Les deux phases de l’enquête en ligne : trouver des informations via les moteurs, trouver des contacts via les réseaux
Il y a trois semaines, afin de préparer une conférence, je vous ai sollicité via twitter et facebook pour trouver des informations sur le web en Suisse. Retour d’expérience sur ces services considérés comme inutiles quand on ne les pratique pas, ou mal. Le contexte Afin d’être au plus proche de mon auditoire – un quotidien basé [...]
Il y a trois semaines, afin de préparer une conférence, je vous ai sollicité via twitter et facebook pour trouver des informations sur le web en Suisse. Retour d’expérience sur ces services considérés comme inutiles quand on ne les pratique pas, ou mal.
Le contexte
Afin d’être au plus proche de mon auditoire – un quotidien basé à Genève – il était absolument nécessaire de connaître l’environnement local. Marchés de la presse et du web, meilleures expériences en ligne en Romandie, explications sur les modes d’accès et de consommation de l’information, autant de données particulièrement difficiles à trouver dès qu’il s’agit de quitter la macro-économie.
La limite des moteurs de recherche
Grâce aux moteurs, et notamment à la recherche avancée dans google, l’accès aux documents classiques d’audience est facilité. Sur le site du Conseil fédéral – admin.ch – comme sur le site de la REMP – qui mesure la diffusion de la presse – vous trouverez divers .pdf qui permettent d’avoir une vision chiffrée.
Deux limites évidentes :
- cela reste des chiffres provenant d’études, avec toutes les réserves qu’impliquent les outils de mesure d’audience online comme offline. Mais ils font foi, alors…
- certains chiffres sentent plus ou moins le formol, tant les documents sont datés.
Enfin, plus que des chiffres d’audience, je cherchais surtout des informations pour mieux comprendre l’état d’esprit général. Et ça, les moteurs ne peuvent pas facilement le décrire.
On peut tomber sur d’excellents blogs, qui relatent les expériences réussies (ou ratées) localement. Mais cela reste factuel, et surtout ne donne pas le background nécessaire pour comprendre la pratique des médias d’une population d’un million et demi d’habitants.
Demander de l’aide : ce n’est pas sale
Lorsqu’un journaliste demande à interviewer une personne, il lui demande de l’aide en vue de rédiger un article.
C’est exactement la démarche entreprise sur twitter et facebook : demander à mes connaissances – et aux connaissances de mes connaissances – s’ils avaient des infos sur l’état du web en Suisse.
Le 8 septembre, voici donc le message envoyé sur twitter, message automatiquement relayé via facebook.
Sur twitter, parmi les 800 followers, 10 ont relayé mon message original. Par ordre chronologique de RT, un grand merci à
@xternisien (journaliste au Monde),
@Polo_ (journaliste au Courrier Picard),
@philippe_lagane (blogueur),
@leGouter (fan de groove…),
@mettout (rédacteur en chef de lexpress.fr),
@berkati (politologue et journaliste),
@MonsieurPierre (journaliste),
@wubitt (résident suisse),
@la_nr_chantal (l’un des comptes twitter de la Nouvelle République géré par Chantal ^^)
et enfin @webatou (qui se bat pour des sites web accessibles)…
Sur facebook, deux personnes basées en Suisse m’ont demandé de préciser ma demande (il faut reconnaître qu’en 140 caractères…).
D’après l’outil bit.ly (qui a tendance à gonfler les stats), 200 clics ont amené 83 personnes vers cette page sobrement intitulé Le web en Suisse :
Cette page est un Google Doc en mode wiki ouvert, c’est à dire que toute personne se retrouvant sur la page peut l’éditer – elle est maintenant fermée.
En 6 heures, cette page a enregistré 350 “activités”. Sur Google Doc est considérée comme activité l’arrivée d’une personne sur la page. Ensuite, l’unité “une activité” équivaut à toutes les modifications apportées par cette personne en l’espace d’un temps donné – a priori une minute. Plusieurs personnes peuvent éditer la page en même temps.
Quelles sont les informations recueillies ?
Un peu de tout, sans doute en raison de questions trop évasives de ma part (mais quand vous connaissez mal un sujet, vous savez quelles questions exactes poser vous ? ^^)
Quoiqu’il en soit, ces informations m’ont permis de mieux recentrer mes questions pour la deuxième phase de mes recherches.
Chercher de l’information, et trouver des contacts
La voilà la grande différence entre un moteur de recherche et un réseau social : le premier donne des informations, le second apporte des contacts qualifiés. Comment ?
Sur la page wiki sont apparus très vite des noms de personnes ad’hoc à interroger.
En parallèle mon réseau sur twitter s’est agrandi. Une (modeste mais qualifiée) vague de nouveaux twittos, suisses pour la plupart, sont arrivés. Voici ci-dessous le parcours de mon message original, avec l’heure et le lieu.
Afficher Le parcours d’un message twitter. sur une carte plus grande
10 personnes, c’est relativement faible mais c’est justement tout l’intérêt de la chose : je ne suis pas une star des réseaux sociaux, ai une influence discutée par ma propre progéniture et ne suis pas salarié par un journal ou une marque connue.
Il est intéressant de voir le lieu de ceux qui ont participé au document Google :
Ce qui tend à démontrer que s’il est nécessaire d’avoir un nombre de contacts minimum, il est surtout crucial d’avoir un réseau qualifié.
En raison d’un temps limité, je n’ai pas pu contacter toutes les personnes recommandées. Trois personnes m’ont permis d’avoir une vision éclairée de la situation, et je tiens à les remercier pour leur réactivité et surtout leur disponibilité à des horaires fantaisistes (de 21 à 23 heures avec Sandrine Szabo, entre minuit et une heure du matin avec Clément Péquignot, et le lendemain matin pour Pierre-Yves Revaz).
Ces trois personnes ont été contactées et interviewées moins de 24 heures après lancé le premier message sur twitter.
Quelles leçons en tirer ?
Une vaste question auquel il serait bien exagéré de répondre en une seule expérience, qui présente un bémol important.
Les gens sur le web, et notamment les francophones sur twitter, sont particulièrement friands d’internet. Du coup, leur poser une question qui traite du web les titille assez vite. Pas sûr d’avoir les mêmes réponses sur des sujets d’actualité.
Quelques remarques cependant.
- la question posée était une demande d’information et non une demande de contact. En lançant “Cherche plusieurs personnes pour les interviewer sur l’état du web en Suisse”, il n’est pas sûr que les bonnes personnes se soient présentées, tout simplement parce que dans ce cas vous attirez celles qui veulent être interviewées – et non celles qui sont prêtes à partager une information gratuitement.
- il est illusoire de croire que lancer une question relativement complexe sur un réseau social va apporter une réponse. Il y a un moment où il faut prendre son téléphone (ou son Skype en l’occurence) pour préciser les questions et les réponses.
- c’est un gain de temps considérable. “Mon” réseau a travaillé pour moi. Très concrètement, j’ai lancé le message à 14h, mais n’y suis revenu que deux heures après. Entre temps, les informations et les contacts sont arrivés d’eux-mêmes. Reste évidemment à trier ensuite.
- c’est une facilité de mise en relation exceptionnelle. Comment aurais-je fait il y a 15 ans ?
// J’aurais appelé des organismes officiels ou des entreprises,
// serait tombé sur de gentil(le)s secrétaires dont le métier est de filtrer les coups de fil,
// aurais eu des réponses plus ou moins claires, plus ou moins rapidement, mais surtout des réponses en impasse. Là, chaque personne du réseau est un pont vers une autre personne, éventuellement plus qualifiée ou d’avis différent.
Quels sont vos retours sur des expériences similaires ? L’an dernier, France 24 avait détaillé leur utilisation de twitter pour trouver une personne à interviewer suite à la fusillade dans un collège en Allemagne. Mais ce qui marche pour des sujets web ou des breaking news, l’avez-vous expérimenté pour du local ? Pour de l’info de proximité ? Vos commentaires sont les bienvenus !
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