OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 [vidéo] L’histoire des Etats-Unis par ses bureaux de poste http://owni.fr/2011/08/12/video-lhistoire-des-etats-unis-par-ses-bureaux-de-poste/ http://owni.fr/2011/08/12/video-lhistoire-des-etats-unis-par-ses-bureaux-de-poste/#comments Fri, 12 Aug 2011 16:09:04 +0000 Derek Watkins http://owni.fr/?p=76108 Les liens sont en anglais.

Cette visualisation montre comment le contrôle territorial s’est répandu en Amérique depuis 1700 jusqu’à 1900 et ce grâce aux changements dans la répartition géographique des bureaux de poste :

Cliquer ici pour voir la vidéo.

(Une version HD et 1080p est disponible en téléchargement ici.)

Il y a quelques mois, j’ai récupéré les adresses de tous les bureaux de Poste à partir du service USPS Postmaster Finder. J’ai ensuite extrait les coordonnées (latitude et longitude) en corrélant les noms de lieux avec le service USGS GNIS. Récemment, je me suis souvenu que ces données traînaient dans un coin. J’ai fait pas mal d’essais ces derniers temps avec Processing [NDLR: outil de rendu graphique open source] notamment pour des visualisations géographiques et je me suis dit que cela pourrait constituer un set de données intéressant pour tester la génération de carte animées et dynamiques. Pour construire mon code, j’ai repris certaines parties du code de zipdecode détaillé dans l’excellent livre de Ben Fry : Visualizing Data. Après quelques frustrations, je suis arrivé à cette visualisation.

Bien sûr, il y a des défauts : USPS reconnait que les données concernant les bureaux de poste sont sans cesse remises à jour, il y a donc vraisemblablement beaucoup de bureaux qui ne sont pas présents sur la carte. Environ 10% des noms de lieux provenant de USPS ne correspondaient à aucune coordonnée présente dans le data set de GNIS, ces bureaux ne sont donc pas affichés non plus. Pour finir, les données de USPS fournissent une date de clôture pour un certain nombre de bureaux mais ceux-ci n’apparaissent pas sur la carte car cela aurait pu donner une fausse impression de densité dans certaines zones.

Premières interprétations des données

Malgré tout, je pense que les résultats sont plutôt intéressants. Je ne suis pas historien mais voici quelques points que j’ai pu relever en dehors de l’expansion générale vers l’Ouest :

  • 1776 – Plusieurs bureaux de poste apparaissent le long de la côte Est après la Révolution.
  • 1846 – De nombreuses ouvertures au Texas après l’indépendance et la fin de la guerre Mexico-Américaine.
  • 1848 – Les premiers bureaux ouvrent sur la côte Ouest suivi d’une forte activité, sans doute due à la ruée vers l’or et l’indépendance de la Californie.
  • 1851 – Le Nouveau Mexique et l’Utah commencent à s’activer lorsqu’ils deviennent des territoires. J’aime particulièrement la ligne qui s’étend à partir de Santa Fe en suivant le Rio Grande / El Camino Real.
  • 1860’s – Aucune activité dans le Sud pendant la guerre civile, il y a également un glissement intéressant du côté des Grandes Plaines avec notamment l’Oklahoma qui reste ostensiblement calme.
  • 1870’s – Des lignes apparaissent clairement au Nebraska et au Kansas le long des voies de chemin de fer.
  • 1890’s – L’Oklahoma s’illumine à cause de plusieurs ruées vers l’or.

Si vous notez d’autres choses, n’hésitez pas à me faire signe.

Update: Parallèle très sympa avec cette visualisation des journaux aux États-Unis de 1690 à 2011 par la Rural West Initiative de Standford.


Article initialement publié sur le blog de Derek Watkins.

PaternitéPas d'utilisation commercialePartage selon les Conditions Initiales Loving Earth.

Traduction de Julien Goetz.

]]>
http://owni.fr/2011/08/12/video-lhistoire-des-etats-unis-par-ses-bureaux-de-poste/feed/ 6
Balade dans la Demeure du Chaos http://owni.fr/2011/04/12/ballade-dans-la-demeure-du-chaos/ http://owni.fr/2011/04/12/ballade-dans-la-demeure-du-chaos/#comments Tue, 12 Apr 2011 10:30:51 +0000 microtokyo http://owni.fr/?p=56286

Certains articles résistent à s’écrire. Non que vous n’ayez rien à dire sur le sujet (il suffit alors de se documenter) ou que vous craigniez les représailles de quelqu’image castratrice du père. La difficulté vient d’ailleurs : de l’affect que ledit sujet déchaîne chez ses partisans et ses détracteurs. Pour le blogueur n’adhérant pas au mythe de l’objectivité, il s’agit de se positionner en évitant de pondre un article fadasse. Il y a quelques temps, nous vous avions promis la chronique de la visite de la Demeure du chaos en compagnie de son directeur artistique, Pierrick, graffeur, a.k.a Cart 1.

Située dans le très cossu village de Saint-Romain-aux-Monts-d’Or, à quelques kilomètres de Lyon, la Demeure du chaos est tout à la fois le bébé d’un businessman fou, une pépinière artistique et un feuilleton médiatico-judiciaire à la Dallas. Une sorte de doigt d’honneur ambigu et réfléchi à la société. Le milliardaire en question, c’est Thierry Ehrmann. Pionnier de la bulle internet des années 1990 et déclaré irresponsable en Espagne, il est aussi le créateur du Groupe Serveur – acteur majeur des banques de données informatiques et le boss du site Artprice, leader mondial de l’information du marché de l’art.

Artprice, c’est une entreprise regroupant une centaine de salariés et un fond de plus de 300.000 catalogues de ventes, de 1700 à nos jours. Pour un amoureux des livres, pénétrer dans les salles aux lourdes armoires abritant les collections, ça fait quelque chose ! Art, information et internet : Ehrmann, en rajoutant le goût de la provocation, te voilà superficiellement dégrossi !

Calendrier tzolkin, par Goin

Cendres chaudes et chaos fertile

Le choc initial semble venir du 11 septembre 2001. Ehrmann y voit la fin d’une civilisation, le chaos par lequel renaîtra quelque chose de neuf. Il acquiert alors une vaste propriété bourgeoise pour y installer son grand-oeuvre, à mi-chemin entre champ de ruines de Ground Zero et Factory d’Andy Warhol. Le projet de la Demeure, c’est une dualité, ou plutôt, une complémentarité entre une vision – l’Esprit de la Salamandre (pour les initiés), et la praxis d’un lieu sacré… ouvert au public.

La Demeure du Chaos n’est pas le bâtiment qui abrite des oeuvres d’art comme le ferait un musée conventionnel, mais une oeuvre d’art en soi, in process. Murs éventrés et massivement graffés par des artistes invités, sol violé par des épaves d’avion et poignardé par des ruines de structure métalliques, ciel défié par une plateforme pétrolière, espace des bâtiments détourné, esthétique générale empruntant au cyberpunk et à l’indus : rien ni personne n’est épargné. L’oeuvre monstrueuse, dégage une énergie hors du commun. Une mosaïque constituée de plus de 2700 compositions, la plupart sur des murs dont la porosité des pierres dorées fait les délices des graffeurs.

C’est aussi le musée privé le plus fréquenté en Rhône-Alpes, le siège des entreprises citées plus haut et la résidence d’Ehrmann. Ses appartements font partie de l’Oeuvre : des espaces brutalisés à l’ambiance délicieusement lourde. Parmi eux, une pièce au centre muré, sorte de tabernacle louche.

Pour qui arrive sur le site pour la première fois, le choc est soudain : vous entrez dans un mignon petit village par une mignonne petite route et bam ! à la sortie du premier virage vous tombez sur des murs noirs et tagués. Le choc est accentué du fait que les hauts murs des bâtisses signifient clairement qu’ici l’espace privé est jalousement préservé des regards extérieurs. La violence picturale de la Demeure prend le contrepied en magnétisant le regard.

Dès sa création, les villageois et le maire poursuivent Ehrmann en justice pour non respect du Code de l’urbanisme. C’est le début d’une longue campagne médiatique et juridique. Le chantre de l’Esprit de la Salamandre s’entoure d’une légion d’avocats et d’amis influents, fait appel systématiquement, s’expose avec délectation devant la loi et l’opinion publique. Pas tant par nombrilisme que par philosophie : l’art, les hommes et leur justice se rejoignent dans son travail alchimique.

On vous passe la liste des rebondissements judiciaires, dus notamment à la découverte des ruines d’un temple protestant sous les fondations de la Demeure et celles du lotissement voisin, lequel fut construit plus ou moins légalement. Par contre, on vous signale que le voisin d’en face, Marc Allardon, a répondu à la Demeure en transformant sa propriété en Maison de l’Eden Dudu ! Sa philosophie, le duduisme : être heureux, il suffit d’y penser !

Regard de l’abyme, regards en abyme

Car la Demeure du chaos, c’est ça, un formidable jeu de regards expérimenté par des artistes en résidence. Les fresques graffées de personnalités comme Claude Lévi-Strass, Rouhollah Khomeini, Andreas Bader ou Philip K. Dick par Cart One ou Michel Foucault par Thomas Foucher, pour ne citer qu’elles, nous rappellent la nécessité de se ré-approprier les images produites par les médias.

Godard disait que la vérité d’une image, c’est d’abord la vérité de la légende qu’on lui appose. Il s’agit alors de dé-légender la légende, laquelle n’est ni plus ni moins qu’un agencement de mots nourrissant aussi bien l’oeuvre que la réalité qu’elle présente. Comme le disait l’ami Lévi-Strauss, ce travail de taxinomie consiste à faire exister le monde et ses représentations et jusqu’à un certain point, à se les approprier. La question étant alors de savoir qui nomme quoi, au nom de qui. Entre autres oeuvres, les pochoirs de calendriers tzolkin de Goin semblent souligner le rapport de continuité des techniques de (re)production graphique à travers le temps, l’espace et la culture : du codex et de la sculpture religieux à la bombe Montana du street art profane. Ils semblent aussi tirer la sonnette d’alarme : la fin du monde, de cet état du monde, est proche. Pour le 21 décembre 2012, comme le pensaient les Pré-colombiens. Si vous voulez que vos enfants soient specta(c)teurs de la fin des temps, ne tardez plus, il vous reste précisément onze mois pour faire des bébés ! Quant à lui, le truculent Jace honore les murs de Mickey Mouse à contre-emploi, prévenant des dérives du projet Loppsi. Pour les fans, des interventions de Ben Vautier, ce Jacques Séguéla de l’histoire de l’art.

Mickey par Jace

La relation au regard a quelque chose de jusqu’au boutiste : le couple observant/ observé est démantelé. Le domaine est entièrement truffé de caméras vidéo. Ce panopticon ne permet pas à Ehrmann de surveiller tout ce qui s’y passe, mais plutôt d’observer à tout moment l’évolution de la vie grouillante. Quelle meilleure manière de déjouer le pouvoir visuel que de le combattre avec ses propres armes ? Plus foucaldien, tu meurs ! Encore faudrait-il s’assurer que tous les hôtes de la Demeure sachent qu’ils sont filmés, territoire sacré ou pas. En riposte à cette pratique éhontée, balançons (un secret de Polichinelle) : le bureau circulaire des écrans se trouve dans les appartements du sieur Ehrmann.

Humanisme et corps sacré

Le corps sacré, c’est l’autre grand chantier artistique de la Demeure. Soit la dualité corps/ âme, matière/ idée. En trait d’union, Internet. Ehrmann :

Je suis persuadé qu’Internet est la métaphore du Divin, si ce n’est le Divin lui-même. La voix sèche qui illumine La Demeure du Chaos lui donne le don d’ubiquité entre le monde physique et celui des idées (…). Etre capable d’étendre à l’infini sa présence mentale, être universellement connecté afin de pouvoir affecter et élever peu à peu la connaissance des êtres humains par la distribution du savoir organisé (la banque de données), telle est l’ambition humaniste du troisième millénaire.

Si Dieu a fait l’Homme à son image, celui-ci ne cesse depuis la Renaissance de questionner sa place dans l’univers et d’expérimenter les limites de son corps. Notamment au Bunker (un vrai de vrai), espace pirate de résistance à la pensée dominante : une TAZ – Zone autonome temporaire à la Hakim Bey. C’est là que de nombreux performers y présentent leur travaux de réflexion et d’action sur le corps dans la lignée de Gina Pane et d’Orlan.

Parmi eux, la dernière exposition Sanctuarium de Claude Privet : un mix de crânes humains optimisés de circuits et puces électroniques. Cette esthétique épouse pile-poil les thématiques de la Demeure : sacralité, mort et rédemption par l’immatérialité des réseaux électroniques d’information. Avec une piste intéressante qui fait qu’elle dépasse peut-être le propos d’Ehrmann : l’intuition d’une post-humanité.

Morceau du bunker

En effet, s’il convient de garder à l’esprit que les artistes invités à la Demeure n’épousent pas nécessairement l’esthétique d’Ehrmann à la lettre, celle-ci reste finalement dans le courant très classique de l’humanisme : l’Homme au centre du monde, le progrès par la connaissance et un relatif désenchantement du monde au profit d’une mystique volontariste. La nouveauté viendrait peut-être du côté de la touche cyberpunk : le corps humain devenant pure énergie, flux intelligent. Et encore, Platon en parlait déjà. S’il nous était encore permis de pinailler, nous ajouterions qu’on ne peut malheureusement plus envisager ledit humanisme sans ses fleurs pourries que sont l’esclavage et l’émergence du capitalisme planétaire.

Continuer à parler de progrès et de savoir partagé paraît alors vraiment compliqué, d’autant que de nombreuses oeuvres constituant la Demeure amorcent la piste post-humaine : un portrait de Michel Foucault qui annonce la mort de l’Homme, un autre de William Burroughs hanté par le virus du langage, les crânes hybrides de Privet alliant organique et silicone, reproduction de Ground Zero qui pourrait tout aussi bien être le champ de ruines du Tokyo post-apocalyptique d’Akira de Katsuhiro Otomo, références omniprésentes à l’Histoire et à des révolutionnaires… Autant d’oeuvres n’allant pas tant dans le sens d’une transcendance par le savoir que de la transformation de soi au contact d’autrui et/ou de la technologie.

En cela, la Demeure du Chaos joue paradoxalement bien son rôle : une pépinière portant les germes de sa propre mutation, de son propre renversement. Au-delà du procès fleuve concernant des règles d’urbanisme, c’est bien cette réalité de la Demeure du Chaos qui nous fait dire qu’elle doit perdurer : il y aura toujours davantage d’oeuvres, qui tels des enfants indignes, respecteront le père tout en le tuant sous le regard impitoyable des visiteurs. De votre belle-mère et de votre petit frère punk, petits meurtres rituels en famille.


Publié initialement sur Microtokyo, le blog du grand mix urbain, sous le titre “La Demeure du Chaos, promenade idéale pour votre belle-mère”

Crédits photos et illustrations : Aymeric Bôle-Richard (Microtokyo)

]]>
http://owni.fr/2011/04/12/ballade-dans-la-demeure-du-chaos/feed/ 9
Des frontières au bout du fil http://owni.fr/2011/01/11/des-frontieres-au-bout-du-fil/ http://owni.fr/2011/01/11/des-frontieres-au-bout-du-fil/#comments Tue, 11 Jan 2011 16:30:05 +0000 Hubert Guillaud http://owni.fr/?p=41897 Analyser des données téléphoniques peut-il nous permettre de mieux comprendre la pertinence de nos frontières administratives ? C’est la question que ce sont posés des chercheurs du département réseau et société du Senseable City Lab du MIT, de Cornell, de British Telecom et du collège universitaire de Londres dans une étude (vidéo) qui a comparé des données de télécommunications avec les frontières administratives britanniques. Leurs conclusions montrent que le cloisonnement politique existant se retrouve pour l’essentiel dans nos communications.

Image : De la cartographie des communications aux frontières régionales de nos échanges.

En analysant des milliards d’échanges téléphoniques, les chercheurs ont constitué une carte montrant l’intensité des échanges entre les différentes régions d’Angleterre, selon le volume des informations qu’elles échangent. Ils ont ensuite développé un algorithme permettant de diviser la carte en régions selon le volume des échanges permettant de mettre en avant le volume des connexions à l’intérieur d’une région par rapport au volume des connexions entre régions.

Coïncidence des interactions et de la partition administrative

Ils ont mis en évidence le fait que la partition des échanges correspondait pour la plupart avec les partitions administratives, géographiques et historiques existantes. A quelques exceptions près cependant : une partie du pays de Galles a de plus fortes relations avec des villes de l’ouest de l’Angleterre qu’elle n’en a avec le reste du pays de Galles…

“Cette étude nous permet de comprendre l’interaction entre les institutions géographiques et sociales que nous construisons”, estime Carlo Ratti, directeur du Senseable City Lab du MIT. En permettant de mieux identifier les régions réelles, c’est-à-dire telles que les gens les vivent dans leurs échanges et leurs déplacements, nous pourrions construire une meilleure gouvernance, estime le chercheur. Cependant, il n’est pas surprenant que le résultat de l’algorithme de partitionnement dessine un miroir des limites politiques actuelles de la Grande-Bretagne, souligne Carlo Ratti. Après tout, si les communautés ont été regroupées culturellement et politiquement depuis des siècles, cela leur donne également de bonnes raisons pour échanger des informations d’abord et avant tout en leur sein.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

En science des réseaux, les algorithmes de partitionnement sont pourtant souvent indifférents à la géographie : il serait ainsi parfaitement acceptable de réunir New York et Los Angeles à regarder le volume des données que les deux villes échangent. Ce n’est visiblement pas le cas en Grande-Bretagne.

L’analyse des flux d’informations ne redessinera pas les frontières administratives, bien sûr, mais elle peut être un outil dans la compréhension de leur pertinence ou de leur inexistence. On a hâte de voir une telle étude étendue aux régions françaises.

Article initialement publié sur InternetACTU sous le titre “Nos frontières politiques éclairées par nos échanges”.

Illustration CC FlickR: rbrwr

]]>
http://owni.fr/2011/01/11/des-frontieres-au-bout-du-fil/feed/ 1
Wikileaks : l’État, le réseau et le territoire http://owni.fr/2010/12/13/wikileaks-l%e2%80%99etat-le-reseau-et-le-territoire/ http://owni.fr/2010/12/13/wikileaks-l%e2%80%99etat-le-reseau-et-le-territoire/#comments Mon, 13 Dec 2010 11:51:52 +0000 anthonybesson http://owni.fr/?p=39059 Infowar”, “cyber warfare”[en], “opération riposte”, “guerre de l’information”,… les titres couvrant l’affaire WikiLeaks ont largement puisé dans le vocabulaire militaire pour décrire les événements qui ont suivi la publication des câbles diplomatiques par le site de Julian Assange. La multiplication des déclarations violentes de journalistes et hommes politiques à l’encontre de WikiLeaks, l’acharnement des États a vouloir faire fermer le site en vain via les hébergeurs ou les fournisseurs de noms de domaines, et bien sûr la “riposte” des Anonymous par attaques DDoS, tout cela participe bien d’un climat de “guerre”. Mais quelle guerre ? Et surtout, pourquoi parle-t-on de “guerre” ?

J’aimerais proposer ici l’idée que l’affaire WikiLeaks relève bel et bien d’un conflit qui serait de nature territoriale entre d’un côté l’État qui s’appuie sur un territoire physique délimité par des frontières au sein desquelles est déployée une domination via la mise en scène d’une violence symbolique légitime et de l’autre le réseau en tant que territoire “virtuel” étranger sur lequel l’État n’aurait pas prise : tant physiquement que symboliquement. Si ces deux territoires se sont longtemps ignorés, ces dernières années ont vu apparaître une préoccupation grandissante de l’État face à ce “voisin” menaçant ! Pourquoi menaçant ? Parce que le réseau suit une politique expansionniste des plus agressives : 5 millions de terabytes, et une croissance qui doublerait sa taille tous les 5 ans. Si l’Internet est un territoire, il se nourrit et s’agrandit de par les informations que nous mettons en ligne. Car pour le réseau, l’information est le territoire. Dans ce sens, la mise sur le réseau des câbles ne relève pas que du simple journalisme, mais met en lumière l’agrandissement du territoire du réseau aux dépens, cette fois-ci non plus de données privées (données sous copyright ou données personnelles), mais de données appartenant à l’État. La mise en ligne des câbles, c’est l’annexion par le réseau d’une partie du territoire de l’État !

L’Internet, un territoire étranger

L’idée que l’Internet soit virtuel, au sens naïf de “coupé du réel”, est en passe d’être abandonnée, et les tensions, conflits, relatifs à l’Internet, sont manifestes, qu’ils touchent à des formes concrètes du territoire (câbles, juridictions nationales) ou à des formes moins repérables (réseaux sociaux en construction…)
Eric Guichard, 2007[pdf]

Si le réseau des réseaux n’est plus considéré comme un territoire virtuel par ses usagers qui prolongent sur les réseaux sociaux leur vie sociale IRL, ce territoire est longtemps passé inaperçu aux yeux de l’État qui ne voyait dans l’Internet qu’un espace immatériel, donc par nature sans aucun danger pour la réalité matérielle sur laquelle l’État exerce son contrôle.

Cela dit, la menace terroriste ou les questions de droits d’auteur que soulèvent les usages de l’Internet attirent l’attention de l’État sur le réseau. En même temps que le réseau devient “espace public” apparaît pour l’État l’impérieuse nécessité d’étendre son contrôle sur les citoyens online et de garantir le prolongement de sa domination symbolique sur ce qui apparaît de plus en plus comme un territoire. Mais comment ? La vérité est que l’État n’y parvient pas. Les lois qui sont mises en place : ACTA, LOPPSI, HADOPI si elles proposent des moyens de coercition, sont des moyens qui interviennent en dehors du réseau, et ce de manière très limitée : les individus agissant de manière illégale sont arrêtés si et seulement si le lien est fait entre l’internaute et l’individu, et si bien entendu l’individu en question réside physiquement sur le territoire de l’État en question.

De même, si les sanctions évoluent (des sanctions traditionnelles de type amende ou enfermement, on est passé à une sanction d’un nouveau genre avec la loi Hadopi qui prévoit l’interdiction de l’accès au réseau), elle s’arrêtent toujours à la porte du réseau. Il ne s’agit plus d’enfermer l’individu dans un espace qui le coupe de la société, mais de l’enfermer dans le territoire du réel, de lui interdire de sortir du territoire national pour se réfugier dans le territoire “virtuel”. La coupure du réseau n’est pas vécue comme une punition, mais comme une atteinte, une privation de liberté.

Ainsi, ces sanctions interviennent IRL : suppression de l’accès par les FAI, suppression de l’hébergement… l’État n’intervient pas à l’intérieur du réseau, mais sur les accès physiques au réseau, révélant ainsi cruellement son absence totale de moyens de coercition sur le territoire du réseau.

Le seul organisme mondial ayant un tant soit peu de pouvoir sur le réseau est l’ICANN, l’institution en charges des TLD (Top-Level-domains), c’est-à-dire les .fr, .com, .org… Cet organisme (sous la coupe du département du commerce américain) chapeaute les entreprises privées qui gèrent ces TLD et a ainsi le pouvoir, en faisant pression sur un fournisseur de TLD, en l’occurrence pour WikiLeaks la Public Internet Registry [en], de faire supprimer des index (DNS) le nom de domaine Wikileaks.org ! Ce “pouvoir” reste cela dit limité, car l’adresse d’un site Internet reste équivalent à une adresse IP, l’index (le DNS) se contentant de faire l’équivalence entre l’adresse IP et le nom de domaine pour notre simple confort (il est plus facile de retenir un mot qu’une suite de chiffres).

Même le gigantesque firewall chinois n’est qu’une chimère. Comme le dit Bill Gates :

Les efforts chinois pour censurer Internet ont été très limités. Il est facile de les contourner.

On voit donc bien que l’Internet représente pour l’État une entité sur laquelle il n’a pas le contrôle. Si l’Internet est un territoire, il est un territoire étranger, un territoire où les États ne peuvent exercer leur pouvoir, un territoire où les moyens de coercition légitimes sont impuissants. L’Internet apparaît comme un espace où la démonstration de la violence symbolique et physique des États ne peut être mise en scène – l’action de l’État se limitant à l’extérieur du réseau. Ce qui fait d’ailleurs  dire à Jean-Christophe Féraud que la fronde de WikiLeaks, face à laquelle l’État semble impuissant, révèle l’Internet comme une zone autonome temporaire.

Ce qui est inscrit sur le réseau devient le réseau

La “fuite” des câbles n’en est également pas vraiment une. Elle n’est pas non plus un vol. Elle met en avant au contraire la douloureuse remise en question du concept de propriété que les majors, les producteurs de jeux vidéo ou de cinéma ont découvert à leur dépens : ce qui est transformé en bits, en devenant immatériel, ne nous appartient plus ; ce qui est inscrit dans le réseau devient le réseau et donc appartient au réseau. C’est pourquoi beaucoup considèrent aujourd’hui naturel d’avoir accès à ces fameux câbles comme toute une génération trouve naturel de télécharger de la musique en ligne ou de regarder la dernière série à la mode en streaming sur Internet. On parle même de WikiLeaks comme d’un nouveau Napster !

La particularité d’Internet est donc qu’il se nourrit de ce que l’on y met. Il se construit sur les informations qui sont mises en ligne, il est un territoire qui s’agrandit chaque fois qu’une nouvelle page Internet s’ouvre, qu’une adresse URL est créée, que nous tweetons, ou likons… L’Internet est donc un territoire et les internautes sont ses soldats luttant pour l’agrandissement, la conquête de nouveaux espaces, de nouvelles données. Ainsi, l’information devient sur l’Internet un enjeu “territorial” et l’agrandissement exponentiel du réseau une campagne expansionniste qui se nourrit de data.

Jusque-là, le réseau se nourrissait essentiellement de données privées (dans le sens de “qui appartient à quelqu’un” et “qui ne dépend pas de l’État”) : fichiers de musique, films en streaming, données personnelles sur Facebook… Mais pour la première fois, le réseau absorbe des données qui appartiennent – non pas à un individu lambda, ou à une entreprise, mais à des États.

L’action de WikiLeaks, parce qu’elle se déroule sur l’Internet, n’est donc pas qu’une révélation médiatique, une fuite d’informations : elle devient une appropriation, une captation de territoire qui passe par une dépossession de l’État. L’affaire WikiLeaks apparaît comme une nouvelle atteinte à l’objet État en défiant sa domination symbolique. Si l’internaute n’est atteignable par l’État qu’en dehors du réseau, de la même façon, l’État ne peut atteindre WikiLeaks que via ses créateurs physiques, en l’occurrence Julian Assange. Mais en aucun cas l’État ne peut atteindre les données qui font le « territoire WikiLeaks » – alors qu’au contraire, le réseau de son côté continue inlassablement et sans crainte de représailles, d’étendre son territoire par l’acquisition de nouvelles données.

Le réseau pose un double problème territorial à l’État : elle met en avant les limites de l’État qui ne peut agir en dehors de ses frontières nationales alors que le réseau lui est mondial. Mais l’affaire WikiLeaks révèle également que le réseau est bel et bien un territoire d’une nouvelle nature au sein duquel l’État n’a pas de moyens de coercition et où par conséquent, son monopole de la violence symbolique légitime s’évanouit laissant l’internaute libre de toute domination – ou tout du moins libre de la domination de l’État.

Article initialement publié sur Mais où est-ce qu’on est ?

Illustrations CC: Norman B. Leventhal Map Center at the BPL, Anthony Besson, Stéfan Le Dû

]]>
http://owni.fr/2010/12/13/wikileaks-l%e2%80%99etat-le-reseau-et-le-territoire/feed/ 3
Partager un devenir commun : l’ère des réseaux-nations http://owni.fr/2009/11/17/partager-un-devenir-commun-lere-des-reseaux-nations/ http://owni.fr/2009/11/17/partager-un-devenir-commun-lere-des-reseaux-nations/#comments Tue, 17 Nov 2009 10:26:45 +0000 Arnault Coulet http://owni.fr/?p=5520

[Cross-posted sur Netpolitique]

Alors qu’en France le débat sur l’identité nationale fait rage, les créateurs du web d’outre-atlantique considèrent vraisemblablement cette question outrepassée. C’est vrai qu’à l’heure du Réseau, l’idée de Nation a quelque chose de quasi-comique, ou quasi-tragique, pour des services en ligne qui agrègent des communautés se liant selon leurs affinités plutôt que selon les critères constitutifs classiques de la Nation. Mais il n’est pas question pour ces services web de faire Tabula rasa de ces critères, profondément ancrés dans l’univers collectif : certains services, comme Facebook, loin de l’idée primaire de détruire l’idée de Nation, se servent de celle-ci comme d’un terreau pour réinventer le lien social et surtout le sentiment d’appartenance aux réseaux.

Est-ce à dire qu’un Facebook invente l’idée d’une néo-Nation ? Les réseaux sociaux sont-ils des Réseaux-nations (Networks-Nations) ? Si dans 10 ans, le sujet “Facebook est il un réseau-nation ?” siège en invité d’honneur du Grand oral de Sciences-Po, il faudra d’abord, pour l’étudiant discipliné, revisiter les définitions classiques de la Nation. Soyons bon élève et anticipons l’épreuve.

1. La Nation, définition politico-juridique

Dans la version la plus commune du Petit Robert, il est dit qu’une nation est « un groupe humain constituant une communauté politique, établie sur un territoire défini (…) et personnifiée par une autorité souveraine ». Pour résumer, il s’agit donc d’un peuple auquel s’ajoute l’idée de gouvernement. De plus, si “le terme de “Nation” n’est pas défini juridiquement, toutefois l’usage en politique internationale en fait un équivalent d’État-souverain, dont les critères constitutifs sont les suivants :
# une population
# un territoire établi
# un gouvernement qui n’est subordonné à aucun autre
# une reconnaissance internationale

Le plus surprenant, c’est qu’un réseau comme Facebook remplit ces critères :

# Il existe bien une population de facebookers, qui vit sur un territoire, certes numérique, mais bien délimité, et gardé par des postes de douane aux frontières (le login)

# L’autorité souveraine s’y exerce t’elle ? Y a t’il, selon l’expression commune, un bras armé de la nation qui détient le monopole de la force ? Sans conteste la réponse est oui : la législation de chaque réseau social est celle imposée par ses créateurs (terms and conditions) ou construite par sa population par l’expérience utilisateur. Le “ou” n’est pas exclusif, Les décisions des développeurs de facebook régissent nos expériences d’utilisateurs, tant avec le site qu’avec le reste de la population. La soumission à l’autorité s’est faite avec violence, elle a d’abord été le fruit d’une longue lutte entre le gouvernant et les gouvernés dans un rapport monarchique. Prenez, par exemple, la litanie de changements de Terms & Conditions sur Facebook , certains ont provoqué des soulèvements violents parmi sa population. La monarchie absolue des débuts de Facebook a donc été contrainte de se constitutionnaliser, et mettre en oeuvre en avril 2009 une approche plus transparente et démocratique pour imposer ses décisions par le vote : Facebook site Governance “Governing the Facebook service in a more transparent way”. Une autorité souveraine s’exerce donc dans Facebook, que ce soit par la force à ses débuts, ou par le vote depuis avril. De plus, l’adéquation de Facebook avec les subtilités de la définition  française, pour qui la nation est, au sens constitutionnel, la notion juridique désignant au nom de quoi est exercé le pouvoir législatif, peut tout à fait être débattue. Selon la perspective politique à la française, en tant que mise en œuvre à titre juridique par la Constitution actuelle de la République française, la Nation est un ensemble de citoyens détenant la puissance politique (d’où l’Assemblée Nationale, et les députés représentants de la Nation). En l’occurrence, le fait d’impliquer sa population dans un processus démocratique, confère aux répondants de la page Facebook site governance le rôle de représentants de la Nation Facebook.

gandhilego

# Quant au critère de “reconnaissance internationale”, il faut savoir que, dans la vraie vie des relations internationales entre États, il est d’emblée un critère de mauvaise foi : en effet, la République Populaire de Chine a bien pu exister sans reconnaissance internationale de grands États du monde. La reconnaissance internationale repose avant tout sur l’état des rapports de force entre États. A ce jeu, mieux vaut montrer les bras, ce qu’a fait fait sans complexe le patron de Facebook quand il a annoncé en septembre 2009 que la “population” de Facebook (300 millions d’âmes) avoisinait celle des États-Unis (307 millions), l’effronté positionnant ainsi implicitement son réseau dans le concert des nations et dévoilant par là même ses désirs de conquête du monde (Ndlr: 1 mois plus tard, début novembre 2009, Facebook aurait dépassé 325 millions d’internautes, avec une croissance démographique de 5 millions de nouveaux utilisateurs par semaine…)

Ces 4 critères sont incroyablement condensés dans cette vidéo de Facebook Site Governance, dans laquelle Mark Zuckerberg (le Président / PDG /Monarque de Facebook) invite pour la première fois la population Facebook à voter. Le trait le plus caractéristique de cette vidéo est sûrement que vous ne la trouverez nulle part ailleurs sur le web: ni sur Youtube, ni sur un blog, nul part… Mark Zuckerberg s’adresse exclusivement à la population Facebook, sur son territoire, en invitant à un nouveau principe de gouvernance tout en renforçant le sentiment d’appartenance au réseau

2. La Nation, définition en Sciences humaines

Le sentiment d’appartenance est justement au cœur de la définition de la Nation par les sciences humaines. Un des sens admis est le suivant : « une communauté humaine identifiée dans des limites géographiques parfois fluctuantes au cours de l’histoire, mais dont le trait commun supposé est la conscience d’une appartenance à un même groupe »

A partir de cette définition, deux écoles s’affrontent (objective vs. subjective), conçues à partir des expériences nationales françaises et allemandes :

# L’école objective est issue de la philosophie allemande du début du XIXe siècle, défendue par Johann Gottlieb Fichte, selon laquelle les membres d’une Nation ont en commun des caractéristiques telles que la langue, la religion, la culture, l’histoire, voire les origines ethniques, tout cela les différenciant des membres des autres nations. Fichte, dans ses Discours à la nation allemande (1807-1808) , insiste sur l’idée de peuple et l’importance de la langue. Il est vrai, l’étymologie de “Nation” est liée à la notion de naissance (nascere). Certaines données objectives permettent de définir une nation : le territoire, l’ethnie, la langue, la religion, la culture, l’État. Mais l’idée de nation ne leur est pas réductible. Il existe ainsi des nations plurilingues (ex : la Suisse) ou connaissant plusieurs religions (ex : l’Allemagne). Il y a également des nations sans territoire propre ou d’autres encore qui sont partagées entre plusieurs États. Cette conception de la Nation trouve donc ses limites, et pourrait bien être appliquée dans ses exceptions et artefacts à un réseau comme Facebook (une nation multilingue avec plusieurs religions)

La conception moderne de la nation dépasse largement le cadre objectif. Elle trouve plutôt sa source dans un ensemble complexe de liens, subjectifs, qui fondent le sentiment d’une appartenance commune. Et c’est aussi dans cette source que s’abreuve les réseaux-nations : en exacerbant le désir et en sollicitant le sentiment d’appartenance à leur réseau

# L’école subjective est issue de la philosophie française du XVIIIe siècle et liée à la Révolution française, conceptualisée par Ernest Renan. Elle insiste sur la volonté de « vivre ensemble », la nation étant alors le résultat d’un acte d’autodéfinition. Ernest Renan, dans sa conférence de 1882 intitulée “Qu’est-ce qu’une nation ?”, pose comme critères de l’appartenance nationale “le désir de vivre ensemble, la volonté de continuer à faire valoir l’héritage qu’on a reçu indivisiblement”. Selon lui, “l’existence d’une nation est un plébiscite de tous les jours.” C’est dans cette direction subjective que Facebook semble vouloir diriger ses internautes. Le “désir de Vivre ensemble” est un sentiment d’appartenance immensément plus fort que ce qu’éprouvent habituellement les membres d’une communauté, terme usuel pour désigner les membres d’un réseau. Une communauté n’est qu’un “ensemble de personnes, d’individus, ayant un, ou des intérêts communs”, définition bien pâle en comparaison de la définition subjective de la Nation. Il faut, pour les réseaux sociaux, trouver un ciment plus liant entre ses membres, ce que les anciens critères constitutifs de la Nation offrent encore.

Alors comment Facebook parvient-il à exacerber le sentiment d’appartenance de sa communauté pour parvenir à la maturité d’un Réseau-Nation ?

Au mois d’octobre, peu après avoir annoncé être devenu le 5ème pays du monde en terme de population, Facebook a facilité le lancement et la communication de deux initiatives qui sondent puis traduisent l’opinion des Facebookers :

# La première, Le Bonheur National Brut (BNB), analyse les dizaines de millions de statuts mis à jour quotidiennement pour en tirer de substantielles conclusions sur le “bonheur” global de la nation : “Chaque jour, des millions de personnes partagent ce qu’elles ressentent avec les gens qui comptent le plus dans leur vies via les modifications de leur statut Facebook. Ces mises à jour sont de petites ouvertures sur l’humeur des personnes. Elles sont brèves, directes et décrivent ce qui se passe dans leur semaine, aujourd’hui ou à l’instant même. Toutes rassemblées, ces mises à jour sont révélatrices de notre humeur collective” Si l’application se limite pour l’instant aux USA pour des raisons de langue, la vision est belle et bien de révéler “l’humeur collective” du réseau tout entier rassemblé en nation globale. Il est d’ailleurs intéressant de remarquer la consonance du BNB avec un baromètre national médiatique tel que le Produit National Brut (PNB). Ou encore la référence inconsciente du BNB à l’indice de confiance des ménages, dont chacun ignore la signification exacte tout en le consacrant comme révélateur quasi-scientifique de notre forme économique nationale, et donc de notre devenir commun

# La deuxième est en fait un nouveau portail (peace.Facebook.com) destiné à promouvoir la paix dans le monde. L’ambition semble démesurée : “Facebook est heureux de pouvoir aider au rapprochement entre les peuples grâce à sa technologie. C’est en aidant à communiquer et à échanger des idées que nous pourrons réduire les conflits à court et à long terme” Cette initiative repose sur un mouvement plus large à l’initiative de Stanford : Peace Dot. Le point saillant ici, c’est que Facebook tente, en se positionnant au dessus de la mêlée, de démontrer que son réseau permet de dépasser les traditionnels clivages qui opposent les nations traditionnelles, mais il le fait en usant des critères traditionnels objectifs de la Nation, en comptabilisant par exemple le nombre de liens d’amitié se créant dans le réseau entre historiques nations sœurs ennemies : Grecs et Turcs; Palestiniens et israéliens; albanais et serbes; etc..

L’objectif vraisemblable de ces deux initiatives est de franchir une étape décisive pour offrir un nouveau socle au lien social qui unit tous les membres du réseau: la mue d’une communauté partageant des intérêts communs à l’idée d’une nation partageant un devenir commun (le fameux “Vivre ensemble” de la définition subjective d’une nation)

L’exacerbation du sentiment d’appartenance à un réseau parait telle à certains, que des annonceurs y verraient même une opportunité de communication en jouant sur la fibre (osons) “réseaux-nationalistes” des membres. Par exemple dans cette vidéo promue par une marque, dont la description laisse songeur : “Facebook n’aime pas Twitter, qui lui ne supporte pas MySpace… Le conflit entre les plates-formes sociales n’est un secret pour personne et certaines marques l’ont bien compris… Pour la sortie de son dernier téléphone portable, le Samsung Corby S3650, la marque coréenne a recruté dans ses rangs des bloggeurs brésiliens prestigieux de 4 réseaux sociaux (Facebook, Orkut, Twitter et MySpace). Chaque représentant devait lever une mini armée pour affronter celle de son concurrent. Le but avoué était de bien entendu mettre en avant l’aisance du nouveau téléphone en matière de connectivité et de gestion des réseaux sociaux”

L’ère des réseaux-nations ou la future guerre des réseaux…?

Cliquer ici pour voir la vidéo.

» Article initialement publié sur Netpolitique

]]>
http://owni.fr/2009/11/17/partager-un-devenir-commun-lere-des-reseaux-nations/feed/ 4