OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 Les nouvelles root de l’Internet http://owni.fr/2012/01/13/les-nouvelles-root-de-l%e2%80%99internet/ http://owni.fr/2012/01/13/les-nouvelles-root-de-l%e2%80%99internet/#comments Fri, 13 Jan 2012 14:02:45 +0000 Chantal Lebrument et Louis Pouzin http://owni.fr/?p=94018

Considéré comme l’un des précurseurs d’Internet, le français Louis Pouzin a lancé, avec Chantal Lebrument, l’initiative Open-Root de “création d’extensions personnalisées dans le respect des normes de base de l’internet“. Dans une tribune à charge qu’ils ont fait suivre à OWNI, ils expliquent tout le mal qu’ils pensent de la soi-disant “ouverture” des noms de domaines (de type .com ou .fr, NDLR) que vient de lancer l’ICANN.

La date du 12 janvier 2012 a marqué un temps fort de la vie d’Internet. A cette date, l’ICANN (Internet Corporation for Assigned Names and Numbers), l’organisme californien en charge de la gestion des noms de domaine de l’Internet a ouvert les extensions de premier niveau à tous. Enfin presque …

Dès son origine, l’Internet introduisait une ségrégation des utilisateurs par les langues. Seul l’ASCII (American Standard Code for Information Interchange) était utilisable. C’est un alphabet de type latin réduit aux lettres sans accent, ne convenant qu’à l’anglais.

Trente ans plus tard, l’usage des scripts d’un grand nombre de langues est devenu possible avec les IDN (Internationalized domain name), ces noms de domaine codés en “xn--” contenant lettres accentuées et/ou alphabets non latins. Mais en maintenant l’ASCII dans le rôle d’alphabet de référence , on risque de créer une source supplémentaire et inépuisable de confusions visuelles, notamment avec les langues possédant des caractères communs ou proches comme le cyrillique, le grec, le turc etc.

Un besoin, mais pour qui ?

Lancé lors du congrès ICANN de Paris en juin 2008, l’argument de l’ouverture à tous des extensions de l’Internet était de répondre aux critiques sur la pénurie de GTLDs (Generic Top-Level Domain ou “extension de premier niveau”) et sur la rigidité de leur gestion. Mais il s’agissait pour de nombreux observateurs d’une manœuvre de l’ICANN pour augmenter ses revenus.

Le but de l’opération était également de supplanter l’OMPI (Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle) dans la gestion des marques. Une façon d’affirmer un monopole et un pouvoir de contrôle sur l’Internet, et ce en dépit des protestations de nombreux pays.

Une ouverture tamisée et très politique

Les tarifs prohibitifs – non justifiés – des nouvelles extensions introduisent une ségrégation par l’argent, et les montants exigés et décidés par l’ICANN vont accroitre la ségrégation entre les PME et les marques. Celles-ci devront investir au minimum 185 000 dollars, puis payer les frais de gestion. Cela a conduit à une première aux États-Unis, la levée de bouclier par des lobbies d’annonceurs soucieux de protéger les marques et qui ont décidé de lutter contre l’unilatéralisme de l’ICANN.

L’idée de l’ICANN d’ouvrir l’Internet est-elle bonne ?

L’Internet est déjà ouvert. C’est l’ICANN qui rend invisibles les domaines existant. Il existe actuellement des centaines de domaines indépendants de l’ICANN qui fonctionnent depuis le début des années 2000. L’initiative de l’organisation, qui a plus de trois ans de retard sur les prévisions initiales, a suscité de nouveaux besoins qu’il n’est pas possible de satisfaire dans les conditions tarifaires et calendaires proposées.

Dans une économie mondialisée l’utilisation d’une racine unique gérée par un monopole étasunien est une impasse technique et commerciale. Les usages sont trop diversifiés pour entrer dans le moule d’une solution monolithique conçue il y a plus de trente ans. Les racines, qui ne sont que des annuaires, doivent se diversifier selon les usages actuels et futurs.

En fait, il y a autant de racines ouvertes utilisables que d’adresses IP (Internet Protocol) disponibles (versions v4 et v6). La légende de la racine unique est un dogme assené par l’ICANN depuis 1998. En fait, de nombreux sites utilisent cette possibilité qui leur apporte une souplesse inconnue dans le système ICANN.

Un modèle économique qui casse la chaîne alimentaire

C’est la fin du monopole ICANN et de son arbitraire pour l’enregistrement des TLDs. Certains exclus du système ICANN comme le .бг (la Bulgarie, .BG en cyrillique) qui ne parviennent pas à avoir une extension dans la racine ICANN existent maintenant dans les racines ouvertes. Le système de racine ouverte met à l’abri des saisies administratives de TLDs par le gouvernement étasunien. WikiLeaks et le parti pirate allemand l’ont bien compris, tout comme certaines communautés linguistiques ou culturelles.

Les racines ouvertes permettent l’accès à l’ensemble de l’internet et pas seulement à leur propre racine. Certains opérateurs proposent des tarifs et un modèle économique fondé sur la vente et non plus sur la location de TLD, ce qui montre que la proposition de l’ICANN est aberrante. Enfin on peut ouvrir l’Internet à tous, individus, entreprises et communautés incluses, tout en rendant la ressource TLD inépuisable et peu coûteuse. Ce serait la fin de la course à l’armement pour les marques et l’aube de nouveaux usages : par centre d’intérêt, pour les familles dispersées, pour des projets à court terme …

Un choix d’utilisation

La visibilité des TLDs en racine ouverte est un choix : on peut rester invisible et fonctionner en extranet ou être rendu public et communiquer sur le nom de son produit, de sa communauté. Sur la problématique du référencement, Google – qui indexe moins de 10% de l’Internet ! – a les moyens techniques d’accéder à l’ensemble des contenus publiés dans la zone publique et est libre d’indexer les sites de son choix. En pratique, sont indexés les sites jugés les plus rentables pour Google.

L’Internet étant très réactif, on peut imaginer que des modules (“Add-ons”) de Mozilla permettront d’entrer une fois pour toutes ses préférences de raine ou encore qu’un fournisseur d’accès à Internet les mettra à disposition de ses clients. C’est à ce prix que la navigation sera transparente, et qu’elle se fera sur la totalité de la toile.


Quelques exemples de Racines Ouvertes existantes:

http://правителство.бг Gazette du gouvernement bulgare
http://sachsen.pirates Parti Pirate allemand
http://gov.linna Ligue des nations indiennes d’Amérique du nord
http://ducadicastro.2sc Maison royale des Bourbons des deux Siciles
http://wikipedia.ku Wikipedia en kurde
http://namgyallhamo.ti Chanteuse tibétaine
http://uyghurensemble.uu Ensemble musical ouighour londonien

Pour accéder à ces sites, il faut ajouter des racines (n°IP) dans les préférences “réseau” de son poste, ou le routeur de son entreprise.

Photographie CC ctsilva.

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#ICANN #Nairobi: Le sacre des noms de domaine http://owni.fr/2010/03/14/icann-nairobi-le-sacre-des-noms-de-domaine/ http://owni.fr/2010/03/14/icann-nairobi-le-sacre-des-noms-de-domaine/#comments Sun, 14 Mar 2010 15:37:57 +0000 Olivier Zilbertin http://owni.fr/?p=10031 img_7833-par-charles-mok

Après Séoul en octobre 2009, c’est à Nairobi (Kenya) que s’est réunie du 7 au 12 mars l’ICANN, l’Internet Corporation for Assigned Names and Numbers, c’est-à-dire la Société pour l’attribution des noms de domaine et des numéros sur Internet. Pour en savoir plus sur cette institution, on peut consulter la page de l’encyclopédie participative Wikipédia qui lui est consacrée ici : http://fr.wikipedia.org/wiki/ICANN.On peut également se rendre directement sur le site de la Société (www.icann.org) qui propose une page de présentation en français ici :http://www.icann.org/tr/french.html.

Pour résumer il faut savoir que l’Icann est l’organisme qui gère et délègue la gestion (1) des noms de domaine de premier niveau (les .com, .fr) ce qui est une tâche technique mais aussi un pouvoir économique, diplomatique et politique de première importance. La compétence de l’ICANN est mondiale, ce qui fait que ses décisions s’imposent de fait aux Etats membres, alors même – comme le rappelle wikipedia – qu’elle est de droit californien. Plus délicat encore : elle est placée directement sous la tutelle du ministère du commerce américain.

C’est dire si les réunions comme celle qui s’est achevée vendredi à Nairobi sont suivies de près par les gouvernements et les acteurs de l’Internet. C’est souvent dans la coulisse que se nouent et se dénouent les grandes affaires. A Nairobi, quelques points essentiels ont été abordés par le board, l’instance qui dirige l’ICANN :

-L’abandon de la procédure dite de l’EOI, l’ « Expression of interest ». Cette procédure visait à demander aux porteurs de projets de se déclarer préalablement. Une forme de pré-enregistrement autrement dit qui pouvait donner lieu à de la spéculation. Il faut savoir que le dépôt de dossier pour la demande de l’ouverture d’une extension coûte 185.000 dollars, et que pour l’EOI il était réclamé une avance de 55.000 dollars.

-De nouvelles dispositions pour protéger les marques. L’enjeu notamment économique est d’importance dans le cadre de la création de nouvelles extensions. La création de nouvelles terminaisons est en effet une difficulté pour les marques qui souhaitent pouvoir déposer leur nom de domaine sous toutes les formes. Les détenteurs de marques sont donc une très forte force d’opposition à l’extension des noms de domaines. Le dossier « nouvelles extensions génériques » avait été gelé lors de la dernière réunion à Séoul. Deux propositions ont donc été intégrées. La première consiste en l’établissement d’une « cleaning house », c’est-à-dire en fait une liste de référence globale qui protègerait les détenteurs de marque pour toute les terminaisons. La deuxième est l’adoption d’une procédure accélérée pour le blocage d’un nom de domaine cyber-squatté. Jusqu’à maintenant, la procédure réclamait 45 jours. Il n’en faudra plus que 15 désormais.

-Des études économiques et techniques. Un groupe d’économistes a été mandaté afin d’effectuer une étude de marché pour connaître plus précisément la véritable demande dans le cadre de la création d’une extension. Cette étude devrait être publiée juste avant la prochaine réunion de Bruxelles. Une autre étude devra par ailleurs déterminer l’impact technologique de la création d’une extension. Une nouvelle extension provoque en effet toujours immédiatement un pic de charge, des milliers de noms de domaines se créant avec la nouvelle terminaison.

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-La création d’un groupe de travail pour réfléchir au financement de projets portés par les pays du sud. Les 185.000 dollars de dossier sont en effet rédhibitoires pour un certain nombre de projets venus de pays du Sud. Le groupe de travail devra trouver des solutions de financement, prêts à taux 0 ou autres…

-Enfin la création de l’extension .XXX pour les sites pornographiques est revenue sur le devant de la scène. Il faut savoir que cette extension, réclamée par les professionnels du secteur avait bien failli voir le jour en 2005. Mais les représentants américains au sein de l’ICANN, très explicitement guidés par le gouvernement des Etats-Unis, avaient alors utilisé leur droit de véto pour faire avorter le projet. Dans l’histoire de l’ICANN il s’agit d’ailleurs du seul et unique épisode ou les américains aient usé de ce droit de véto. Les professionnels de l’industrie pornographique n’ont pourtant jamais renoncé. Ils ont utilisé recours sur recours. Or un comité d’audit indépendant a remis en question la décision de l’ICANN de ne pas créer cette extension. A Nairobi le board a conservé un silence pudique sur la question qui devrait ressurgir de façon officielle.

Il faut rappeler par ailleurs que l’année 2010 est et sera riche en nouveautés au rayon des noms de domaines et de leurs extensions, suite à des décisions prises avant la réunion de Nairobi. Principale innovation : la possiblité de création d’extension en alphabet non latin. Dès le mois d’avril le « .rf » en cyrillique (pour la Russie) fera son apparition. Les mois suivants viendront également le « .bg » en cyrillique toujours pour la Bulgarie, des extensions en arabe pour l’Egypte et la Tunisie et enfin en caractère chinois pour la Chine.

Olivier Zilbertin

(1) en France, c’est ainsi l’AFNIC (Association française pour le nommage Internet en coopération – www.afnic.fr) qui est délégataire de cette gestion.

> Illustrations par Charles Mok sur Flickr

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