OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 Innover et réussir avec les licences Creative Commons http://owni.fr/2011/07/11/innover-et-reussir-avec-les-licences-creative-commons/ http://owni.fr/2011/07/11/innover-et-reussir-avec-les-licences-creative-commons/#comments Mon, 11 Jul 2011 09:29:12 +0000 Lionel Maurel (Calimaq) http://owni.fr/?p=73272 Fin juin, Creative Commons International a publié un eBook fascinant – The Power of Open [en] – racontant les histoires de plus d’une trentaine de créateurs, issus des quatre coins du monde, ayant trouvé le chemin de la réussite en plaçant leurs contenus sous licence Creative Commons et en les partageant dans le cadre de projets innovants.

The Power of Open. CC-BY.

Cinéma, musique, édition, journalisme, éducation, design et plus encore : c’est un plaisir de constater la variété des champs d’application des licences libres et la manière dont cette infrastructure juridique ouverte permet d’explorer de nouvelles pistes pour créer, en utilisant le plein potentiel d’Internet.

Le livre, lui-même placé sous licence CC-BY, est téléchargeable librement ici en français et une célébration a été organisée à l’occasion de son lancement mondial, mercredi 6 juillet au Lieu du design à Paris.

Il me paraît particulièrement important que ce livre soit diffusé en France, où les licences Creative Commons sont encore relativement peu connues, quand elles ne font pas l’objet  d’une forme d’ostracisme. En mai dernier, lors de l’eG8 à Paris, le ministre de la Culture Frédéric Mitterrand a explicitement refusé de parler au père des licences Creative Commons, Lawrence Lessig. Mais ces tentatives d’oblitération sont vaines, car l’usage des licences Creative Commons progresse de façon impressionnante, comme le montre le schéma ci-dessous issu du livre :  près de 500 millions d’œuvres ont été placées par leurs auteurs sous CC depuis 2003. Même au pays de Beaumarchais (et d’Hadopi…), on ne peut plus passer sous silence un phénomène de cette  ampleur.

Nombre d’oeuvres placées sous licence Creative Commons depuis 2003. CC-BY

Si The Power of Open revient sur certains des projets phare utilisant les Creative Commons (les célèbres conférences Ted Talks [en], le Creative Commons Repository [en] de la chaîne Al Jazeera ou l’archive ouverte PLoS – Public Library of Science [en]), il présente surtout l’intérêt d’offrir un panorama sur de nombreuses initiatives moins connues, mais toutes aussi remarquables et riches d’enseignements.

Ayant dévoré l’ouvrage d’un bout à l’autre, j’aimerais partager avec vous mes réflexions sur ces pouvoirs de l’ouverture et l’intérêt d’utiliser les licences Creative Commons, en vous proposant un premier billet aujourd’hui et un autre en début de semaine.

S’affranchir des coûts de transaction induits par le copyright

On nous répète à l’envi que le droit d’auteur est nécessaire pour encourager la création, mais on oublie souvent de parler des coûts très importants de transaction induits par l’approche « Tous droits réservés ». Tout usage d’une œuvre nécessitant en principe une autorisation préalable, ce sont autant de contrats à préparer et à faire signer, de cabinets d’avocat à payer et des recherches à entreprendre pour régler les questions de droits.

Dans certains cas, ces coûts de gestion juridique sont tout simplement insoutenables et ne permettraient pas à des projets de prospérer, notamment lorsqu’ils sont portés par de petites structures. C’est le cas pour Pratham Books [en], un éditeur associatif indien créant des livres pour enfants :

En tant que petit éditeur, nous n’avons pas la capacité de personnaliser les licences à chaque fois qu’une partie intéressée souhaite utiliser nos contenus. Les licences Creative Commons nous ont permis de conclure des accords avec de nombreux partenaires en nous libérant du poids des négociations juridiques et des pertes de temps et d’argent que nécessitent ces négociations [...] Dans une petite organisation comme la nôtre, le temps est très important. Dans notre cas, les licences Creative Commons nous ont notamment aidés à gagner du temps, de l’argent et de l’énergie.

Ce poids des coûts de transaction, c’est aussi l’une des raisons pour lesquelles l’ex-chanteur et bassiste du groupe Tears for Fears, Curt Smith, a choisi d’utiliser les licences Creative Commons pour diffuser les albums de sa carrière solo. Il raconte comment il était « inondé de demandes de réutilisation pour les chansons de Tears for Fear », particulièrement chronophages, alors que les Creative Commons, en autorisant à l’avance les usages non commerciaux, lui permettent à présent de se concentrer sur la création. Les licences Creative Commons sont aussi l’occasion pour lui de se lancer dans des projets collaboratifs avec des personnes, rencontrées sur les réseaux sociaux Twitter et Facebook (The Social Media Project [en]).

Cliquer ici pour voir la vidéo.

La dessinatrice Nina Paley explique de son côté qu’elle a choisi de se tourner vers les licences libres, lorsqu’elle s’est rendue compte qu’il serait quasiment impossible de régler les questions de droits pour produire son premier film Sita Sings The Blues [en], depuis distribué gratuitement sous CC et devenu un grand succès.

Idem pour Melinda Lee, ancienne responsable des affaires juridiques chez MTV, qui avait constaté que beaucoup d’opportunités étaient manquées parce que la chaîne n’arrivait pas à négocier les droits sur certains contenus. Elle décida alors de se lancer dans son propre projet, avec Uncensored Interview [en], un site pour lequel sont produits des entretiens avec des célébrités, dont elle a libéré une partie du contenu sous licence CC-BY [en] afin qu’il puisse être réutilisé sans entrave par les fans, mais aussi par d’autres compagnies.

Les Creative Commons étant peu à peu devenu un véritable « standard juridique », ils évitent aussi aux porteurs de projet de devoir investir des sommes importantes pour mettre en place un cadre juridique en repartant à zéro. C’est ainsi que l’Open University [en] a pu économiser des sommes importantes, pour le développement de sa plateforme de contenus pédagogiques ouverts, OpenLearn [en] :

Nous avions au départ prévu un montant de 100 000£ de frais juridiques pour établir une licence viable pour Open Learn, mais nous avons pu économiser cet argent car nous avons adopté CC [...] Utiliser une licence reconnue nous a aidés à impliquer les autres. Nous avons notamment pu expliquer les avantages des licences CC indépendantes et éviter de leur demander d’adopter une licence développée en interne.

Jouer la carte de la dissémination

Les Creative Commons sont en phase avec les usages d’internet, car ils autorisent la reproduction et la représentation des contenus, leur permettant de circuler sur la Toile là où le copyright classique tend à les « épingler » en un point.

Plusieurs projets présentés montrent que l’on peut tirer parti de la dissémination des contenus plutôt que de chercher à s’en protéger, notamment dans le domaine du journalisme en ligne.

Le site américain de journalisme citoyen Pro Publica [en] (à rapprocher d’un OWNI ou d’un Agora Vox) a ainsi délibérément choisi de permettre la republication de ses contenus sur Internet, de manière à accroître sa visibilité et à favoriser la circulation de l’information. Les conditions d’utilisation du site [en] proclament le mot d’ordre « Steal Our Stories ! Volez-nous nos histoires ! » et organisent grâce à une licence CC-BY-NC-ND une dissémination maîtrisée des contenus (Pas de modification, Pas d’usage commercial). Avec un certain succès puisque Pro Publica a été le premier site d’information pure player à recevoir le prix Pulitzer en 2010 pour ses enquêtes sur les conséquences du cyclone Katrina.

La chaîne qatarie Al Jazeera a choisi la même stratégie en plaçant ses reportages vidéo sous licence CC-BY dans son Creative Commons Repository [en]. L’impact sur la visibilité des contenus est impressionnant, avec notamment une augmentation de la fréquentation de 723% après la mise en ligne des images de la Révolution égyptienne [en] et de très nombreuses reprises sur des contenus extérieurs. Al Jazeera fait également des premiers fournisseurs de contenus pour le YouTube Video Editor [en], ce qui va faciliter le remix par les internautes de ses vidéos.

La plateforme Global Voices, spécialisée dans la reprise de billets de blogueurs locaux et de journalistes citoyens, utilise une autre facette des licences Creative Commons pour favoriser la dissémination de l’information : leur capacité à faciliter les traductions. Alors que la traduction est juridiquement considérée comme une adaptation des œuvres, interdite en principe, les billets postés sur Global Voices peuvent être traduits rapidement par l’équipe de bénévoles de la plateforme en une douzaine de langues, et bénéficier par là d’une audience accrue. Ce mode de fonctionnement a permis à Global Voices d’être à la pointe pour couvrir des évènements comme la révolution en Tunisie [en] ou le tremblement de terre au Japon [en], avec des articles repris par des médias traditionnels comme le New York Times ou Reuter.

Billet initialement publié sur :: S.I.Lex ::

Image Flickr CC Paternité karindalziel

Cliquez ici pour découvrir de nouvelles initiatives sous Creative Commons dans la deuxième partie de ce compte-rendu.

MAJ : le 11/07 à 22 h 15, correctif sur la présence de Lawrence Lessig lors de l’eG8 à Paris, suite aux commentaires des lecteurs.

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Gabon: la révolution silencieuse http://owni.fr/2011/02/16/gabon-la-revolution-silencieuse/ http://owni.fr/2011/02/16/gabon-la-revolution-silencieuse/#comments Wed, 16 Feb 2011 12:49:36 +0000 Ethan Zuckerman http://owni.fr/?p=46735 Cet article a été publié sur le blog Ethan Zuckerman le 9 février, avant la chute du régime d’Hosni Moubarak.

2011 a été une année remarquable faite de changements politiques rapides. Déclenchées par l’acte désespéré d’immolation de Mohamed Bouazizi, les manifestations de Sidi Bouzid, au centre du pays, se sont répandues dans tout le pays pour aboutir à l’impensable : mettre fin à vingt-trois ans de dictature.

Inspirés par les actions du peuple tunisien, les manifestants sont descendus dans les rues en Jordanie, au Yémen, en Algérie et même en Égypte où les manifestants occupent actuellement la place Tahrir au centre du Caire. Ils font pression sur Hosni Moubarak et demandent sa démission. Moubarak a déjà fait plusieurs concessions, et il semble clair que la politique égyptienne changera radicalement dans les prochains mois.

Cherchant à répondre préoccupations des manifestants, le roi de Jordanie Abdullah II a limogé son cabinet et ordonné la formation d’un nouveau gouvernement, pendant que Saleh, le président du Yémen, acceptait de donner sa démission pour 2013. Les médias de langue anglaise, pour la plupart, ont été lents à couvrir les manifestations tunisiennes. (Voir mon précédent post, “Et si la Tunisie faisait sa révolution, alors que personne ne regarde ?”).

Alors qu’il devenait évident que les manifestants poussaient Ben Ali à quitter le pouvoir, les réseaux ont rapidement rattrapé leur retard et mis en ligne des vidéos permettant de suivre en direct les évènements majeurs qui prenaient place à Tunis, au moment où l’armée est intervenue pour protéger les manifestants des forces de sécurité, exhortant Ben Ali vers la sortie.

Les révolutions sont médiagéniques

Les manifestations en Egypte se sont développées beaucoup plus rapidement que celles de Tunisie, avec des manifestations massives qui explosaient dans tout le pays le 25 janvier. Les médias du monde entier couvraient l’histoire de manière intensive dès le 28 janvier lorsqu’il est devenu évident que les manifestants ne respecteraient pas le couvre-feu imposé par le  gouvernement et continueraient à occuper le centre du Caire.

Al Jazeera, interdite de reportage en Tunisie, a été en mesure d’offrir une couverture 24h/24 et 7j/7 à partir de différents lieux dans toute l’Egypte, et de nombreux téléspectateurs américains se sont retrouvés absorbés par les reportages des évènements de la place Tahrir sur Al Jazeera en anglais, diffusés en streaming sur Internet avec des audiences record.

Egypte, Nasr City, le 29 janvier

Les autres chaînes d’infos se sont davantage tournées vers des perspectives historiques, se concentrant moins sur les événements du terrain que sur les questions de stabilité régionale et les conséquences sur la relations entre les États-Unis et Israël. Au total, la couverture dans les médias américains a été énorme pour une information de politique internationale. Le projet d’indice d’excellence en couverture journalistique (Excellence in Journalism’s News Coverage Index) a noté que cette histoire avait atteint 76% de parts sur la télévision par câble la première semaine de février. C’est l’information internationale la plus importante qu’ils aient repérée sur les quatre années de leur projet, et la quatrième plus grosse toutes catégories confondues sur cette période.

Il est facile de comprendre pourquoi les révolutions font de “la bonne télévision”. Elles sont la forme la plus visible de changements politiques à l’œuvre, et quand elles parviennent à remodeler des gouvernements auparavant jugés inattaquables, elles se transforment en un récit profondément captivant et plein d’espoir. Qu’une révolution ait lieu en Egypte, nation la plus peuplée du monde arabe et cœur culturel de la région, est particulièrement intéressant.

Mais toutes les révolutions ne bénéficient pas de ce niveau d’attention. Le Gabon, nation d’Afrique de l’ouest connaît une révolte populaire contre la domination d’Ali Bongo Ondimba, fils de l’inamovible homme fort Omar Bongo, et président depuis octobre 2009. Des milliers de partisans de l’opposition sont descendus dans les rues de capitale Libreville, ce 29 janvier et ont été confrontés à une répression violente des troupes d’Ali Bongo.

Les manifestations se sont étendues à d’autres villes, et la répression à leur encontre est devenue particulièrement féroce. Les manifestations qui étaient prévues les 5 et 8 février ont été réprimées aux gaz lacrymogènes. À ce stade, nous ignorons si les manifestants seront en mesure de continuer à faire pression sur le gouvernement, ou si la répression va conduire la révolte à devenir clandestine.

Dynastie Bongo

Les révoltes en Egypte et en Tunisie ont mis un coup de projecteur sur les régimes autocratiques historiquement corrompus. La possibilité de voir s’établir une dynastie Moubarak d’Hosni à Gamal n’a fait qu’entretenir le feu de la contestation en Egypte. Les Gabonais connaissent bien ce type de problèmes.

Omar Bongo est largement suspecté d’avoir systématiquement pillé les caisses de l’Etat à son profit personnel. Une plainte a été déposée par Transparency International en France contre les gouvernements du Gabon, du Congo et de Guinée équatoriale concernant les biens mal acquis alors que le sénat américain, dans un rapport de 1999, avait déjà établit le fait que Bongo avait déposé 8,5% du budget de l’Etat gabonais sur un compte personnel à la Citybank, soit un siphonnage des caisses de l’Etat de 100 millions de dollars entre 1985 et 1997. Après la mort de Bongo en 2009 dans un hôpital barcelonais, une élection contestée a fini par établir le fils Bongo comme nouveau leader du pays malgré des accusations de fraudes massives.

Il n’est donc pas surprenant que les supporters de l’opposition gabonaise aient regardé les évènements de Tunisie avec espoir et comme une éventuelle perspective d’avenir. On peut comprendre aussi que les manifestations au Gabon n’aient pas attiré l’attention de la communauté internationale. Le Gabon est une petite nation, avec une population de 1,5 millions d’habitants, et la plupart des lecteurs occasionnels de journaux auraient été incapables de le placer avec précision sur une carte.

Voitures brûlées à Atong Abè, Libreville, le 2 février

Cependant, ce manque d’attention a des conséquences. Alors que les manifestations prenaient place à Libreville, le leader de l’opposition André M’ba Obame – qui avait probablement gagné l’élection de 2009 – et ses conseillers se sont réfugiés dans l’enceinte du PNUD (Programme des Nations Unies pour le Développement), par peur de se faire arrêter par les forces d’Ali Bongo. Selon de récents posts sur Facebook, M’ba Obame et ses conseillers sont confrontés à la pression du PNUD pour évacuer les lieux, et ils ont déjà été obligés de céder leurs téléphones mobiles. Il parait peu probable que le PNUD prenne le risque d’expulser les leaders de l’opposition, qui seraient vraisemblablement immédiatement arrêtés, sachant que le monde les regarde. Or, il ne fait aucun doute que le monde ne regarde pas dans cette direction.

Recherchez “Gabon” dans Google News et vous trouverez que le seul reportage récent sur les manifestations est celui de Global Voices, où Julie Owono, une auteure camerounaise, suit les évènements de près. La version française de Google Actualités est à peine mieux, même si la couverture des évènements est dominée par des journaux locaux comme InfosGabon, et non par les principaux journaux et chaînes françaises.

Bien que nous soyons toujours heureux d’être en tête de la meute avec une histoire comme celle-ci, je vois un schéma embarrassant se dessiner dans la couverture des manifestations populaires autour du monde. Quelques révolutions sont facilement abordables et traitées dans la presse ; il était facile de prédire que les actions de la Révolution verte contre le gouvernement Ahmadinejad seraient reçues avec enthousiasme par les publics américain et européen. Un combat comme celui des chemises jaunes et rouges en Thailande est plus difficile à comprendre par les audiences, et il est moins évident de savoir quel camp bénéficiera de la solidarité des audiences intéressées aux Etats-Unis et en Europe. Enfin, des révolutions des pays lointains et peu connus comme Madagascar sont souvent totalement oubliées, même quand de profonds changements politiques sont à l’oeuvre.

Quand Rebecca MacKinnon et moi-même avons lancé Global Voices en 2004, nous cherchions explicitement à élargir notre couverture d’évènements comme les manifestations au Gabon. Nous pensions que la montée des médias citoyens signifierait que beaucoup plus de voix pourraient faire partie du dialogue des médias, et que les sièges de médias internationaux s’intéresseraient aux gens concernés directement par les évènements, à leurs témoignages et leurs points de vue.
Cela s’est avéré vrai : le mois dernier, notre rédaction a été inondée de demandes d’analyses et de commentaires sur les évènements de Tunisie et surtout ceux d’Egypte, par des médias du monde entier.

Global Voices a connu moins de réussite dans l’accomplissement d’un autre de nos objectifs : changer l’ordre du jour international des médias pour élargir notre couverture. En d’autres termes, nous sommes très bons pour attirer l’attention des différents commentateurs et observateurs sur des évènements que les principaux médias ont décidé de traiter. Mais nous avons eu peu d’opportunités de déplacer l’attention vers des sujets qui sont laissés de côté par le radar des médias, même quand nous avons pu fournir des témoignages et commentaires de terrain.

Notre responsabilité de témoigner

Place Tahrir le 29 janvier

Les technologies des nouveaux médias – pas seulement des médias en ligne, mais aussi la télévision par satellite, qui ont eu une importance cruciale dans la couverture des manifestations en Egypte et en Tunisie – promettent une couverture bien plus approfondie des évènements majeurs qu’avec les médias traditionnels. Je suis reconnaissant à Al Jazeera (en anglais) pour sa couverture exhaustive et continue des évènements égyptiens, et à mon ami Andy Carvin pour sa curation ininterrompue sur Twitter (1) des manifestations tunisiennes et égyptiennes.

Mais j’ai bien peur que ces technologies élargissent le spectre de sujets couverts à l’international, et il me semble que dans beaucoup de cas, nous n’en traitons qu’une portion très étroite, mais avec plus de profondeur. Le danger qui réside à ignorer cette révolution gabonaise ne tient pas simplement au fait que les forces de l’opposition seront arrêtées ou pire. Il tient au fait que nous échouons à comprendre que de profonds changements sont à l’oeuvre à travers le monde et qu’ils changent la nature même des révolutions populaires.

La vague de révoltes qui a enflé en Tunisie ne se cassera pas seulement sur le monde arabe mais sur un espace plus grand de notre planète.

Les actions courageuses de tunisiens lambda n’ont pas seulement captivé l’imagination de peuples subjugués dans le monde arabe, ils ont été partout, une inspiration pour des citoyens désinvestis de leur pouvoir.
Les medias sociaux donnent une voix aux révoltés de Sidi Bouzid et d’Alexandrie, mais pas à ceux de Libreville et de Port Gentil. Alors que les audiences du monde entier regardent avec étonnement les manifestants chrétiens et musulmans prier ensemble sur la place Tahrir, ils se demandent pourquoi les luttes au Gabon ne peuvent recevoir ne serait-ce qu’une fraction de cette attention.
Si l’inspiration qui mène à des révoltes populaires peut venir de n’importe où dans le monde, et que les outils pour couvrir ces luttes sont distribués à chaque personne munie d’un téléphone portable, ceux d’entre nous qui se tiennent loin de ces soulèvements doivent faire face à leur responsabilités.

Nous sommes mis à l’épreuve en étant témoins des luttes de ces peuples, qu’elles aient lieu ou pas dans des pays que nous connaissons déjà et dont nous avons peur. Nous sommes mis au défi de nous assurer que les régimes autoritaires n’écrasent pas les dissidences parce qu’ils savent que personne ne les regarde. De plus en plus, nous possédons les outils qui nous permettent de déplacer notre attention sur les changements révolutionnaires qui prennent place n’importe où dans le monde.
Reste à être à la hauteur de nos responsabilités.

(1) Andy Carvin est un pionnier dans l’organisation en ligne, le data journalisme et les médias sociaux. Il est actuellement senior strategist à la National Public Radio, où il aide la radio à développer ses stratégies numériques. Depuis le mois dernier, il est l’une des personnes les plus intéressantes à suivre sur Twitter. Il a en effet agrégé et édité de nombreux flux d’informations sur les manifestations en Tunisie et en Egypte

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Publié initialement sur le blog d’Ethan Zuckerman sous le titre Tunisia, Egypt, Gabon, our responsability to witness
Traduction : Ophelia Noor
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crédits photos via Flickr : Image de Une Huyguens [cc-by-nc-sa] Omar Bongo ; 3arabawy [cc-by-nc-] Tahrir sq le 29 janvier et Nasr City ; Via Global Voices Julie Owono [cc-by]

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http://owni.fr/2011/02/16/gabon-la-revolution-silencieuse/feed/ 13
Justice pour le web russe http://owni.fr/2010/10/14/justice-pour-le-web-russe/ http://owni.fr/2010/10/14/justice-pour-le-web-russe/#comments Thu, 14 Oct 2010 13:26:33 +0000 Elena Osipova (Trad. Suzanne Lehn) http://owni.fr/?p=31588 Ce billet a été originellement publié sur Global Voices, écrit par Yelena Osipova et traduit par Suzanne Lehn.

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La semaine dernière, la télévision russe pour l’étranger – Russia Today TV (RT) – a diffusé un reportage sur les blogueurs russes et la manière dont ils dévoilent, héroïques, le crime et la corruption dans le système. Extraits de l’article correspondant publié en ligne (en anglais, comme tous les liens):

Ordinateurs de bureau et portables, téléphones et organiseurs…. Internet devient vite beaucoup plus facile d’accès en Russie, et pas seulement pour les loisirs. Pour beaucoup, il s’est transformé en tribune, où leur voix non seulement se fera entendre, mais est assurée de retentir à travers le pays en quelques heures.

Il y a des exemples éloquents de la manière dont les internautes peuvent contribuer à la solution de problèmes complexes. Dans un cas, la vidéo d’un individu publiée en ligne a conduit à son renvoi. Cet homme, à la tête de l’administration locale, malmenait les enfants à l’école mais était resté impuni jusqu’à ce que la vidéo devienne virale.

Et voici l’analyse:

“Ceci ne veut pas dire que les journalistes sont mauvais, et les blogueurs meilleurs,” a souligné Sergueï Dorenko, rédacteur en chef du Service d’Information Russe. “Ni que l’unique notion de libre parole existe en ligne. C’est simplement une question de choix. Nous ne voulons plus regarder le compte-rendu de quelqu’un d’autre, nous voulons – et pouvons – faire le nôtre. Internet nous permet de choisir ce dont nous voulons être informés, à une vitesse que ne peuvent concurrencer ni la presse imprimée ni la télévision.

Mais il y a autre chose:

Dans un autre cas, un blogueur a réussi à atteindre le président russe Dmitri Medvedev pour aider un orphelin, Pacha Berezine. Maître aux échecs, génie des mathématiques et bénéficiant d’une allocation publique, Pacha manque la rentrée scolaire à cause des exigences d’une entreprise de construction qui participe au financement de l’école. “Je veux être informaticien,” a dit le garçon à RT. “Mais l’école a dit que si je veux étudier ici et habiter l’internat, je dois apprendre un métier du bâtiment.” Le cas de Pacha a été pris en main par un organisme caritatif, Murzik.

Son fondateur, German Pyatov, a indiqué que ce qui a fait la différence dans cette affaire, c’était un message qu’il a mis en ligne à l’attention du président. “Après avoir envoyé ma lettre, quelqu’un du bureau du président a appelé et demandé des détails sur le cas,” raconte Pyatov. “Je sais qu’ils ont contacté le collège de Pacha, parce que presque aussitôt, le collège a téléphoné et dit à Pacha de retirer sa candidature et de fiche le camp. Ils étaient épouvantés que les autorités soient intervenues. Puis les média se sont emparés de l’affaire, et le collège a été forcé de mettre fin à ses agissements illégaux. Ils autorisent maintenant Pacha à assister aux cours, mais refusent toujours de lui donner une chambre.”

L’histoire a été diffusée le 20 septembre. Le lendemain, un autre article sur le beau potentiel de la blogosphère russe paraissait sur Russia Beyond the Headlines (‘La Russie derrière les grands titres’, versions en ligne et papier, en coopération avec plusieurs journaux étrangers de premier plan):

L’action d’opposition en Russie concerne désormais moins les figures ou partis politiques que les questions de terrain : voyez les manifestations d’automobilistes ou la campagne de terrain contre la corruption de la police. L’effet de goutte-à-goutte (de la blogosphère aux médias généraux) est particulièrement significatif, car il montre comment les blogueurs ne sont plus seulement une réserve d’une élite urbaine et bien connectée.

A lire de tels articles, on ne peut s’empêcher d’en considérer la source : ces revues sont toutes deux d’Etat et produites, d’abord, en anglais, avec l’objectif d’”aider les étrangers à mieux comprendre la Russie.” Ceci à l’esprit, ce genre d’articles rendraient service à la diplomatie publique de la Russie, surtout au vu des efforts du Président Medvedev pour démontrer au monde que la Russie peut être à égalité avec l’Ouest en termes de progrès technologique, autant que des transformations sociales et économiques qui l’accompagnent.

Vision stratégique

Pourtant, la liberté d’Internet à la Russe semble être un paradoxe qui a récemment attiré largement l’attention. Au début du mois, Tangled Web a essayé d’étudier la “démocratie virtuelle” de la Russie, en référence à un récent rapport de l’U.S. Institute of Peace – Blogs and Bullets – sur le pouvoir des nouveaux médias:

D’entrée de jeu, le rapport fait remarquer que les effets des nouveaux médias sur la démocratie restent mal connus, car la plupart des indices restent fragmentaires et anecdotiques. Mais une phrase, dans la section sur la façon dont les nouveaux médias peuvent agir sur les individus, m’est restée : “les nouveaux médias pourraient rendre les citoyens plus passifs, en les amenant à confondre rhétorique en ligne et action politique substantielle, distrayant leur attention des activités productives.”

Le cyberespace est remarquablement libre en Russie, surtout comparé à la radio-télévision et à la presse écrite, dominées par l’Etat. Et il y a une grande quantité de militantisme de terrain de qualité sur le web en Russie. Mais au lieu qu’Internet soit un facilitateur de la démocratie, il pourrait aussi en être une des plus grandes failles, en rendant possibles un discours et un monde parallèles, vivant et divers, mais au final un faux-semblant.

Et là, il faut citer le rapport 2010 de OpenNet Initiative, dont le profil de pays pour la Russie explique:

L’absence de filtrage manifeste mandaté par les autorités en Russie a conduit certains observateurs à conclure que l’Internet russe représente un espace ouvert et incontesté. En fait, c’est le contraire qui est vrai. Le gouvernement russe est un compétiteur actif du cyberespace russe, qui emploie des stratégies de deuxième et troisième génération comme moyen de modeler l’espace d’information national et mettre en avant les messages et stratégies politiques pro-gouvernement. Cette approche est cohérente avec la vision stratégique qu’a le pouvoir du cyberespace et qui s’articule en stratégies telles la doctrine de la sécurité de l’information.

Pour plus de détails sur ces “approches alternatives” au “management” d’Internet, lire le chapitre du rapport consacré au cyberespace russe. Dans leur essence, elles représentent cependant des mesures discrètes et peut-être mêmes dissimulées, qui ne restreignent pas forcément les libertés plus larges – pour donner une impression générale paisible (ainsi il n’y a pas de “firewalls” ni d’interdiction de certains sites) – tout en prenant la main dans les cas où autoriser trop de liberté est susceptible de répercussions graves.

Plusieurs autres articles “d’actualités” dignes d’intérêt ont traité de la question:

- The Guardian a publié un article optimiste sur “la révolution russe des blogs,” tout en pointant également des exemples d’exploitation possible pour leurs propres intérêts par ceux qui sont aux commandes.

- Le New York Times a présenté une section vidéo spéciale sur le potentiel de l’activisme Internet, et quelques-unes de ses conséquences possibles en Russie.

- La même Russia Today a diffusé un reportage sur la tentative avortée d’un tribunal de Komsomolsk-sur l’Amour, dans l’extrême orient russe, pour bloquer YouTube. Ceci à la suite de la très discutée “nouvelle expérience” du Kremlin : ouvrir le tout récent projet de loi de réforme de la police à l’examen public, en ligne.

Voilà, peut-être, des indices d’un progrès, dont, à l’évidence, on ne peut s’attendre qu’il se réalise du jour au lendemain. Mais ils peuvent tout aussi bien être des exemples de ce que le Tangled Web a caractérisé comme “un courant de pensée ancien en Russie, pour lequel le tsar était fondamentalement honnête, et ce sont les fonctionnaires intermédiaires corrompus qui étaient les fautifs pour tout.”

Il ne faut pas oublier toutefois que la démocratie – réelle ou virtuelle – s’avère, encore et toujours, chose très relative. Lorsque même certaines démocraties occidentales les plus éminentes ont de gros problèmes sur l’accès à Internet et sa surveillance, ne devrait-on pas juger la Russie avec moins de sévérité? Mais pourquoi pas, au fond, si c’est l’objectif qu’elle s’est elle-même fixé?

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Crédits photo: Flickr CC rafaelmarquez, bob_rayner

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Une initiative en Inde : le site “J’ai payé un pot-de-vin” http://owni.fr/2010/10/02/une-initiative-en-inde-le-site-%e2%80%9cjai-paye-un-pot-de-vin%e2%80%9d/ http://owni.fr/2010/10/02/une-initiative-en-inde-le-site-%e2%80%9cjai-paye-un-pot-de-vin%e2%80%9d/#comments Sat, 02 Oct 2010 07:00:38 +0000 Namita Singh (Trad. Fatima Touati) http://owni.fr/?p=30076 Ce billet a été originellement publié sur Global Voices, écrit par Namita Singh et traduit par Fatima Touati.

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C=M+D-R. Comme l’économiste Robert Klitgaard [liens en anglais] le dit :

Corruption = Monopole + Discrétion – Responsabilisation.

La corruption, surtout politique, est monnaie courante en Inde, et les citoyens y font face dans leur vie de tous les jours. Cela mène à de sérieuses injustices dans la société et peut même être une question de survie pour certains. Dans son récent ouvrage New Tactics Dialogue on corruption, Shaazka Beyerle, conseillère principale du Centre International des Conflits Non-violents, donne l’exemple d’une veuve qui n’a pas accès à la nourriture distribuée par le système public d’aide alimentaire, parce que les représentants de l’Etat lui demande un pot-de-vin pour obtenir sa carte de rationnement. Les citoyens qui ne peuvent se permettre de verser l’argent en souffrent, et ceux qui peuvent n’ont pas d’autres options que de céder à la corruption. La colère et la frustration envers la corruption n’a cessé d’augmenter, mais, parallèlement, la pratique est également très largement tolérée. Certains offrent des pots-de-vin en échange de services, ce qui ne fait qu’aggraver la corruption.

Un site web contre les pots-de-vin

J’ai payé un pot-de-vin (I Paid A Bribe) essaye d’aborder ce sujet complexe qui détériore la société indienne. Il encourage les gens à ne pas se soumettre aux abus de pouvoir, et à leur raconter leurs histoires de corruption, pour mettre au jour les prix du “marché” de la corruption. Les gens peuvent raconter leurs histoires,  s’ils ont payé un pot-de-vin, ou non, ou encore s’il ne leur en a pas été demandé. Tout cela  à travers un formulaire, sur le blog, ou même en téléchargeant une vidéo.

Cette initiative organisée par Janaagrah, a été lancée le 15 août (Jour de l’Indépendance de l’Inde) 2010. T R Raghunandan, un ancien cadre de la fonction publique, et aujourd’hui coordinateur de l’initiative, déclare que le but est “d’obtenir un instantané de l’état de la corruption en Inde”. Janaargraha a développé une tactique innovante pour s’attaquer à la corruption. L’idée consiste à ne pas se focaliser sur des actions directes envers les institutions, basées sur des témoignages, mais plutôt d’utiliser un processus systématisé pour identifier les secteurs où la corruption est la plus forte. Raghunandan remarque que “chaque société a une idée très précise de la corruption qui s’y déroule”; ce dont on a besoin, c’est donc de comprendre comment et pourquoi la corruption sévit. Les histoires publiées sur le site sont regroupées et analysées. Ces analyses font apparaitre les institutions les plus corrompues, les failles utilisées par les fonctionnaires pour demander des pots-de-vin, les situations dans lesquelles un pot-de-vin est demandé, etc. Après avoir identifié les situations à risque et les processus qui mènent à la corruption, Janaagraha rencontre ces institutions ainsi que le gouvernement pour qu’ils prennent des mesures. L’illustration suivante schématise le processus.

Cartographier la corruption en crowdsourcing

Le but de I Paid A Bribe est d’encourager toujours plus de citoyens à venir raconter leurs histoires et expériences, ce qui permet d’accroître la prise de conscience. Outre des signalements de corruption, la page principale du site présente un diaporama regroupant des statistiques essentielles. Une carte intitulée “Corruption Commons” situe le nombre de plaintes dans différents états du pays.  L’importance du sujet est révélée à travers ces différents moyens, faisant passer la corruption et les pots-de-vin de quelque chose dont tout le monde se plaint, à un problème contre lequel les gens ont un moyen d’agir. Les internautes peuvent agir au travers d’un procédé simple, et sûr, où il ne leur est pas demandé de s’identifier ou de donner les noms des fonctionnaires dénoncés dans leurs signalements.

Raghu informe sur les bonnes procédures

Autre élément interactif et intéressant, la section “Demandez à Raghu”. Raghunandan répond personnellement aux questions adressées et fournit les informations dont les personnes ont besoin. Il explique que ses correspondants ont en général très peur du gouvernement, ce qui est essentiellement dû à un manque d’informations. Il devrait y avoir plus d’informations disponibles pour que les gens puissent se sentir plus en confiance face aux fonctionnaires, insister pour suivre la procédure établie et ne pas verser de pots-de-vin. Il est également prévu de publier des livres blancs. Le premier, qui sortira dans un mois,  concernera la loi foncière et les titres de propriété, avec une vidéo explicative, pour que les citoyens connaissent le véritable fonctionnement des procédures, le montant des frais officiels, le temps d’attente, et les obligations des responsables. La section “Impacts” contient la liste des cas où des personnes ont réussi a s’opposer à la corruption grâce aux informations fournies par Janaagraha, et simplement en faisant entendre leur voix.

Les internautes indiens peuvent également faire part de suggestions sur le forum du site et contribuer à l’élaboration de nouvelles pratiques et tactiques pour combattre la corruption.  Au travers de cette plateforme, les citoyens peuvent partager leurs expériences de la corruption, ils peuvent décider de lutter contre  les injustices dont ils sont victimes, et collaborer pour les combattre.

Donc, “Vous avez versé un pot-de-vin ? Ou non ? Vous vous sentez impuissant ? Victimes ? En colère ? Racontez nous votre histoire” et ripostez !

Illustration CC FlickR : jon smith ‘una nos lucror’

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http://owni.fr/2010/10/02/une-initiative-en-inde-le-site-%e2%80%9cjai-paye-un-pot-de-vin%e2%80%9d/feed/ 1
Brésil : les projets pour plus de transparence pour les élections 2010 http://owni.fr/2010/09/20/bresil-les-projets-pour-plus-de-transparence-pour-les-elections-2010/ http://owni.fr/2010/09/20/bresil-les-projets-pour-plus-de-transparence-pour-les-elections-2010/#comments Mon, 20 Sep 2010 10:27:27 +0000 Manuella Ribeiro (trad. Jean Saint-Dizier) http://owni.fr/?p=28607 Ce billet a été originellement publié sur Global Voices, écrit par Manuella Ribeiro et traduit par Jean Saint-Dizier.

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La réforme de la loi électorale brésilienne, approuvée en 2009, va avoir un impact positif sur les élections générales qui se profilent à l’horizon d’octobre 2010 :  elle va offrir un accès à plus d’informations que jamais. Ainsi, un grand nombre de projets de transparence émergeant de la société civile, du secteur privé ainsi que du secteur public sont en train de travailler ensemble, utilisant activement les outils des nouvelles technologies dans le but d’améliorer la visibilité de l’élection et d’impliquer au maximum les citoyens dans la prochaine célébration de la démocratie.

En octobre, quelques 135 millions [liens en portugais] de Brésiliens voteront pour élire le président, les gouverneurs, sénateurs et députés fédéraux des différents d’états ou de districts. L’année dernière, la Réforme électorale a ouvert les portes à la politique 2.0 en autorisant les partis à faire usage des réseaux sociaux (Twitter, Facebook etc.) pour mener des campagnes d’appel aux dons et participer à des débats en-ligne.

Avant les élections, de multiples discussions étaient déjà en marche sur des questions telles que la transparence, l’engagement civique et la surveillance des politiques publiques. Google a créé une plateforme pour l’élection, compilant des renseignements sur les candidats aux présidentielles et présentant une carte interactive du résultat des élections depuis 1994, centralisant également les initiatives les plus dynamiques de la société civile: Campanha Ficha Limpa (“Campagne Fiche Propre”), Excelências (“Excellences”), Movimento Voto Consciente (“Mouvement pour un vote conscient”), VotenaWeb (“Vote sur le web”), and Eleitor 2010 (“Électeur 2010”).

La plateforme de Google encourage les électeurs à poser des questions à leurs candidats en passant par YouTube channel. Les candidats répondront à la télévision aux meilleures d’entre elles, choisies par les utilisateurs.

Paula Góes, éditrice sur le site multilingue Global Voices, écrit à propos de la Campagne Ficha Limpa: “Le projet de loi Ficha Limpa (casier judiciaire vierge, littéralement “Fiche Propre“)… cherche à empêcher les politiciens ayant commis un crime grave, tel qu’abus de biens publics, corruption, meurtre et trafic de drogues, de se présenter à des élections.” Le Movimento de Combate à Corrupção Eleitoral [Mouvement de combat à la corruption électorale] a commencé la campagne en 2008 et préparé le terrain (au Brésil, tout citoyen peut proposer une loi si celle-ci obtient un nombre de signatures suffisant).  Avaaz.org a joué un rôle important dans la collecte des signatures ainsi qu’en mettant la pression sur les législateurs pour qu’ils approuvent la loi. Celle-ci a été promulguée par le président Luiz Inácio Lula en Juin 2010.

Le tribunal Supérieur Électoral a décrété la validité de la loi Ficha Limpa et précisé qu’elle était exécutoire pour les élections 2010. Suite à cette décision, les initiateurs de la campagne ont mis en ligne un site dont le but est de vérifier si des candidats sont en règle avec la loi avec, en plus, la possibilité de visionner les données recueillies et des nouvelles glanées dans les médias. Le site propose aussi un formulaire pour signaler tout comportement douteux des candidats.

Si un candidat souhaite entrer dans la liste du site Ficha Limpa, il ou elle doit tenir sa promesse de transparence tout au long de la campagne en présentant un rapport hebdomadaire sur ses dépenses ainsi que d’autres informations. Quarante candidats sont déjà enregistrés.

Vote Conscient est une association fondée en 1987. Elle a pour objectif de consolider la participation citoyenne en informant les électeurs sur les politiciens et leurs compétences. Ils disposent aussi d’un site web pour présenter ces informations et les nouvelles relatives à l’association. Ils font preuve d’une grande activité en-ligne, telle que participation aux réseaux sociaux, publications et vidéos. Par exemple, le  mouvement dans la ville de Jundiai a publié un document sur 16 candidats-députés de différents états et des renseignements sur la manière d’utiliser Internet pour surveiller les hommes politiques ou proposer des solutions aux problèmes rencontrés par leur villes.

Les autres projets présentés par la plateforme de Google ont servis de cas d’études pour  Technology for Transparency Network. VotenaWeb a été étudié pendant la première phase de notre recherche, tandis que Excelências et Eleitor 2010 seront à leur tour présentés dans les prochaines semaines.

Votenaweb permet aux citoyens de comparer leurs votes, sur les projets de lois du congrès, à ceux des politiciens. A partir d’une interface claire, les projets de lois sont traduits en langage simple, dans un contexte clairement défini, tout comme les conséquences qu’elles induisent. En plus de constituer des archives sur les votes sur certains projets de lois en particulier, les utilisateurs peuvent aussi interagir avec la classe politique en votant symboliquement pour ou contre à chaque votation. Cet outil aide les citoyens à choisir pour qui voter en leur permettant de remonter dans l’historique des votes des candidats sur plusieurs années (NdT: de manière à apprécier  l’activité de leur candidat).

Excelências a été créé en 2006 par Transparência Brasil (“Transparence Brésil”). Excelências se sert d’internet pour produire de l’information sur les parlementaires brésiliens et la rendre accessible au public. Ils utilisent des données officielles pour augmenter la transparence des 2 368 politiciens. De la même manière que VotenaWeb, Excelências aide les citoyens à prendre des renseignements sur les candidats aux élections de 2010.

Les collaborateurs de Global Voices Paula Goes et Diego Casaes sont les coordinateurs de Eleitor 2010.

Eleitor 2010 (”Elector 2010″), qui a récemment fait l’objet d’un billet sur Global Voices par Janet Gunter, entend surveiller les élections 2010 au Brésil. Le projet fait également usage d’internet pour recevoir les plaintes sur les irrégularités observées pendant la campagne. Il (le projet) tire profit de la plateforme de crowdsourding Ushahidi pour documenter et situer sur des cartes les informations soumises par les citoyens via SMS, e-mails, Twitter et d’autres réseaux sociaux. Les coordinateurs sont Paula Goes et Diego Casaes, tous deux de Global Voices.

De multiple projets au Brésil traquent le comportement des candidats et surveillent le travail des politiciens après leur élection. Congresso Aberto (“Congrés ouvert”) permet de visualiser et analyser des données officielles en provenance du Congrès brésilien. Sur Cidade Democratica (“ Démocratique City”), les citoyens alimentent et discutent des questions municipales et des solutions possibles, tout comme ils débattent des propositions des candidats et visitent leurs profils en ligne. Enfin, Adote um Vereador (“Adoptez un politicien”, plus précisément, un conseiller municipal) encourage les citoyens brésiliens à bloguer pour rendre compte du travail de leur élu officiel local afin de le tenir pour responsable (NdT: de ses actes). Bien qu’aujourd’hui Adote um Vereador s’intéresse  plus particulièrement  aux politiciens locaux, Milton Jung, l’un des fondateurs, espère étendre le projet aux politiciens nationaux bientôt élus en octobre.

Autres projets

Un grand nombres d’autres initiatives sont aussi à l’œuvre en ce moment au Brésil pour développer la participation citoyenne :

  • 10 Perguntas (“10 Questions”): Jusqu’au 03 septembre, les citoyens peuvent envoyer des questions au candidats à la présidentielle. Après cette date, les candidats répondront aux 10 meilleures questions choisies par les utilisateurs
  • Eu lembro (“Je me rappelle”): Ce site recherche des informations sur tous les candidats dans les réseaux sociaux tels que Twitter, Wikipedia, Busk et YouTube. Il fournit aussi une plateforme sur laquelle les utilisateurs peuvent échanger sur les candidats.
  • Quanto vale seu candidato? (“Combien vaut ton candidat ?”): Ce site permet aux citoyens de visualiser le patrimoine de divers candidats.
  • Voto Certo (“Vote Bien”): Ce site contient des information sur les élections 2010, telles qu’une liste des candidats, les financements de campagne, et une carte des campagnes électorale ainsi que leur calendrier.

Conclusion

Les prochaine élections sont marquées au sceau de la plus grande utilisation d’internet jamais vue au Brésil, tant par les candidats que par les citoyens. Par exemple, tous les candidats à la présidentielle ont un compte Twitter ou sur d’autres réseaux sociaux. Le premier débat en ligne de la campagne électorale, organisé par un fournisseur d’accès à internet, a dépassé les 1,7 million de spectateurs et il a gardé la tête des Trending Topics sur Twitter pendant toute sa durée.  Ces outils ne sont pas réservés aux candidats et aux médias. Certaines ONG, des citoyens et des entreprises font de même dans le but d’améliorer leur accès à l’information sur les candidats ou pour superviser la campagne. La plateforme de Google publie une bonne partie de ces expériences.

Si tout se passe bien, outils technologiques et connectivité vont aider le Brésil à élire les meilleurs hommes politiques pour les quatre prochaines années et à créer une base de données sur ces politiciens, ce qui gardera éveillé leur sens des responsabilités pour leurs actes au gouvernement. Malgré une expérience relativement courte de ces outils, on peut dire que grâce aux prochaines élections, Internet, au Brésil, va s’ancrer comme un des espaces les plus importants pour divulguer de l’information sur les candidats et sur leurs actions au gouvernement.

Photos CC Global Voices et FlickR CC : The World Wants a Real Deal

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Japon: casser le monopole de l’information http://owni.fr/2010/07/08/japon-casser-le-monopole-de-linformation/ http://owni.fr/2010/07/08/japon-casser-le-monopole-de-linformation/#comments Thu, 08 Jul 2010 11:41:07 +0000 Scilla Alecci, trad. Fabienne Der Hagopian http://owni.fr/?p=21351

[Liens en anglais sauf mention contraire] Pendant que les citoyens de nombreux pays découvrent comment se servir des nouvelles technologies pour se faire entendre, au Japon, ce sont les journalistes freelance qui défient les médias de l’establishment, dont ils entendent bien se démarquer.

Il faut savoir qu’au Japon le flux de l’information était jusqu’à présent contrôlé par un système appelé le “kisha club”.

La traduction littérale de kisha club est “club des journalistes” ou “club de la presse” et  décrit les “cellules d’information” qui sont présentes dans quasiment toutes les institutions publiques telles que les ministères, la police, les administrations d’entreprises, etc.,  et dont l’une des fonctions est de gérer les conférences de presse des institutions qu’ils couvrent.

Comme le détaille leur charte :
“À une époque où des informations fiables réunies selon des méthodes sérieuses et basées sur le code de l’éthique des médias sont de plus en plus recherchées, les kisha clubs ont la responsabilité sociale de contrôler l’exercice du pouvoir public par les officiels et de rechercher la transparence de l’information provenant des institutions publiques.  C’est la responsabilité des membres du kisha club et des participants à leurs conférences de remplir ce rôle important.”

Seuls les journalistes travaillant pour quelques médias traditionnels sont autorisés à être membres et, par conséquent, à assister aux conférences organisées par les kisha clubs.
Les journalistes freelance – et souvent les média étrangers – en sont exclus.  S’ils sont autorisés à assister à ces conférences, ils ne peuvent pas poser de questions.

Twitter et Ustream

Le 13 février Takashi Uesugi [en japonais], l’un des journalistes indépendants les plus populaires au Japon, qui demande l’ abolition du système du kisha club, tweetait [en japonais] :

Twitter et Ustream ont contourné les clubs de la presse qui jusqu’à présent monopolisaient la dissémination de l’information. Les modalités du fonctionnement du système du kisha club ne sont même pas connus au Japon. Refuser l’anonymat du pouvoir public est une règle évidente du journalisme.

Signe d’un changement de cap, des représentants du gouvernement élu l’année dernière ont décidé d’ouvrir leurs conférences de presse à tous les journalistes professionnels.  Ceux des médias en ligne ont saisi l’opportunité et commencé immédiatement à couvrir les conférences de presse avec l’équipement leur permettant de diffuser en direct.

En septembre dernier, Tetsuo Jimbo, un vidéo-journaliste vétéran, éditeur et PDG de videonews.com rapportait cette nouveauté : une conférence de presse ministérielle ouverte à tous les journalistes professionnels. “Annonçant le principe de base de cette nouvelle politique, M. Okada, ministre des Affaires Étrangères, déclarait : ‘En principe, j’ouvrirai (les conférences de presse) à tous les médias, y compris ceux qui ne font pas partie du kisha club [de ce ministère].’
[…] Jusqu’à aujourd’hui, les journalistes d’un groupe qui avait un kisha club devaient déjà réussir à y être admis et en raison des politiques internes de chaque compagnie, ne pouvaient pas assister à tous les événements de leur choix.

Maintenant, et selon la nouvelle politique, [à part les journalistes indépendants, les journalistes de magazines et des médias en ligne] tous les journalistes qui travaillent pour une organisation membre peuvent assister à n’importe quelle conférence.  Cela veut dire que, par exemple, un journaliste de Asahi qui fait partie d’un certain club n’aura pas à avoir de regrets s’il souhaite assister à une conférence d’un autre club que celui auquel il est assigné. Ou un directeur de la chaine NHK qui travaille pour des shows comme Close Up Gendai ou NHK Special ne sera pas gêné pour filmer ou assister à une conférence d’un autre ministère par un collègue journaliste NHK qui couvre habituellement ce ministère. Et ces incidents ridicules (parce qu’il y en a eu) ne se produiront plus.”

Conférence de presse en direct

L’outil en ligne de retransmission vidéo Ustream, en particulier, a servi de source alternative pour contourner le filtrage du flux d’informations par les média traditionnels.

Un autre cas bien connu est celui du populaire site de partage de vidéos Nico Nico Douga qui jusqu’à l’année dernière offrait une retransmission en direct à ses utilisateurs [en japonais]. Le staff assiste maintenant régulièrement à la conférence de presse hebdomadaire du ministère des Affaires étrangères et offre l’opportunité aux utilisateurs de communiquer avec le présentateur. Non seulement ils peuvent assister à l’évènement en direct, mais ils peuvent aussi poser des questions sur une page web. Les questions sont reprises par le staff de Nico Nico Douga et posées au ministre. D’après le site de Nico Nico Douga [en japonais], leurs utilisateurs ont ainsi pu poser des questions sur les bases militaires américaines, les activistes de l’ONG Sea Shepherd, le soutien de l’Afghanistan par le Japon etc.

[Retransmission en direct de la conférence du ministre des Affaires étrangères Okada sur Ustream par Yasumi Iwakami le 29 juin] (en japonais)

Le blogueur nob1975 commente l’opportunité que les citoyens et les internautes japonais ont maintenant de voir les conférences de presse avant que la télévision et la presse ne les traitent et ne les filtrent :
“Maintenant, les citoyens ont une chance d’accéder à  la source de l’information.  Je me demande s’il y a jamais eu une telle opportunité par le passé ?  Nous vivons une époque où les politiciens peuvent parler directement aux citoyens sans passer par les kisha clubs ou participer à des “programmes d’information” qui font partie des programmes de divertissement, à des spectacles de variété qui traitent les sujets politiques comme un sujet de divertissement ou à des “talk shows” où le présentateur mène la conversation.
Je pense que c’est merveilleux.
[…]
J’ai l’impression d’avoir vécu un des ces moments fondateurs d’une nouvelle époque.”

Des journalistes indépendants comme Takashi Uesugi, cité précédemment, ou le journaliste très admiré Yasumi Iwakami [en japonais] se sont aussi servis de Ustream pour créer des débats ouverts spécifiquement sur le “système des kisha clubs”, pour attirer l’attention des japonais sur la nature souvent biaisée et limitée des informations qu’ils reçoivent.  Un exemple est le débat entre Uesugi et l’économiste Nobuo Ikeda [en japonais] sur “les fuites organisées par la police dans les média”.

Voici ce que l’on peut lire sur le profil de Iwakami sur Ustream :

“Le journaliste libre Yasumi Iwakami, va partout, interviewe tout le monde et, quand c’est possible, transmet l’information directement : interviews, débats, conférences de presse, etc.”

Enfin, Hiroshi Hirano, éditeur du magazine quotidien par email Electronic Journal, qui critique le monopole de l’information comme contraire aux principes de la démocratie, met en garde contre les dangers créés par le pouvoir des médias :

“Si une source a le monopole de l’information, elle devient une forme de pouvoir et peut facilement être manipulée par les politiciens ou les bureaucrates dans leur propre intérêt.”

Billet initialement publié sur Global voices sous le titre “Japon : les journalistes freelance utilisent les NTIC pour contourner le monopole de l’information”

Image CC Flickr purplemattfish

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Chine: campagne pour l’utilisation des vrais noms sur Internet http://owni.fr/2010/06/18/chine-campagne-pour-lutilisation-des-vrais-noms-sur-internet/ http://owni.fr/2010/06/18/chine-campagne-pour-lutilisation-des-vrais-noms-sur-internet/#comments Fri, 18 Jun 2010 09:44:37 +0000 Fabienne Der Hagopian http://owni.fr/?p=19277 Ce billet a été publié en anglais par Oiwan Lam sur Global Voices Advocacy, l’un des sites de Global Voices, destiné à défendre la liberté d’expression en ligne et à combattre la cyber-censure.


Pour beaucoup d’internautes, l’enregistrement en ligne des véritables identités est considéré comme une atteinte à la vie privée.  Pourtant, en Chine, de nombreux activistes des droits des citoyens font campagne pour l’utilisation des vrais noms en ligne, pour éliminer la peur.

En mars, un activiste du Net, Zhan Lifan a écrit un article “Confession d’un internaute à découvert” [en anglais] pour défendre l’utilisation des identités réelles sur le web.

Dimanche 13 juin, Ai Weiwei a aussi lancé une campagne sur Twitter pour l’utilisation des vrais noms. Il pense que s’exprimer en utilisant son vrai nom est le premier pas pour éliminer la peur (via voa) :

“这是必要的一步。当然你不走这一步,你可以永远地匿名。但我认为一个人如果只指责当局,只指责政府是不够的。每个人的回 避,每个人的掩盖,和这种怯懦, 才造成极权的傲慢。我们都需要公开地谈话,透明地执政,透明地来谈话。如果我们不鼓励这些东西,仅仅生活在某种恐惧,而且很多时候我认为这种恐惧被夸张, 那么这将是无济于事的。”

C’est une étape nécessaire. Bien sûr, vous pouvez rester anonyme toute votre vie. Cependant, critiquer le gouvernement n’est pas suffisant. Le fait que nous cachions nos identités, que nous ayons peur de ce que nous disons donne du pouvoir à l’autorité de l’État. Il faut que nous parlions en public avec transparence et demandions la même chose du gouvernement. Si nous n’encourageons pas cette attitude et continuons à vivre dans la peur, cette peur sera renforcée et nous ne pourrons pas faire changer les choses.

“当局怎么可能抓每一个人呢?这是不可能的嘛。如果说每个人都公开说出自己的观点,怎么可能(都抓)呢? 我觉得当局不是铁板一块吧。我觉得任何人,当他看到大多数人都有这个意图的时候,他也会尊重民意一些。”

L’État ne peut pas tous nous arrêter. Cela devient simplement impossible si tout le monde exprime son opinion publiquement. L’autorité n’est pas un bloc immuable, s’ils se rendent compte que tout le monde fait la même chose avec les mêmes motivations, il faudra qu’ils respectent l’opinion du peuple.
En moins d’une journée, des centaines d’internautes chinois ont rejoint le mouvement et publié leur véritable nom en ligne.

L’avocat des droits humains Pu Zhiqiang remarque que si un internaute chinois utilise son vrai nom, il reçoit plus de soutien de la part du public (via voa).

“你不用真名,谁都不知道你,但是政府想知道你的时候还是一下子就能知道你,你防备不了公安的网监。它会找到你。更重要的 是,你因为不用真名,你不太容易得到民众或者网友的关注和支持,因为大家不知道你是谁。”

Si vous n’utilisez pas votre vrai nom, personne ne sait qui vous êtes mais le gouvernement peut facilement vous retrouver. Il est impossible d’échapper à la police de la sécurité et à la police d’internet. Qui plus est, si vous n’utilisez pas votre véritable identité, il est difficile d’attirer l’attention du public. Les gens veulent savoir qui vous êtes.

Billet initialement publié sur Global Voices en français ; image CC Flickr The man with the golden cam

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#ijf10: Langues, la dernière frontière http://owni.fr/2010/04/26/ijf10-langues-la-derniere-frontiere/ http://owni.fr/2010/04/26/ijf10-langues-la-derniere-frontiere/#comments Mon, 26 Apr 2010 14:05:28 +0000 Marc Mentré http://owni.fr/?p=13617
Pourquoi les grands médias ne font-ils pas attention à la traduction? Pourquoi ne cherchent-il pas à traduire leurs contenus pour gagner plus d’argent? Aujourd’hui, le même site peut être lu à Barcelone ou en Californie.

La question de Marc Herman, de Translation Exchange Project, devait rester sans réponse, au cours du débat “combler le fossé entre les différentes cultures et langages”. Question de coût, certainement, lorsqu’il faut payer des traducteurs professionnels, mais aussi sans doute une question de culture pour les mainstream medias, et les journalistes qui y travaillent.

Pourtant, des solutions alternatives se mettent en place.

“La traduction est au cœur de Global Voices“, raconte Portnoy Zheng, un Taïwanais qui traduit de l’anglais vers le chinois, pour ce réseau.  À l’opposé de Google, qui développe à marches forcées son système de traduction automatisée, sur Global Voices, la traduction demeure affaire humaine.

L’une des raisons? La diversité des langues.

“Si vous traduisez un texte du français à l’anglais de manière automatique, explique P. Zheng, vous obtiendrez un résultat acceptable, mais si vous le faites du chinois au bengali —ou l’inverse—, ce sera épouvantable.” Problème lorsque l’on sait que le Chinois est l’une des principale langue véhiculaire du monde, ainsi que le bengali, considéré comme la 4e langue parlée.

L’avenir appartient sans doute à la “traduction sociale”

La traduction humaine est donc plus efficace, mais si l’on a recours à des professionnels, elle est hors de prix. L’alternative se trouve donc raconte David Sasaki, de Rising Voices (une extension de Global Voices) dans la traduction sociale [social translation]. Rien de particulièrement récent, puisqu’elle “existait avant Internet, avec la scanlation”. Ce terme a été forgé lorsque des amateurs de mangas japonaises ont scanné leurs BD favorites, en ont traduit les textes, avant de les diffuser le plus souvent gratuitement.

Ce sytème de traduction “amateur” fleurit, en particulier en Chine. Il existe des sites comme zona europa, où la traduction se fait de l’anglais au chinois et réciproquement, ou encore yeeyan.org, qui publie des articles provenant des sites de presse étrangers, et dont la traduction est le fait de volontaires.

Un système qui frise l’illégalité, en particulier vis-à-vis des ayants-droits de copyright et des droits d’auteur. Mais un système qui peut être récupéré par les grands groupes. Ce fut le cas avec TED, le site de high tech américain, qu’un groupe de jeunes Chinois avaient décidé de traduire de manière sauvage. Après avoir protesté, les responsables du site américain ont décidé de rencontrer ces traducteurs improvisés, pour finalement autoriser le projet.

Il existe d’autres modes mixtes, panachant la traduction automatique et la relecture humaine comme meedan, qui traduit de l’anglais à l’arabe et inversement. Ce type de système peut aussi servir à soutenir des langues qui n’ont pas de présence sur le web comme l’aymara, une langue utilisée par les indiens en Bolivie notamment. Comme le souligne David Sassiki: 

La question est très importante dans ce pays car cette langue n’est pas enseignée dans les écoles. L’objet de jaqui aru, est donc de proposer les informations traduites de l’espagnol, dans cette langue locale. Il est très important que ce type d’initiatives existent, sinon seules quelques langues domineraient Internet.

L’anglais est la langue “pont” entre toutes les autres langues

Une langue reste incontournable sur le web, l’anglais. “C’est le pont [bridge]“, résume Bernardo Parella, du Global Voices italien. Les traductions se font en général dans cette langue avant d’être traduite dans une autre et vice et versa.

Mais c’est une langue difficile, peu pratique, “bizarre” même indique Marc Herman. C’est pourtant sur ce pont branlant que passe la majeure partie des traductions, ce qui pose la question de la qualité, d’autant que, dans un système amateur, le recrutement des traducteurs se fait sur la base du volontariat, selon des parcours souvent atypiques.

Par exemple, raconte Portnoy Zheng, “j’ai d’abord été un lecteur de Global Voices, avant de traduire, parce que je n’étais pas satisfait de la presse de mon pays, et en particulier de la manière souvent anecdotique dont on y traitait l’information internationale”.

Il commencera donc à traduire quelques articles de l’anglais vers le chinois, avant de s’inscrire plus complètement dans le projet Global Voices. En fait, explique-t-il, nous avons mis en plateforme wiki pour la traduction en chinois, qui fonctionne de la façon suivante : il y a d’abord une traduction originelle du texte en chinois, qui est relue ensuite par un autre traducteur, avant d’être publiée.

Pour l’instant, l’essentiel des traductions porte sur le texte, et la vidéo est peu traduite, voire simplement soustitrée. Par exemple, remarque Marc Herman:

lorsque j’ai vu la vidéo qui montre des militaires américains tirer à partir d’un hélicoptère sur un petit groupe de personnes en Irak, dont deux correspondants de Reuters, je pensais qu’elle serait traduite le lendemain dans 100 langues. Or, ce ne fut pas le cas.

Pour résoudre ce problème des réseaux de traduction devraient aussi se mettre en place. En Italie, existe déjà une importante communauté qui sous-titre en italien les séries américaines. “Le même système pourrait être transposé pour l’information”, indique Nicola Bruno de Totem, un agence d’information.

Article rédigé à partir de la conférence “Créer un pont online entre les différentes cultures et langues” (“Bridging the gap between different cultures et languages online”) avec la participation de

Nicola Brun, Totem
Marc Herman, Translation Exchange Project
Bernardo Parrella, editor Global Voices Italy
David Sasaki, Rising Voices
Portnoy Zheng, co-director Project Lingua

> Marc Mentré tient le blog The Media Trend

> Illustration CC par magdalar sur Flickr

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http://owni.fr/2010/04/26/ijf10-langues-la-derniere-frontiere/feed/ 10
Iran: les blogs sont-ils moins populaires depuis la présidentielle? http://owni.fr/2010/04/19/iran-les-blogs-sont-ils-moins-populaires-depuis-la-presidentielle/ http://owni.fr/2010/04/19/iran-les-blogs-sont-ils-moins-populaires-depuis-la-presidentielle/#comments Mon, 19 Apr 2010 09:54:50 +0000 Lester Bolicenni http://owni.fr/?p=12565

La prétendue “révolution Twitter” pourrait n'être qu'un phénomène des médias occidentaux. Image CC Flickr dougcurran

Onze blogueurs et professionnels des médias iraniens représentatifs de différents segments du spectre politique ont répondu à un questionnaire sur les évolutions des médias citoyens en Iran depuis les élections.

Avant l’élection présidentielle de juin 2009, les piliers les plus dynamiques des médias citoyens en Iran étaient YouTube et les blogs. L’élection et la crise qui a suivi ont favorisé l’apparition de Facebook et de Twitter comme les nouveaux et principaux moyens de communication des internautes. Pendant une courte période durant les élections, le gouvernement iranien avait bloqué l’accès à Facebook, YouTube, Twitter et plusieurs autres sites internet. Certains, dont un influent blogueur islamiste [en farsi], ont parlé d’une erreur de stratégie qui a permis à l’opposition iranienne de dominer le monde virtuel. Malgré les efforts du régime pour filtrer les sites de médias sociaux, ils sont devenus une puissante plateforme de communication pour le Mouvement Vert.

L’élection présidentielle en Iran a-t-elle fait évoluer les outils et les moyens de communication des médias citoyens ? Facebook et Twitter sont-ils les acteurs dominants ? Les blogs sont-ils graduellement devenus une seconde voie pour  le partage des idées ? Quels moyens de communication les militants politiques utilisent-ils le plus ?

L’auteur de ce billet a invité un blogueur islamiste faisant autorité ; trois blogueurs “verts” ; un blogueur écologiste influent ; cinq personnalités des médias; et un blogueur militant, à participer à une enquête qui se présente sous la forme d’un questionnaire à choix multiples. Un panel de onze internautes ne sera jamais représentatif de l’entière blogosphère iranienne, mais il s’agit d’une première étape vers une meilleure compréhension.

1- Quels sont les sites que vous visitez régulièrement depuis l’élection présidentielle ?

Facebook est le préféré avec six points, Twitter dernier avec un point. Les blogs ont obtenu deux points et FriendFeed, à l’instar de YouTube, trois points.

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2- Selon vous, quels sont les sites que les militants politiques et de la société civile utilisent ?

Les blogs restent les rois avec six points, Facebook obtient trois points, YouTube deux points, FriendFeed un seul et Twitter zéro. Un seul a répondu aucun.

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Six de nos internautes considèrent que la popularité des blogs après l’élection présidentielle n’a pas changé, deux pensent qu’ils sont devenus plus prépondérants, tandis que trois jugent que leur importance a diminué.

Parmi ces derniers, deux considèrent que l’influence des blogs a diminué en raison de la popularité croissante de Facebook, le troisième explique cela par la baisse d’activité des blogueurs.

3- Quel(s) est(sont) le(s) site(s) que vous préférez pour discuter de vos sujets favoris ?

Les blogs sont cités à quatre reprises, Facebook six fois, FriendFeed trois fois et Twitter une fois.

En résumé, on constate à la lecture de cette enquête que les internautes iraniens, après l’élection présidentielle, sont devenus plus visibles, et que Facebook est devenu l’endroit à fréquenter pour beaucoup, y compris pour les responsables politiques. L’enquête démontre aussi que la prétendue “révolution Twitter” [en anglais] (tout du moins selon nos onze participants) pourrait n’être qu’un phénomène des médias occidentaux plutôt qu’une conséquence durable dans le monde virtuel iranien. Les blogs restent encore un endroit précieux mais sont en train de perdre l’intérêt des nouveaux arrivants. On peut dire qu’une certitude demeure après l’élection présidentielle, celle que rien ne sera comme avant dans la communauté iranienne, la virtuelle comme la réelle.

Billet initialement publié sur Global Voices

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Une chronologie interactive contre la censure Internet http://owni.fr/2010/04/13/une-chronologie-interactive-contre-la-censure-internet/ http://owni.fr/2010/04/13/une-chronologie-interactive-contre-la-censure-internet/#comments Tue, 13 Apr 2010 08:34:21 +0000 Sami Ben Gharbia http://owni.fr/?p=12117 Ce billet a été publié sur Global Voices Advocacy , l’un des sites de Global Voices, destiné à défendre la liberté d’expression en ligne et à combattre la cyber-censure. Voir tous les billets.

Face à l”ampleur croissante de la répression d’Internet, notamment après la contestation en Iran et  la débâcle Google contre Chine, le site Global Voices Advocacy a voulu collecter les faits et les présenter en une suite chronologique enrichie de liens utiles et de vidéos (chaque fois qu’il y en avait de disponibles).

Comme pour la chronologie et la carte de Threatened Voices, l’objectif de ce modeste projet est bien entendu d’identifier les tendances dans la répression digitale à travers le temps et de mettre en lumière d’autres sujets souvent négligés par les médias.

Les données recueillies et rapportées dans cette chronologie Dipity proviennent de ce tableur Google mis à disposition pour toute utilisation souhaitée.

Tout un chacun peut la visionner et la modifier sans s’identifier. Ces informations peuvent être exportées dans un fichier .xls ou des fichiers d’autres formats, et peuvent être utilisées pour créer des chronologies, des cartes et tout autre mode de visualisation. Il peut aussi servir d’outil collaboratif pour enregistrer les incidents majeurs dans ce domaine.

Alors, merci de nous aider à collecter cette information cruciale et de tenir à jour cette chronologie. Il vous suffit pour cela d’aller sur ce tableur Google et de le compléter des incidents manquants.

Billet initialement publié sur Global Voices en français

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