Flipboard, PostPost… Après les agrégateurs, voici les “social-magazines”
De nouveaux interfaces permettent de sélectionner des contenus en se basant sur le principe de la recommandation sociale.
La proximité, la personnalisation de l’info : deux graals des médias qui obsèdent les éditeurs depuis longtemps. Avant, on parlait de cible : mieux cibler pour mieux adapter ses contenus aux lecteurs. Puis Internet est arrivé et on s’est mis à parler d’algorithme, de flux RSS et, plus récemment, de social graph. Quelles sont ces étapes et où en est-on aujourd’hui ?
1- Il y a eu le mythe de la configuration : je peux configurer mon média pour ne recevoir que les informations sur les sujets qui m’intéressent. Idéal sur le papier, plus compliqué online. Parce que 1) les internautes n’aiment pas perdre du temps à configurer 2) ils aiment aussi être surpris.
2- Il y a eu l’invasion des agrégateurs : si je ne peux pas personnaliser, je peux par contre aider l’utilisateur qui ne se retrouve plus dans un seul média mais à travers une multitude de contenus éparpillés sur la toile. Google News est arrivé avec ses contenus sélectionnés par algorithmes. Ce n’était pas un média personnel, mais il s’affranchissait des frontières des marques pour proposer une agrégation basée sur la pertinence et la popularité octroyées par les foules. Le filtre des foules a ses vertus : ce qui intéresse la majorité est susceptible de me toucher. Dans le même esprit, Digg.com, puis Wikio, ont creusé ce filon du média personnalisé par la communauté : les utilisateurs pouvaient voter pour hiérarchiser les contenus.
3- On est encore loin du média idéal et centré sur mes besoins, même si le filtre des foules a ses vertus. À côté des agrégateurs algorithmiques, on a vu apparaître les lecteurs de flux RSS. Idéal, encore une fois, sur le papier : chaque média produit un flux de syndication (RSS) auquel je m’abonne, sur lequel je peux appliquer une taxonomie (je classe mes flux par thématiques), ce qui me permet de me créer mon média personnel. Netvibes a été le plus beau représentant de ces méta-médias qui s’affranchissaient de la hiérarchisation traditionnelle. Google Reader a repris le concept, mais en l’intégrant dans une logique de flux, plus adaptée aux usages du moment. Problème : configurer ses flux reste une activité lourde. Il faut faire un effort (et savoir ce qu’est un flux RSS).
4- Avec l’émergence des médias sociaux, le web a franchi une nouvelle ère : on est passé de l’agrégation par algorithmes ou par configuration de flux, à la recommandation. Sur Twitter et Facebook, les utilisateurs se sont naturellement mis à partager des liens vers des contenus susceptibles d’intéresser leurs “amis” ou leurs “followers” (abonnés Twitter). C’est une nouvelle révolution : un contenu partagé par un ami a bien plus de valeur qu’un contenu sélectionné par un algorithme, ou par un journaliste. Le phénomène a pris tellement d’ampleur que, grâce aux API (interfaces) délivrées par ces médias sociaux, des acteurs tiers se sont mis à créer des médias reconstituant les contenus sur la base des liens partagés.
5- On les appelle les social-magazines : paper.li (qui a remporté un prix lors du dernier “LeWeb”) ou Twittertim.es recréent un média personnel sur la base des contenus partagés par Twitter. Plus récemment, PostPost, s’appuie exclusivement sur votre communauté Facebook (depuis, Paper.li s’appuie aussi sur Facebook). Résultat, un Google News de proximité : la proximité sociale. Un média exclusivement constitué des articles, vidéos et photos, que vos amis ont trouvés intéressants.
Dans le même esprit, Flipboard est allé encore plus loin. Lancé en juillet dernier, ce e-magazine est disponible uniquement sur iPad sous la forme d’une application. Il combine expérience utilisateur, laquelle reproduit le feeling et la mise en scène de qualité d’un magazine (on tourne les pages, on met en scène les images, on joue sur le “beau”) et proximité sociale des contenus. Flipboard ne se contente pas seulement de mettre en scène des liens, il intègre également des infos plus personnelles partagées par vos amis : photos de vacances, statuts, commentaires. Et nous interroge à nouveau : qu’est-ce que l’info, quelles sont ses frontières ?
Le scope de l’offre média élargi aux experts
Flipboard élargit également le scope de son offre média en sortant du seul cercle d’amis : le magazine propose des contenus sélectionnés par des experts via Twitter, et les organise en rubriques thématiques comme le high-tech, la mode ou la gastronomie. Au lecteur d’ajouter les sections qui l’intéressent.
Plus récemment encore, la société a passé des accords avec des médias comme le Washington Post ou All Things Digital (Wall Street Journal) pour qu’ils soient présents sur l’application et proposent leurs contenus à travers l’expérience unique Flipboard. Un peu comme on créerait une page Facebook. Désormais, il faut aussi être sur Flipboard. Think distributed !
Mike McCue, le fondateur de Flipboard voit très loin : son ambition est de dépasser l’environnement Twitter et Facebook pour embrasser le RSS (Google Reader notamment) et d’autres sources, a-t-il confié à Gigaom. Et ouvrir la voie à un nouveau business model : un nouveau genre de modèle publicitaire qui combinerait le style traditionnel du magazine avec l’expérience de personnalisation.
Et, évidemment, Flipboard parie beaucoup sur le langage HTML5 (utilisé sur les navigateurs web prochaine génération) qui, sur mobiles et tablettes notamment, devrait révolutionner l’expérience utilisateur dans les prochaines années.
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Billet initialement publie sur La Social NewsRoom
Image CC Flickr John Federico
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