Du jeu en ligne à la lutte contre la pédopornographie
L'ONG Action Innocence a présenté récemment un jeu en ligne pour informer les enfants des dangers d'internet. Elle met aussi à la disposition de la police et de la gendarmerie des logiciels pour lutter contre le cybercrime et particulièrement la pédopornographie. Explications et bilan.
C’est sous le toit coulissant du restaurant Lasserre , sous les premiers rayons obliques et les premières effluves de printemps, que l’Association Action Innocence a organisé, le 22 mars, un déjeuner de gala, offert à l’association par le célèbre restaurant parisien. Action Innocence est une Organisation Non Gouvernementale (ONG) créée en 1999 en Suisse, et en 2003 en France. Cette ONG dispose de quatre psychologues spécialisées, qui proposent des séances de prévention pour les enfants (8-10 ans), les préadolescents (11-12 ans) et les adolescents (13-17 ans), mais aussi pour les parents dans les écoles qui en font la demande. En 2008, l’association est intervenue dans quelque deux cents établissements scolaires, et a sensibilisé environ 10 000 enfants et 1 500 parents et professeurs. En 2009, c’est plus de 15000 élèvre qui ont rencontré Action Innocence en France. Pour mieux comprendre ce que font concrètement ce genre d’associations, je vous conseille de lire cet article : « Opération prévention », écrit il y a un an. J’étais allé assister à une intervention d’une jeune psychologue dans un lycée de la banlieue parisienne. Très instructif. J’ajoute que cette association n’est évidemment pas la seule à œuvrer de la sorte en France. Vous pouvez lire, ici, un article écrit également pour le Monde en mars 2009, consacré à E-Enfance : « Enfants, ados et parents veulent des réponses ».
A l’occasion de ce déjeuner, Action Innocence a organisé une mini conférence de presse pour présenter, NetCity.org, portail de jeux pour les 9-12 ans dont l’objectif est de leur apprendre à se protéger des dangers d’Internet. Si vous voulez en savoir un peu plus sur le sujet, je vous invite à lire ici en suivant ce lien l’article que j’ai publié ce week-end dans Le Monde : « Initier les enfnats aux dangers du Net ».
Mais ce qui est encore plus intéressant, et que l’on sait un peu moins, c’est qu’Action Innocence ne se contente évidemment pas de développer des jeux en réseau. L’ONG a également contribué à la mise au point d’applications très pointues pour aider les services de police dans leur lutte contre la cybercriminalité et en particulier contre la pédopornographie, dans le cadre d’un programme qui répond au nom d ’ « Anti Pedo Files ». Un de ces logiciels s’appelle « LOG P2P » et son élaboration a réclamé une très puissante station de travail financé par Action Innocence en Suisse. Il permet de traquer très discrètement et d’identifier les diffuseurs de contenus à caractère pédopornographique. En France, ces applications sont mises gracieusement à la disposition de la police et de la gendarmerie nationales. Le Commissaire divisonnaire Christian Aghroum, chef de l’Office central de lutte contre la criminalité liée aux technologies de l’information et de la communication (OCLCTIC) et le Colonel Francis Hubert, chef du Service technique de recherches judiciaires et de documentation (STRJD), ont profité de ce déjeuner pour faire un bilan de la collaboration de leurs services avec l’ONG.
En 3 ans, grâce à ce logiciel, quelque 1400 procédures ont ainsi pu être lancées. Tous les matins ce sont 200 à 300 échanges de fichiers illicites dont les adresse IP ont été identifiées par les ordinateurs du STRJD. « Une quantité ingérable, selon le Colonel Francis Hubert. Alors, on se concentre sur les gros fichiers ». Depuis mai 2009, les gendarmes peuvent de surcroît se faire passer pour quelqu’un d’autre sur le réseau. La loi avait été votée en 2007 mais ce n’est que deux ans plus tard que le décret d’application a été publié. Chats, jeux en réseaux, forums sont très fréquentés par les pédophiles. Désormais, derrière des pseudonymes ou des avatars d’enfants, il peut y avoir un gendarme. Ce nouveau mode opératoire a donné lieu en un peu moins d’un an à une dizaine d’interpellations. « Il est impressionnant de voir avec quelle facilité on entre en contact avec des prédateurs », explique encore le gendarme.
En France, sur l’ensemble du territoire, ce sont aujourd’hui environ 500 enquêteurs, gendarmes dits « Ntech » et policiers, qui luttent contre le cybercrime. « Le rapprochement en cours entre forces de police et gendarmerie nationale nous rendra encore plus efficace », estime le commissaire divisionnaire Christian Aghroum. Sans compter qu’avec par exemple les services de « cyberdouane » de nouveaux acteurs ont fait leur apparition contre le crime électronique. « Mais le nombre de « cybercriminels » est lui aussi en augmentation », constate C. Aghroum.
Reste que les mentalités évoluent, et les internautes se montrent eux aussi plus vigilants. Le site mis à leur disposition par le ministère de l’intérieur pour signaler des comportement illicites sur le net, www.internet-signalement.gouv.fr, avait enregistré 12419 « appels » en 2008. Ce chiffre est passé à 52353 signalements en 2009. 6110 ont donné lieu à des transmissions aux services d’enquêtes. Dans un toers des cas, il s’agissait de pédopornographie.
Olivier Zilbertin
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