :

L’image de l’institution présidentielle bloque. En France, avec une autorité présidentielle quasi monarchique, il n’y a pas de réciprocité mais une suprématie. On peut écouter ses déclarations mais pas discuter avec elle d’égal à égal.

Pour l’heure, en campagne électorale, cette twittosphère semble se développer comme un complément aux autres vecteurs de communication. La blogosphère politique n’est pas moins forte depuis le succès de Twitter, au contraire. C’est le constat de Louis-Serge Real Del Sarte (@LouisSerge), auteur du livre «Les réseaux sociaux sur Internet» et fondateur de l’agence de conseil en e-réputation ReaClic :

La politique, c’est de l’information, qu’elle soit de l’intox ou de la désintox, cela reste de l’information et elle n’a pas tué le blog. Il ne mourra jamais pour une évidence, le blog reste un endroit où l’on a ses propres règles contrairement aux réseaux sociaux où l’utilisateur est soumis à des règlementations communes. Twitter permet de faire voyager l’information alors que le blog est un espace numérique en ligne destiné à quelqu’un qui va vouloir séduire. Twitter est un outil précieux qui génère du buzz et de la viralité.

Twitter ne peut donc pas être l’unique vecteur de l’information puisqu’il suppose la présence d’autres appareils de communication pour le compléter. Une conception du réseau social qui nécessite une certaine pratique numérique de la part des utilisateurs. D’ailleurs, la «communauté des twittos» est plutôt jeune rapporte Louis-Serge Real Del Sarte :

Twitter rassemble 70% d’utilisateurs âgés de moins de 45 ans et touche une majorité élective plutôt masculine ainsi qu’une population plus urbaine puisque 30% sont localisés en Île-de-France. Le problème qui se pose alors c’est qu’avec Twitter, vous ne touchez pas le reste de la population.

Une suractivité des spécimens parisiens de la “génération Y” sur le réseau social ne constitue pas une faiblesse mais une opportunité électorale supplémentaire pour Olivier Le Deuff :

Le public est différent sur Twitter. On y trouve surtout des journalistes et des universitaires. C’est important pour un homme politique d’y aller car c’est un moyen de convaincre des gens qui savent s’exprimer et qui peuvent, à un moment donné, traduire une pensée plus large.

Tempête dans un verre d’eau diront les détracteurs de Twitter. Pourtant, la communauté des “Twittos” n’a fait que s’agrandir ces derniers mois (1 million de français inscrits sur Twitter au quatrième trimestre 2011 pour 5,2 millions de profils ). Conséquence de l’effet de mode ou envie d’accéder à une nouvelle manière d’interagir avec ceux qui nous représentent. Et Louis-Serge Real Del Sarte d’assurer que la tendance ne peut que se confirmer :

La France vit une révolution culturelle. Le taux d’équipement de la population est important puisqu’il y a 18 millions de «mobinautes» Android et iPhone. On compte déjà plusieurs millions de comptes en France alors Twitter ne peut que se développer. Quand il arrivera à maturité, 100% des personnes l’utiliseront.

Mimétisme

Malgré l’attractivité qu’il dégage de part sa visibilité sur la toile, Twitter reste un outil en voie de généralisation qui constitue l’exception plutôt que la règle. Arnaud Mercier (@ArnauddMercier), professeur en science de l’information et de la communication à l’Université Paul Verlaine de Metz, et auteur de “Médias et Opinions Publique” reste sceptique. Pour lui, Twitter est loin d’être indispensable :

Une partie des politiques inscrits sur Twitter le sont par mimétisme. Il faut en être parce que ça fait moderne mais certains ne savent pas eux-même pourquoi ils y vont. Je ne crois pas que cela soit devenu essentiel d’être sur Twitter. C’est une caisse de résonance supplémentaire.

Un avis partagé par Edouard Gassin, directeur de l’agence de communication politique Mille Watts fondée en octobre 2006 :

Est-ce qu’il faut vraiment être sur Twitter quand on est un homme politique ? Nous, la réflexion que l’on a, c’est de savoir si c’est pertinent de déployer [le politique NDLR] sur Twitter. C’est un outil très chronophage qui nécessite un investissement important. Si l’on parle des campagnes présidentielles de Hollande et Sarkozy, des dizaines de personnes travaillent dessus. Mais c’est une évidence, les résultats sont bien meilleurs en terme d’audience quand ce sont les vrais élus qui s’investissent personnellement.

Pour, arriver à générer ce fameux lien de proximité avec ses followers, les politiques sont amenés à conjuguer leur rôle d’élu avec celui de n’importe quel utilisateur de Twitter. Cela suppose d’autres tweets que ceux ayant tendance à cantonner le propriétaire du compte dans une forme de communication unidirectionnelle. Pour Edouard Gassin, il s’agit d’éviter la banalisation de l’élu dans son caractère uniquement politique, déjà véhiculé par d’autres médias :

On est dans un espace de discussion et d’échanges. Si on l’utilise comme un tuyaux à informations, ça ne sert à rien. On ne se sert qu’à moitié de l’outil.

Du coup, une utilisation adaptée de Twitter à une campagne électorale nécessite parfois un apprentissage de la part de la classe politique dont beaucoup de membres frôlent souvent la cinquantaine et n’ont pas toujours l’expérience du net suffisante pour appréhender l’utilisation des réseaux sociaux :

Les élus quadragénaires voire quinquagénaires ont parfois une conception ancienne de l’outil. Mais il est plus simple d’agréger de vraies personnes [à Twitter NDLR] que de créer de faux comptes de followers. En plus, c’est moins difficile d’animer un compte Twitter qu’un blog qui demande une certaine expertise.

Twitter ne peut former qu’une partie du dispositif de communication qui est censé s’articuler autour d’un raisonnement de fond. Jamais, en 140 caractères, il ne sera possible de développer une pensée politique comme cela peut se faire sur un blog, un site Internet ou lors d’une interview. D’après Arnaud Mercier, la twittosphère est encore trop restreinte pour constituer un enjeu majeur :

Je ne crois pas que l’on puisse dire qu’il y ait, en France, de stratégie marketing électorale sur Twitter. Investir massivement une stratégie sur ce réseau social est un non-sens.

Cependant, Arnaud Mercier reconnaît que la forme d’interaction correspond avec les besoins de la communication politique 2.0, avec de sérieuses limites :

Les 140 signes sont en parfaite osmose avec l’habitude qui consiste à faire de Twitter un support de rédaction de petits piques à décocher en espérant que cela sera repris. Une partie de ce qui fait le buzz sur Internet a encore besoin d’un adoubement par les médias traditionnels pour avoir une influence.

Une petite révolution qu’il convient également de souligner est la communication par live tweet. Elle consiste à commenter en temps réel les émissions politiques se déroulant en direct, sur les médias traditionnels, à la télévision ou à la radio. Une évolution qui fait sens,  d’après Arnaud Mercier :

Le commentaire en live tweet des émissions politiques deviendra probablement un phénomène social. Il permet de nourrir un regard critique sur les stratégies de communication politique à grands coups de hashtag. Vous avez, en direct-live, de la contre communication politique.

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http://owni.fr/2012/03/29/twitter-change-le-marketing-politique/feed/ 9
#PublicidadOficial révèle la corruption du gouvernement Calderon http://owni.fr/2011/04/11/publicidadoficial-revele-la-corruption-du-gouvernement-calderon/ http://owni.fr/2011/04/11/publicidadoficial-revele-la-corruption-du-gouvernement-calderon/#comments Mon, 11 Apr 2011 08:03:24 +0000 David Sasaki http://owni.fr/?p=55923 Article publié initialement sur Owni.eu, sous le titre “#PublicidadOficial campaign exposes corruption in Calderon’s government”

[Liens en anglais, seuls les liens en espagnol ont été signalés] En avril 1982, le président de l’époque, José López Portillo ordonnait à toutes les agences gouvernementales du Mexique d’annuler leurs contrats de publicité avec Proceso Magazine. Il était de notoriété publique que López Portillo dirigeait l’un des gouvernement les plus corrompus du monde à ce moment là, mais cela le fatiguait de voir que les journalistes de Proceso le rappelaient constamment. Sans le soutien financier du gouvernement avec la publicité, Proceso a été forcé d’annuler le récent service de syndication, qui fournissait du contenu à plus de 50 journaux à travers le pays.

Le mois suivant, López Portillo répondait à un éditorial qui critiquait sa décision d’interdire la publicité gouvernementale dans Proceso et d’autre médias de l’opposition. Sa réponse est légendaire :

Je ne les paie pas pour qu’ils me frappent.

Trente ans plus tard, Proceso est pénalisé par le gouvernement, une fois encore, pour sa ligne éditoriale critique envers le gouvernement. En septembre 2007, le magazine proclamait que le Président Calderon utilisait la publicité gouvernementale comme un mécanisme de soutien aux médias qui le soutiennent, et comme moyen de punir ceux qui étaient contre lui.
En 2008, Proceso a publié un peu plus de cinq pages de publicité officielle [es], Emeequis [es] 75,5 pages et Milenio Semanal [es] 11,83 pages

La réponse légendaire de López Portillo rend transparent ce lien direct entre la publicité officielle gouvernementale et la liberté d’expression. Cette phrase est devenu un appel de ralliement pour une nouvelle campagne [es], visant à rendre plus transparente la manière dont le gouvernement dépense l’argent des contribuables en communication et publicité.

Cette campagne est le résultat de plusieurs mois d’enquête par Fundar [es] et Artículo [es]. Les deux organisations ont fait un nombre conséquent de requêtes pour accéder aux informations sur les dépenses au niveau fédéral et étatique du gouvernement concernant les relations presse et la communication.

Ils ont uploadé la totalité de la base de données sur un nouveau site public où les utilisateurs peuvent voir les dépenses de chaque agence gouvernementale de 2005 à 2010. Malheureusement, cette base de données, construite à partir de DataTables, ne permet pas aux utilisateurs de faire des comparaisons sur plusieurs années et agences différentes dans un même tableur mais on trouverait également un budget détaillé des dépenses par an et par type de média sur Google Public Data Explorer avec une timeline assez pratique. De même, un budget détaillé par an et par type de média est disponible sur Google Fusion Tables

Mais cette campagne va au-delà de la visualisation de la façon le gouvernement dépense l’argent des contribuables en publicité et en média. Elle inspire un débat majeur sur le rôle et les droits du gouvernement en terme de communication, dans une époque où la survie et l’autonomie du journalisme est plus fragile qu’elle ne l’a jamais été dans les cinquante dernières années. Afin de faire décoller la discussion, Fundar et Artículo 19 ont organisé une conférence de presse et un débat à l’université de la communication [es] de Mexico City.

Le directeur exécutif de Fundar, Miguel Pulido [es] a lancé le débat en mettant les pieds dans le plat. En se tournant d’abord vers le directeur d’Emeequis Ignacio Ramirez Renya, Pulido a posé la question suivante :

Est ce qu’un média mexicain indépendant peut survivre sans la publicité gouvernementale ?

Ramirez a évité la question, ou, pour être plus précis, il l’a changée :

La vrai question, a-t-il répondu, est de savoir si un média indépendant a le droit d’accepter de la publicité en provenance du gouvernement, et je pense que oui.

Pour poser un peu le contexte pour les lecteurs qui ne sont pas familiers avec le paysage médiatique mexicain, Emeequis est, à mon avis, le meilleur magazine de news et d’évènement du pays. Avec Gato Pardo [es], ce sont les deux plus proches des américains Atlantic Monthly ou Harpers. L’écriture est vivante, les sujets sérieux, et le design éditorial est bluffant.

Et, comme tout le monde le sait, Emeequis ne serait plus de ce monde depuis longtemps, sans l’apport financier du gouvernement à travers la publicité. Jetez un coup d’œil aux banners directory - pratiquement toutes leurs annonces online viennent d’agences gouvernementales. En d’autres termes, les contribuables subventionnent le travail journalistique d’Emeequis en finançant la publicité des agences gouvernementales comme le Conseil national de prévention de la discrimination (CONAPRED, es). Tout cela est bien. En fait, c’est l’essence de la communication de développement. Les Mexicains devraient être au fait des activités de leur agences gouvernementales et dans ce cas, soutenir le journalisme d’enquête de qualité, pour le meilleur.

Un graph de l’argent budgété et dépensé sur la publicité fédérale et les relations presse de 2055 à 2010. Les montants budgétés sont en bleu, les montants dépensés en rouge.

Ce n’est pas le type de “publicité officielle” que Fundar et Artículo 19 critiquent. Mais ils sont contre ce que Géraldine Juárez a appelé “spotisization of democracy” [es]. Ce terme signifie pour elle une réalité parallèle et bien lisse, projetée par le gouvernement et produite par des coûts élevés en RP et agences de communication.

Vous entrez dans cette réalité alternative faite de publicité pour de la bière à chaque fois que vous ouvrez un journal ou un magazine, à chaque fois que vous visitez un cinéma, à chaque fois que vous allumez votre télévision ou votre radio.

Et c’est constamment présent : le gouvernement vous dit : “Ne vous inquiétez pas, tout va bien se passer, les choses vont s’arranger” , même si c’est clair que non. Le directeur exécutif de Fundar, Miguel Pulido le présente de cette manière en un tweet sarcastique :

J’ai fait un cauchemar. J’ai rêvé que nous vivions tous des vies heureuses, avec un accès à la sécurité sociale et à un vaste choix d’emplois. Je vivais dans une publicité du gouvernement.

Par exemple :

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Plus les mois passent, plus les mexicains pensent que leur gouvernement a échoué dans sa guerre contre la drogue. La réponse du Président Calderon s’est traduite par toujours plus d’augmentation des dépenses de l’argent des contribuables pour financer une campagne médiatique visant à les convaincre… du contraire. Non seulement les contribuables mexicains participent au financement d’une guerre très coûteuse contre les trafiquants de drogue qui donne peu de résultats sinon des morts et des déplacements de population. Ils financent aussi cette habile campagne médiatique. Par exemple :

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Enfin, il existe une autre préoccupation, particulièrement en ce moment, à un an des élections fédérales. Les politiciens en exercice utilisent la publicité gouvernementale régulièrement comme déclencheur de campagne des années avant que la saison électorale n’ait officiellement commencé. La cas le plus emblématique est celui de la campagne électorale du gouverneur de Mexico et potentiel présidentiel, Enrique Peña Nieto , dont la communication a totalement été financée par les Mexicains. Il avait engagé l’actrice Lucero Hogaza León pour jouer dans une série de spot TV qui faisait l’éloge de ses exploits. Mais pire encore, ce clip, qui fait clairement partie de la campagne présidentielle, est maquillé comme une simple pub gouvernementale censée informer les citoyens :

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Cette manipulation éhontée de l’appareil de communication étatique pour les besoin personnels d’une campagne électorale a inspiré au sénateur Pablo Gómez une nouvelle loi qui interdirait l’utilisation de la com étatique pour sa propagande personnelle et politique [es]. Je dois encore revoir cette proposition en profondeur mais cela pourrait être un objectif concret de la campagne derrière lequel se rallier avant la fin de la prochaine saison électorale.

Pour l’instant, la #PublicidadOficial de la campagne demande aux Mexicains comment ils voudraient que les 18 milliards de pesos que l’administration Calderon a dépensé jusque là en communication soient utilisés :

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Por la Educación [es], un groupement d’ONG et d’associations promouvant une meilleure éducation au Mexique, dit qu’elle construirait 18.834 écoles publiques :


Article publié initialement sur le blog de David Saski

Crédits photo via Flickr oso

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http://owni.fr/2011/04/11/publicidadoficial-revele-la-corruption-du-gouvernement-calderon/feed/ 1
Sarkozy + Tf1 = l’exception européenne http://owni.fr/2011/02/12/sarkozy-tf1-exception-europeenne-paroles-francais/ http://owni.fr/2011/02/12/sarkozy-tf1-exception-europeenne-paroles-francais/#comments Sat, 12 Feb 2011 08:30:45 +0000 D.Dubuc, F.Tixier, G.Lucas, T. de Bourbon, C. Cornet (Myeurop) http://owni.fr/?p=46193 L’émission quasi-coproduite par TF1 et l’Élysée “Paroles de Français” avec un panel de citoyens triés sur le volet face à Nicolas Sarkozy, est inconcevable ailleurs en Europe. Il n’y a pas d’émissions spéciales pour les chefs des gouvernements et, pendant les campagnes électorales, les candidats s’affrontent en direct selon des règles très précises.

La preuve par neuf. Face à un panel de neuf personnes tout spécialement sélectionnées par TF1, Nicolas Sarkozy entend faire la preuve ce soir de sa proximité et de son intérêt pour les préoccupations des Français. De “vrais gens” avec de “vrais problèmes”.

Loin des polémiques sur les voyages “no cost” de François Fillon et de Michèle Alliot-Marie ou de la fronde des magistrats, le dispositif semble calibré au plus près pour lancer l’opération “reconquête de l’opinion”. Jamais à l’aise devant les journalistes, à qui il n’a consenti que trois conférences de presse depuis son élection, le président préfère le face-à-face avec ses concitoyens.

Merci TF1

D’autant que la contradiction ne devrait pas être trop vive. Pas même un syndicaliste comme l’an passé (fin janvier 2011), lors de la première émission “Paroles de Français”. François Bachy, le chef du service politique de TF1 et LCI explique ainsi sans sourciller que l’une des personnes qui dialoguera ce soir avec Nicolas Sarkozy est “une chômeuse qui a retrouvé du travail depuis quelque temps grâce, notamment, à l’opération Semaine pour l’emploi de TF1″. Objectivité garantie.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Promis-juré, pourtant, cette émission “n’est pas du sur mesure pour Nicolas Sarkozy”. C’est Jean-Pierre Pernaut, la voix de la France tous les jours au JT de 13h qui le dit. “La parole sera totalement libre. C’est un exercice très difficile pour le chef de l’Etat, ça se fait sans filet”, renchérit François Bachy.

Un panel idéal

Le casting de l’émission devrait pourtant lui faciliter la tâche et lui permettre de vanter son action. La Tunisie : “hors cadre”, a déjà prévenu Jean-Pierre Pernaut. La fronde inédite des magistrats? Seulement si le présentateur décide de relayer les questions des internautes.

Les neufs interlocuteurs d’un soir ne sont, en rien, représentatifs de la population française. Ils n’ont même pas été désignés par un institut de sondage indépendant pour être supposés l’être. Non, ils ont été choisis par la chaîne pour “illustrer” des thèmes validés par l’Elysée : une pharmacienne cambriolée plusieurs fois afin d’évoquer la sécurité ; un agriculteur pour vanter la volonté française de lutter (avec le G20) contre la volatilité des prix ; ou encore, un proche d’une personne dépendante, quelques jours après avoir lancé un grand débat national sur la question.

Un panel idéal donc, au moment où le gouvernement s’enlise dans les affaires. Au moment aussi où la côte de popularité de Nicolas Sarkozy atteint des profondeurs historiques : 24% en janvier (en recul de 3 points) selon le baromètre mensuel TNS Sofres Logica pour Le Figaro Magazine rendu public jeudi.

Promesses non tenues

Il faut dire que lors de la première émission “Paroles de Français”, l’an passé, le chef de l’Etat avait multiplié les promesses. Peu ont été tenues. Le chômage devait baisser : il a grimpé de 3% en 2010. La taxe carbone a finalement été recalée. Nicolas Sarkozy s’était également engagé à venir voir Martine Millet, infirmière à l’hôpital Victor Dupouy d’Argenteuil. Douze mois plus tard, elle attend toujours sa visite. La proximité a ses limites. Heureusement, ce soir, aucun journaliste ne sera là pour le rappeler.

Nulle part ailleurs

Il est certain qu’aucune émission aussi calibrée et formatée n’existe en Europe, et chez la plupart de nos voisins, il est même inconcevable que le chef de l’État ne soit pas interrogé par un journaliste. En Allemagne une telle émission est tout simplement impensable dans un pays où une partie de la population a été soumise à la propagande d’un parti unique pendant quarante ans.

Des programmes sur le modèle de la pseudo démocratie participative télévisuelle existent néanmoins en Espagne et en Grande-Bretagne, à la différence essentielle que les candidats ne contrôlent pas le casting de l’émission.

En Espagne, l’émission “J’ai une question à vous poser” que TF1 avait lancé pour la campagne électorale de 2007 et lors de laquelle tous les candidats à l’élection présidentielle avaient été invités, a été rachetée et adaptée. “Tengo una pregunta para usted”, et son pendant catalan “Tinc una pregunta per a vosté”, sont basées sur le même principe que leur grande sœur française : un panel de 100 personnes représentatives de la société, choisies par un institut de sondage indépendant, sont réunies dans un amphithéâtre et posent des questions à un homme politique qui se tient debout face à eux, au centre du plateau, accompagné du présentateur/modérateur.
Quelles différences avec la version française ?

Premièrement, c’est une émission de la RTVE, la télévision publique espagnole, et non d’une chaîne privée dont le propriétaire est un ami personnel du président. Nuance.
Deuxièmement, les personnalités invitées sont les représentants des forces politiques du pays mais aussi des responsables d’organisations syndicales, et non uniquement les candidats d’une élection.
Les émissions consacrées au chef du gouvernement José Luis Zappatero et au leader de l’opposition Mariano Rajoy ont enregistré des taux record d’audience, dépassant tous deux les 30% de parts de marché avec environ 6 millions de téléspectateurs.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

En tout une vingtaine d’émissions ont été réalisées, certaines avec des décrochages régionaux en Catalogne ou en Andalousie. D’après le présentateur de l’émission, le journaliste Lorenzo Milá, les personnes présentes sont complètement libres de poser les questions qu’elles veulent, il n’y a pas de sélection préalable : “J’ai rongé mon frein durant certaines questions de spectateurs, “J’ai une question à vous poser” est incontrôlable” confiait-il dans une interview à El Mundo en 2009. En 2007, l’émission à été sacrée meilleur programme de télévision lors des Premios Ondas qui récompensent chaque année les professionnels de la radio, de la télévision, du cinéma et de la musique en Espagne.

Pendant les élections seulement

Au Royaume-Uni une émission dédiée au chef du gouvernement et téléguidée par les communicants du 10 Downing Street est tout simplement inconcevable. La première émission confrontant des dirigeants politiques et le public a été réalisée au printemps dernier : du 15 au 29 avril, à l’occasion des élections générales, une série de trois émissions de 90 minutes avec les leaders des trois principaux partis politiques a été diffusée.

Pour le premier débat télévisé en direct jamais organisé en Grande-Bretagne, les candidats se sont mis d’accord, au terme de plusieurs mois, sur 76 règles : place sur le plateau, temps de réponse, temps de “débat libre”. Rien n’a été laissé au hasard.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

La première de ces soirées historiques a débuté par une très courte présentation de chacun des candidats – Gordon Brown, David Cameron et Nick Clegg – debout les uns à côté des autres derrière leur pupitre respectif. Toujours debout, afin d’apporter un peu plus de tonicité au débat, ils ont ensuite répondu pendant une heure et demi aux questions des 200 membres du public choisis par l’institut de sondage ICM.

Ces questions avaient été présélectionnées par des journalistes présents sur le plateau en fonction du thème de chaque soirée : politique intérieure, politique extérieure et économie. Autorisés à s’interrompre (contrairement aux grands débats entre les candidats à la Maison Blanche aux États-Unis) et à répondre aux propos de leurs voisins, les trois hommes politiques n’étaient ainsi, pas en état d’étaler des contrevérités et de jouer sur la gêne du public. Parallèlement, une page Facebook avait été créée pour donner en direct les réactions des téléspectateurs. Un véritable succès outre-manche qui avait attiré plus de 9 millions de spectateurs.

Berlusconi préfère le téléphone

En Italie, le fait que le chef du gouvernement est également propriétaire des principales chaines privées créé un contexte très particulier. Il contrôle également, de fait, les chaines publiques en temps que Président du conseil. Nul besoin donc, pour Silvio Berlusconi d’imposer des émissions faites sur mesure. Lorsqu’il n’est pas d’accord avec une émission, il décroche son combiné et explique au présentateur en direct, ce qui ne lui convient pas.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

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Publié initialement sur MYEUROP sous le titre : Sarkozy sur TF1 un show inconcevable ailleurs
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Crédits photo : Via Youtube capture d’écran de l’émission Paroles de français

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http://owni.fr/2011/02/12/sarkozy-tf1-exception-europeenne-paroles-francais/feed/ 6
Comment l’UMP utilise le troll politique pour accaparer le débat http://owni.fr/2010/09/22/comment-lump-utilise-le-troll-politique-pour-accaparer-le-debat/ http://owni.fr/2010/09/22/comment-lump-utilise-le-troll-politique-pour-accaparer-le-debat/#comments Wed, 22 Sep 2010 08:26:32 +0000 Sylvain Lapoix http://owni.fr/?p=28813 Nicolas Sarkozy doit beaucoup à Léon Zitrone. A une maxime surtout : « Qu’on parle de moi en bien ou en mal, peu importe. L’essentiel, c’est qu’on parle de moi ! » Une leçon d’homme de télévision assimilée par le Président de la République comme une leçon de communication : dans une société du bruit médiatique, gueuler le plus fort est ce qui compte, quitte à dire n’importe quoi. A ceci prêt que ce « n’importe quoi » doit être assez efficacement conçu pour marquer les esprits dans le sens où la politique veut les mener.

Depuis la rentrée, le gouvernement a déployé un arsenal de communication prodigieux pour occuper tout l’espace médiatique, couvrant de ses déclarations fracassantes ou édifiantes les moindres mots de mise en garde ou d’indignation de l’opposition, des syndicats ou des penseurs qui se débattent à pointer ce qui a été défait par la « rupture ». Et ce simple fait marque la force d’un gouvernement sûr de lui : en 2007, c’est en remportant la bataille du discours que Nicolas Sarkozy a marqué les esprits. Sur chaque sujet, ses concurrents, à commencer par Ségolène Royal, ne faisaient que s’aligner, réagir dans le débat lancé par l’UMP. La plus grande défaite de la gauche ayant été de voir sa « vie chère » recallée par le « pouvoir d’achat » du programme de la droite.

Cette rentrée, la dernière avant le début de la campagne, marque une accélération dans un accaparement du débat qui, à première vue, ressemble à un troll massif de l’agora médiatique. Mais dont les effets de manche consistent surtout en trois techniques redoutables maquillée en grossièreté politique.

La mithridatisation ou « les sourds préfèrent qu’on leur parle doucement »

En déclarant qu’il aurait préféré que « le Luxembourg n’existe pas », après la critique de Viviane Reding sur la politique de la France envers les Roms, le sénateur Philippe Marini a battu des records d’indignité. Ses déclarations étaient jugées par le ministre des Affaires étrangères du Grand Duché « du même niveau que les discours de Mahmoud Ahmdinejad ». Remarquable en effet.

Car, en fixant la barre aussi haut dans la violence verbale, toute proposition un cran au dessous est considérée comme « relativement raisonnable ». De quoi couper l’herbe sous le pied de tout parti d’opposition qui, à moins de vouloir rentrer dans un concours se retrouve le souffle coupé au premier round. En lançant des projets de loi absurdes ou honteux, le même Philippe Marini avait opéré un joli coup en décembre 2008 : proposant de déduire des impôts les pertes de ceux qui avaient joué en Bourse et perdu avec la crise, il avait été déboutté… Permettant au gouvernement de jouer les redresseurs de tort en ne faisant que corriger l’un des siens !

Durant toute la passe d’arme qui a opposé la France à l’Union européenne, la méthode a fait florès : de Jean-François Copé à Chantal Brunel, la majorité s’est arrogé le droit de s’en prendre frontalement aux institutions, aux États membres, etc. Devant quoi l’opposition ne pouvait que s’indigner. Las, l’indignation est une posture passive : l’UMP restait à l’initiative et au premier plan à l’écran.

L’internalisation du débat ou « je suis content que nous ayons cette discussion au sein de l’UMP »

Pas de mérite à relever cette technique : c’est Xavier Bertand lui-même qui a vendu la mèche sur France inter lundi 20 septembre. Le week-end entier avait été animé du débat suscité par les propositions de Brice Hortefeux pour réformer la justice, notamment l’instauration de jurys populaires et l’élection des juges. Cacophonie dans la majorité : Gérard Larcher et François Fillon se déclarent contre le principe d’élection, Michèle Alliot-Marie déclare avoir ses idées (encore heureux, c’est elle la ministre de la Justice…). Bonhomme, Xavier Bertrand se félicite de l’ambiance : « qui fait vivre ce débat ? Notre famille politique et la majorité, moi je m’en réjouis. »

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Car en gardant en son sein toute la palette des options sur un sujet ou un autre, l’UMP coupe encore une fois l’herbe sous le pied de l’opposition. Vous êtes pour l’élection des juges ? Hortefeux aussi ! Vous êtes contre ? Ah, comme François Fillon alors ! Une fois le sujet imposé, l’Élysée pose chacun de ses pions sur une case avant de prendre sa décision : la place est prise, la gauche n’a plus qu’à réagir. L’UMP conserve la main.

Le hors sujet ou « la cuisine est sale mais j’ai balayé le couloir »

Les syndicats ne pourront pas dire que le gouvernement ne veut pas négocier. Certes, il refuse catégoriquement de toucher à la retraite à 62 ans et au taux plein à 67 mais il propose autre chose. En page 4 du Parisien du 21 septembre (J -2 de la deuxième mobilisation), le titre de l’interview d’Eric Woerth est clair : « Retraite : « nous allons proposer de nouveaux amendements ». » Il faut pousser à la fin du paragraphe de présentation pour apprendre que le ministre du Travail considère que « les mesures d’âges de 62 et 67 ans ne sont pas négociables ». La tête de page est passé, les gazettes pourront annoncer « Woerth prêt à des aménagements sur les retraites », le hors sujet est passé.

Et, dans ce « hors sujet » là, ce n’est pas l’élève qui est jugé mais le prof : en montrant cette fausse souplesse (on apprend en troisième colonne d’interview que Woerth ne compte pas égratigner les hauts revenus), le ministre fait passer ses critiques, les syndicats et l’opposition, pour des pinailleurs, des obsessionnels… Pire : pour des capricieux qui risquent de laisser passer l’occasion d’améliorer le sort d’une part marginale de la population. Au final, ces « amendements » ne seront peut-être même pas adoptés en séance. Mais qu’importe : syndicats et oppositions ne pourront pas dire que le gouvernement n’a rien proposé. L’UMP garde la main.

Combinées, toutes ces techniques ne donnent pas au gouvernement la capacité de « gagner » le débat sur les retraites. Ils lui donnent simplement la main sur le fameux débat, s’assurant qu’aucune déclaration de l’opinion, aucune réaction des syndicats ne sortira du cadre qu’il a défini. Que ce soit pour critiquer ou soutenir, toutes les propositions faites dans le débat sur la réforme des retraites se réfèrent à un membre de la majorité. En bien, en mal, peu importe : l’important, c’est qu’on parle d’eux.

Crédit photo : altemark,Martin Kingsley

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Duffygate: une belle démonstration de politesse à l’anglaise http://owni.fr/2010/05/06/duffygate-une-belle-demonstration-de-politesse-a-l%e2%80%99anglaise/ http://owni.fr/2010/05/06/duffygate-une-belle-demonstration-de-politesse-a-l%e2%80%99anglaise/#comments Thu, 06 May 2010 09:13:47 +0000 Fabienne Henry http://owni.fr/?p=14657 On le sait, les Britanniques aiment à s’excuser à tout bout de champs. Le « I’m really sorry » est comme une seconde respiration pour eux.

En Angleterre, on s’excuse de vous demander pardon. Non pas que l’excuse en elle-même soit réfléchie. C’est une seconde nature, un passeport indispensable pour tout bon Britannique qui se respecte.

Il est arrivé hier une petite mésaventure à Gordon Brown qui risque bien de lui coûter sa réélection.

Le Premier ministre britannique était hier en campagne électorale à Rochdale dans le nord-ouest de l’Angleterre. Filmé en direct, il s’est entretenu avec la désormais célèbre Gillian Duffy, une femme d’une soixantaine d’années, particulièrement agressive dans ses propos concernant la fiscalité et l’immigration.

Petit aparté
Les propos de madame Duffy sur l’immigration étaient dignes de ceux d’une électrice du Front National. Du style : qu’allez-vous faire avec tous ces Européens qui viennent prendre les emplois des Anglais… et autres réjouissances du même acabit.

Gordon Brown est resté particulièrement calme et circonspect dans son dialogue avec madame Duffy.

Les problèmes ont commencé, pour le premier ministre, à l’issue de cette brève rencontre, lorsqu’il a regagné sa voiture officielle qui l’emmenait vers son prochain rendez-vous.
La portière à peine refermée et ignorant que son micro-cravate était resté branché, il lance à son collaborateur : « C’était une catastrophe, ils n’auraient jamais dû m’organiser une rencontre avec cette femme. C’est une idée de qui ? Sue, probablement. C’est tout simplement ridicule… – en parlant de Gillian Duffy – c’était juste une espèce de « bigoted woman. »

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Bigoted
L’expression « bigoted woman » a été traduit par les journaux français par « bornée ». Il me semble que ce terme revêt un sens plus fort et a notamment la connotation de « raciste ».

Les propos du Premier ministre ont été enregistrés par la chaîne de télévision qui l’avait interviewé et ont été immédiatement et largement diffusés par toutes les télévisions britanniques.

La « bigote », qui a jusqu’à présent toujours soutenu le Parti travailliste, a réagi immédiatement et s’est dite très choquée et contrariée par les propos de Gordon Brown.

Le Premier ministre britannique s’est immédiatement et platement confondu en excuses, tout d’abord sur les ondes de la BBC (où il s’est aperçu en direct de sa gaffe) : « Je présente mes plus plates excuses à cette dame. Je ne crois pas qu’elle soit ‘bornée’ », a-t-il déclaré.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Gordon Brown a ensuite téléphoné puis a rendu visite à madame Duffy.

Voici ses déclarations après ses excuses en personne chez elle.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

N’est-ce pas là un véritable exercice de style, une leçon dans l’art de s’excuser (quand on a vraiment quelque chose à se reprocher) ?

Pauvre Gordon.
Même si l’on ne peut que compatir avec lui et se dire que dans le fond la Gillian, elle a quand même fait preuve d’une belle démonstration de racisme dans ses propos xénophobes, on ne peut s’empêcher de penser que la course à l’élection prend un tour défavorable pour l’actuel Premier ministre.

S’il nous a donné une belle démonstration dans l’art de l’excuse à la britannique, Gordon Brown a échoué à nous prouver ses talents dans l’art de la politique ; où il est préférable de rester serein et impassible dans l’adversité.

Cette gaffe intervient à la veille du troisième et ultime débat télévisé de la campagne électorale entre les trois candidats. Ce dernier débat est consacré à l’économie et est jugé déterminant pour le Parti travailliste.

Je suis prête à parier que le Duffygate sera évoqué largement par les journalistes et les deux autres candidats.

Ce soir, nous allons assister à un beau spectacle de mise à mort politique. Je ne le souhaite pas, je le déplore.

Billet initialement publié sur Lost and found in London sous le titre “Une belle démonstration de politesse à l’anglaise (merci Gordon)”

Sur ce sujet, on se permet de vous recommander le site 10 Downing Tweets

Photo CC Flickr by Downing Street (LOLcat OWNI remix)

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Le Nuclear Summit de Washington, avec @YLeterme http://owni.fr/2010/04/13/le-nuclear-summit-de-washington-avec-yleterme/ http://owni.fr/2010/04/13/le-nuclear-summit-de-washington-avec-yleterme/#comments Tue, 13 Apr 2010 11:24:43 +0000 Damien Van Achter http://owni.fr/?p=12157

MAJ 13/04: Yes, He Did :-)

En route pour le Sommet sur le nucléaire à Washington. Deux jours de réunion avec une 40aine de pays à l’initiative de Barack Obama. Au retour, ce sera l’heure du dossier BHV.

Le premier tweet d’Yves Leterme ne remonte peut être qu’à la dernière pluie, lesquelles s’enchaînent assez vite, surtout ici en Belgique, mais force est tout de même de constater que depuis le 4 février, date de son dépucelage tweetesque, les échanges entre notre Premier ministre et la twittosphère néerlandophone belge se déroulent sur un ton très intéressant, qui laisse augurer de quelques belles joutes communicationnelles, voire plus si affinités. Pourquoi ? Tout d’abord parce que, manifestement, Yves Leterme ne laisse à personne d’autre que lui le soin de blackberryser ses tweets, que se soit lors de son dernier voyage officiel en Asie ou dimanche dans son divan devant Paris-Roubaix. Ce qui est un fort bon départ en la matière vu que tout le monde ne s’appelle pas Barack et qu’il vaut toujours mieux un tweet humain dans la langue de Vondel qu’un tweet pasteurisé dans celle de Nivelles (ou Bastogne. ou Liège, au choix)

Voilà, je viens de comprendre comment "follower" quelqu'un :-) Merci pour tous vos conseils !

Intéressant aussi parce qu’il est en mode low profile, conscient que nul n’est à l’abri d’un fail (surtout lui, remember la Brabançeillaise) et qu’on a rarement l’occasion de faire deux fois une première bonne impression (sauf lui, puisqu’il a tiré la carte “same player shoot again“). Pas de déclaration fracassante mais quelques @reply bien sentis et des petits gestes qui entretiennent une bonne atmosphère en attendant de découvrir comment fonctionne le bouton pour se mettre à l’écoute des autres gazouilleurs. Troisième initiative web-friendly, à défaut d’être récente ou novatrice, le compte Flickr alimenté en fresh pictures d’agence. D’où d’ailleurs la non-licence Creative Commons, dommage … Enfin, et c’est sans doute pour cela que l’arrivée piano ma sano du Premier ministre sur Twitter m’excite le plus (oui, j’ose leterme), c’est qu’elle advient alors que l’actualité politique belgo-belge va à nouveau grimper dans les tours – je ne vous fais pas le pitch de BHV, @jeanlucdehaene le fera mieux que moi- et que je ne doute pas un seul instant que les autres twittos élus du plat pays ne manqueront pas d’alpaguer Yves sur la voie publique numérique.  Et c’est là que les choses vont vraiment devenir intéressantes !

Vu le nombre de perchés ayant désormais accès au balcon des festivités, ne pas répondre ou botter en touche à la sauce média 1.0 sera de facto considéré comme un aveu de faiblesse, voir pire, comme une reconnaissance de culpabilité… avec un nouveau bashing 4 étoiles bien lolesque à la clé (cf. le T ci-dessus, tissé en son temps avec amour et à la main par de vilains pirates) Bref, tout ça pour vous dire que Yves vient d’arriver à Washington, qu’il n’a pas dormi des masses, qu’il rencontre en ce moment le sénateur US @MarkWarner et qu’avec un peu de chance, comme l’avait fait avant lui @VincentVQ,  il balancera peut-être même un ou deux tweetpics depuis le conseil des ministres … Who knows ?  :-)

Billet initialement publié sur Blogging the news

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whitehouse.gov et elysee.fr : “Président digital” vs “Président analogique” http://owni.fr/2010/03/30/whitehousegov-et-elyseefr-president-digital-vs-president-analogique/ http://owni.fr/2010/03/30/whitehousegov-et-elyseefr-president-digital-vs-president-analogique/#comments Tue, 30 Mar 2010 13:47:11 +0000 Benoit Thieulin http://owni.fr/?p=11195 capture-de28099ecran-2010-03-30-a-151528

Si en terme de communication institutionnelle, et encore, descendante, le nouveau site de l’Elysée tient la comparaison avec son frère (de design) américain, il est lâché lorsqu’on examine les usages sociaux et innovants ainsi que les politiques publiques en matière de numérique : le gouvernement 2.0 parait bien loin.

La réactivité du web, et son humour, continuent de m’impressionner et de m’amuser : à peine le nouveau site de l’Élysée était-il lancé, fort de sa ressemblance assez frappante avec sa grande sœur whitehouse.gov, que www.whiteelysee.fr apparaissait sur Twitter pour s’en moquer gentiment.

Cela dit, aucune honte à s’inspirer de ce qui marche. Le site d’Obama est pas mal, donc, rien d’infamant à suivre la voie, même si l’inspiration frôle en l’espèce un peu trop la copie pure et dure… Regardez quand même ce qu’un graphiste m’a montré : le plagiat se loge même dans certains détails ; dommage, ils auraient pu quand même faire preuve d’un peu plus d’audace et d’imagination. D’autant qu’il s’agit presque là d’une récidive : le précédent site de l’Élysée avait déjà défrayé la “chronique du web” à son lancement tant il ressemblait comme un clone… au site du candidat Sarkozy pendant les présidentielles… Mais tout cela est anecdotique ; soyons beaux joueurs : le paquet semble avoir été mis sur la production des contenus ; le résultat est pas mal du tout pour un site de pure communication descendante.

Au-delà des aspects ergonomique et graphiques, en effet proches de ceux de la Maison Blanche, et assez efficace, il y quelques tentatives de communication assez ambitieuses qui méritent d’être saluées : “les actions”. Passons sur la phraséologie toute sarkozienne, un peu naïve et qui fait un peu sourire… Pour le reste, il y a derrière un gros boulot de structuration et de mise en forme des grands chantiers de sa présidence, reconstruit autour de ses déclarations et déplacements : présentation en amont du contexte, des enjeux, de la méthode choisie ; description de “l’événement” présidentiel, le plus souvent par un déplacement à grand renfort de photos, vidéos, etc. Puis, présentation en aval des actions, des principales mesures, du bilan (lorsqu’il y en a déjà un) et des prochaines étapes. Le tout décliné sur pas mal de thématiques. Une seule bizarrerie : naviguer dans les thématiques est du coup plus aisé et plus riche à partir des “actions” du président que par les “dossiers”, eux, beaucoup plus pauvres en contenus servis sur chacune de leur page.

Autre qualité : la fameuse recherche Exalead qui renvoie au mot près sur l’extrait vidéo du discours où le président utilise le mot recherché. Impressionnant. Ça fonctionne bien et cela peut être utile… On peut également noter les outils de dissémination, FB connect, la présence même embryonnaire sur les réseaux sociaux, etc. Tout cela n’a rien d’exceptionnel, mais c’est une avancée dans le web public français.

En revanche, là s’arrête la comparaison de part et d’autre de l’Atlantique. En effet, on aurait bien aimé que l’Élysée ne se limite pas à cette seule inspiration un peu cosmétique : la force d’Obama dans l’usage qu’il fait d’Internet ne tient pas à la jolie réalisation d’un site média bien alimenté en contenus sur l’action présidentielle ; elle consiste bien davantage en la richesse et en l’innovation de l’usage qu’il en fait au-delà de sa propre communication institutionnelle, à l’exemple des politiques publiques qu’il mène en matière numérique .

Alors, poussons un peu le parallèle. Et là, on est en droit de se demander :

- Pourquoi l’innovation des consultations publiques organisées par exemple par le département d’État américain sur www.state.gov/opinionspace, n’a-t-elle inspirée notre président ? Ou les différents dispositifs de questions mises en débat sur le site de la Maison Blanche ? Ou encore les émissions en direct ou les internautes posaient des questions via Internet ?

- Ou est l’équivalent français de data.gov qui force les administrations américaines à publier l’essentiel des données publiques pour en laisser aux citoyens la possibilité de les exploiter, de les mashuper ? Malgré l’ambition affichée par sa ministre NKM et son appel à projet, qui ne voit que le Président n’en a pas fait l’un de ses chantiers prioritaires, contrairement à Obama, visionnaire, qui a bien compris l’empowerment considérable que cela apporterait à la société ? Voila pourtant un usage révolutionnaire du Net, un levier de transformation de l’action publique. Mais sur Internet, Sarkozy a préféré le gourdin Hadopi au levier des “open data”…

- La publication des notes, études, et requêtes des lobbies publiées par Obama sur “You Seat at The Table” de change.gov, trouvera-t-elle un jour sa rubrique jumelle sur elysee.fr ou ailleurs ?

- Même les “actions” qui sont incontestablement bien réalisées sur elysee.fr, sont loin d’atteindre la traçabilité du “stimulus package” que l’on peut suivre sur www.recovery.gov. Et mieux vaut ne pas parler de www.relance.gouv.fr

Arrêtons la la comparaison. Au fond, l’analogie entre whitehouse.gov et elysee.fr tient la route tant qu’il s’agit de communication institutionnelle, et encore, descendante. Pour les usages plus “sociaux” et “innovants”, sans parler des politiques publiques menées dans le champ du numérique, malheureusement, l’hôte de la Maison Blanche tient la distance avec le locataire de l’Elysée. Une affaire qui se noue, probablement pour beaucoup, dans l’usage personnel que le premier a des outils Internet , et pas l’autre.

Au-delà de leur site de com’, le match se joue entre un “Président digital” et un “Président analogique”, pour reprendre la pertinente expression de Jean-Michel Billaut.

> Illustration par Ted Drake sur Flickr

> Billet initialement publié sur Temps réels sous le titre “En matière numérique, le match Obama / Sarkozy se joue ailleurs qu’entre whitehouse.gov et elysee.fr”

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Du storytelling digital au storytalking politique http://owni.fr/2009/11/15/du-storytelling-digital-au-storytalking-politique/ http://owni.fr/2009/11/15/du-storytelling-digital-au-storytalking-politique/#comments Sun, 15 Nov 2009 14:28:28 +0000 Luc Mandret http://owni.fr/?p=5447

Nicolas Sarkozy sur Facebook, le Président de la République et ses 186 000 “fans”: face au succès du réseau social et de ces plus de 11 millions de Français inscrits, la communication de l’Elysée a compris tout l’intérêt de communiquer sur Facebook. Un large public, captif et bavard, la possibilité de passer outre les diffuseurs d’actualités: Facebook aurait du être “the place to be” pour les communicants politiques drogués au storytelling.

Digital Sarkozy chute au pied du Mur de Berlin

Le 8 novembre, le Président de la République écrit pour ses Fans et sous une photo de Sarkozy Nicolas devant le Mur de Berlin, il raconte son histoire personnelle mêlée à l’Histoire de la Chute du Mur: “J’étais alors secrétaire général adjoint du RPR. Le 9 novembre au matin, nous nous intéressons aux informations qui arrivent de Berlin, et semblent annoncer du changement dans la capitale divisée de l’Allemagne. Nous décidons de quitter Paris avec Alain Juppé pour participer à l’événement qui se profile. Arrivés à Berlin ouest, nous filons vers la porte de Brandebourg où une foule enthousiaste s’est déjà amassée à l’annonce de l’ouverture probable du mur“.

Un mensonge révélé alors par le journaliste Alain Auffray sur son blog: “Le matin du 9 novembre, personne à Paris – ni même à Berlin – ne pouvait soupçonner que le mur allait tomber. Les radios et télévisions ouest-allemandes n’ont commencé à évoquer la ‘libre circulation’ qu’à partir de 20h. Et ce n’est qu’après 23 heures que les Berlinois de l’Est, prenant ces informations prématurées pour argent comptant, furent si nombreux à se masser devant le poste frontière de la Bornholmer Strasse que les garde-frontière est-allemands finirent par lever la barrière“.

On connaît la suite, l’emballement médiatique, les revirements d’Alain Juppé, le soutien de François Fillon. Et le malaise: Nicolas Sarkozy aurait-il menti? Un Président pourrait-il mentir consciemment? Si seulement le conseiller en charge du profil Facebook de Nicolas Sarkozy s’était trompé, un simple rectificatif aurait suffit. Mais l’Elysée s’arc-boute sur ses ses positions. Le malaise perdure.

Le Parisien révèle alors la suppression de certains commentaires sur la page de Nicolas Sarkozy: l’affaire dans l’affaire surgit. La cellule internet de l’Elysée, dirigée par Nicolas Princen (déjà montré du doigt lors de sa prise de poste consistant notamment à “surveiller tout ce qui se dit sur la Toile, traquer les fausses rumeurs et déjouer toute désinformation à l’encontre du Président”), en charge du Facebook de Sarkozy fait savoir: “On ne supprime que les messages injurieux, haineux, vulgaires ou à caractère antisémite ou homophobe. Les messages critiques, négatifs, on les laisse. C’est le jeu participatif“. Trop tard le mal est fait. Le soupçon de censure est lancé.

Le storytelling digital est mort…

En lisant les commentaires des internautes sur la Fan Page de Nicolas Sarkozy sur Facebook, on constate avec effroi l’ambiguïté de cette communication: nombreux sont celles et ceux s’adressant directement au Président de la République. Sauf que le Président de la République n’est pas leur interlocuteur. Au final, un mensonge, une fois de plus, mais par omission. Bien entretenu par les communicants de Sarkozy, en utilisant la première personne du singulier lorsqu’ils alimentent ce profil Facebook.

Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d’état à la Prospective et au Développement de l’Economie Numérique, quant à elle, alimente elle-même son compte Twitter et son profil Facebook. Elle a réussi à créer un lien direct avec les citoyens. Mais comme le remarque à juste titre Eric Maillard à l’occasion d’un échange entre NKM et le journaliste du Monde Xavier Ternisien, cela ne change en rien le besoin impérieux pour les politiques d’avoir un conseiller en communication afin de gérer leur agenda médiatique.

D’un côté donc, des ministres qui gèrent réellement leur identité numérique, de l’autre un Président qui le fait croire. Une certitude: la mauvaise gestion du storytelling digital pour Nicolas Sarkozy, révélée par sa présence sur Facebook. Sur le site de la Présidence de la République, c’est “M. le Président de la République” dont on raconte les journées. La troisième personne du singulier versus la première. Une énorme différence, alors même que Nicolas Sarkozy n’est jamais lui-même derrière son écran.

… vive le storytalking digital!

L’article du Parisien annonçait également le 13 Novembre la poursuite, malgré la polémique, de l’activité de Nicolas Sarkozy sur Facebook: “Selon nos informations, il devrait poster dans les jours qui viennent deux nouveaux messages: un sur la grippe A et un pour soutenir l’équipe de France de football avant le match contre l’Irlande pour la qualification à la Coupe du monde de football“. Bingo! Le 14 novembre, on peut lire sur le Facebook de Nicolas Sarkozy: “Je veux apporter mon plein soutien à l’équipe de France de football qui va disputer deux matchs déterminants de qualification pour la coupe de monde de 2010 en Afrique du Sud“.

Démonstration de la construction des histoires, de la préparation en amont des actualités digitales de Nicolas Sarkozy. A l’encontre même de ce que doit être Internet: un lieu d’instantanéité, de spontanéité, et d’échanges.

Le Web social, s’il a bouleversé le Web d’une part, les médias d’autre part, trouve son intérêt dans la possibilité d’échanger, de dialoguer. La fin de cette communication “top-down”, l’avènement de la chute des barrières entre “élites” et citoyens en politique, entre marques et consommateurs dans le privé.

La communication digitale des hommes politiques, pour être réussie ne devra plus se contenter de raconter des histoires, copier-coller du storytelling classique. Les histoires se raconteront avec les citoyens, certes en lançant des sujets, en orientant les débats, en animant les communautés, mais surtout en étant simplement un interlocuteur des internautes: le storytalking est né.

» Article initialement publié sur le blog de Luc Mandret

» Article également publié sur L’Express.fr

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